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Bilan 2023 et perspectives 2024

Mis à jour le 15/07/2024 à 13h25
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2023 est arrivé à son terme, la première année véritablement post-Covid, mais qui a vu l’inflation des prix bouleverser notre pouvoir d’achat. Du côté de la vape française, les puffs sont vouées à disparaître et la menace de taxes et d’interdiction des arômes au niveau européen plane alors que le soutien des politiques nationaux est toujours aussi timide. Le Vaping Post fait l’état des lieux de la vape et a demandé à 14 personnalités ce qui les a marquées en 2023 et ce qu’elles attendent de cette nouvelle année qui démarre.

Bilan cigarette électronique 2023

Une année pleine de rebondissements arrive doucement à son terme.

Antoine Flahault (professeur de santé publique à l’université de Genève et directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de l’université de Genève), Jean-François Etter (professeur honoraire à la faculté de médecine de l’université de Genève) et David Sweanor (professeur à la faculté de droit à l’université d’Ottawa)

Trop d’experts au sein et autour de l’OMS persistent à s’opposer à la stratégie de réduction des effets nocifs de la cigarette, pourtant inscrite dans la Convention-cadre pour la lutte antitabac.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Antoine Flahault

Antoine Flahault

L’événement majeur est la réduction massive de la consommation et du nombre de cigarettes conventionnelles vendues au Japon. Cette réduction a été d’environ 50 % au cours des sept dernières années, ce qui est sans précédent sur un marché d’une telle échelle. Ce phénomène n’est pas imputable à la santé publique, dont l’influence est plutôt faible au Japon, mais plutôt aux efforts de marketing des fabricants de dispositifs de tabac chauffé.

Jean-François Etter

Jean-François Etter

L’industrie nationale du tabac est classiquement puissante au Japon (le gouvernement détient une participation importante dans Japan Tobacco), mais Japan Tobacco a manifestement choisi de concurrencer Philip Morris sur les produits de tabac chauffé plutôt que de chercher à interdire les produits de substitution à la cigarette.

David Sweanor

David Sweanor

Paradoxalement, le rôle de l’industrie du tabac au Japon semble avoir été décisif dans le remplacement du tabac fumé par le tabac chauffé sans combustion. En revanche, de nombreux autres pays ont plutôt, dans le même temps, cherché à interdire ou entraver toute alternative aux cigarettes combustibles.

 

 

Le meilleur de 2023 ?

La prévalence historiquement basse de l’usage de la cigarette dans plusieurs groupes sociaux, comme les jeunes femmes en Norvège ou les adolescents aux États-Unis, ce qui prouve que ce comportement peut être éradiqué, au moins dans certains groupes.

Le pire de 2023 ?

Trop d’experts au sein et autour de l’OMS persistent à s’opposer à la stratégie de réduction des effets nocifs de la cigarette, pourtant inscrite dans la Convention-cadre pour la lutte antitabac.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

L’hostilité s’accroît à l’égard du tabac sans fumée et des cigarettes électroniques. Elle vient des milieux de la santé publique qui gravitent autour de l’OMS, notamment en raison d’une vision de l’usage de la nicotine fondée uniquement sur l’abstinence. Il est regrettable pour la santé publique que les positions soient si dogmatiques et apparemment insensibles aux preuves scientifiques concernant l’efficacité des stratégies de réduction des risques. Par ailleurs, l’empreinte écologique des cigarettes électroniques jetables est regrettable, comme celle de toutes les batteries ou même des mégots de cigarettes classiques. Cette empreinte est liée à l’absence de recyclage, notamment des cellules au lithium des batteries. Un recyclage systématique et une éducation du public devraient être rapidement organisés à ce sujet, en impliquant les fabricants dans cet effort et dans les coûts qu’il engendre.

Professeur Bertrand Dautzenberg, tabacologue à l’Institut Arthur Vernes

L’interdiction des arômes aux États-Unis s’accompagne d’un effondrement des ventes d’e-liquide et d’une augmentation des ventes de cigarettes.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Bertrand Dautzenberg

Bertrand Dautzenberg

La vape reste en 2023 l’objet de polémiques désespérantes. Les études sur la toxicité des émissions en faisant cramer des e-liquides en laboratoire peuvent être intéressantes comme le sont les crash-tests des voitures, mais informent peu sur l’usage normal. Ainsi la suggestion du dernier rapport Tabac 2023 de l’OMS d’un risque du vapotage passif, voisin de celui du tabagisme passif, n’est pas recevable. Le refus de nombreux organismes d’encourager la bonne utilisation de l’e-cigarette pour le sevrage est contraire aux dernières données de la Cochrane Review 2023 qui montrent que la vape est un outil bien toléré et le plus efficace pour l’arrêt du tabac (du fait de sa bonne compliance, car pris avec plaisir).

L’interdiction des arômes de la vape aux États-Unis, selon Abigail S. Friedman de l’université de Yale, s’accompagne d’un effondrement des ventes d’e-liquide, mais parallèlement il existe une augmentation des ventes de cigarettes (une catastrophe de santé publique, une bonne nouvelle pour les cigarettiers !).

Le meilleur de 2023 ?

L’accélération de la baisse du tabagisme au Royaume-Uni alors que la France est un peu à la traîne.

Le pire de 2023 ?

Le rapport Tabac 2023 de l’OMS dit beaucoup de bonnes choses sur le tabac, mais sur de nombreux points concernant la vape, il tord la vérité scientifique sans que je ne connaisse le lien éventuel avec la promotion des thèses promues par la Bloomberg Philanthropies.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

J’espère qu’en 2024 la vérité scientifique sera rétablie sur l’interaction vape/e-cigarette chez les adolescents grâce à la revue générale qui doit être présentée au congrès francophone de tabacologie (SFT) le 24 novembre 2023 et qui devrait être publiée avant 2024. Cette étude permet de démonter les conclusions infondées et abusives des études longitudinales concluant à un triplement (dont le caractère causal n’est pas clairement démontré) de l’effet général de porte d’entrée de la vape vers la cigarette. Le design de ces études interdit toute analyse de l’effet inverse de diversion du tabac par la vape, invalide de nombreuses conclusions des études et explique les discordances avec l’épidémiologie. Rétablir la vérité sur ce que disent ces études et redresser ce que l’on peut en conclure, pourrait rouvrir le dialogue, si des initiatives adaptées sont prises.

Riccardo Polosa, fondateur de CoEHAR (Centre d’excellence pour l’accélération de la réduction des risques)

Au niveau international, de plus en plus d’études ont confirmé le potentiel de l’e-cig comme outil de sevrage.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Riccardo Polosa

Riccardo Polosa

En 2023, nous avons fait tomber la barrière traditionnelle qui séparait les chercheurs et les scientifiques dans le domaine de l’information scientifique interdépartementale, comblant ainsi le fossé avec l’utilisateur final. Les fruits d’un travail qui a réorienté la recherche vers l’empathie sont enfin récoltés. Au CoEHAR, conscients que nous serions de véritables pionniers, nous avons créé un comité de travail composé de certains des plus grands experts en diabétologie, réunis d’abord à Catane, puis à Varsovie. La collaboration acharnée de ces sommités a ouvert une flopée de réalités alternatives pour les fumeurs diabétiques, créant de nouvelles lignes directrices pour le traitement de cette population. Cependant, le défi le plus important a été de défendre le droit de vapoter devant la Commission des Affaires sociales du Parlement italien, où nous avons discuté activement des stratégies de réduction des risques dans le domaine de la dépendance au tabac.

Le meilleur de 2023 ?

Au niveau international, de plus en plus d’études ont confirmé le potentiel de l’e-cig comme outil de sevrage. Une étude Cochrane importante a conclu aux preuves les plus solides à ce jour selon lesquelles les cigarettes électroniques aident les gens à arrêter de fumer mieux que les thérapies traditionnelles de remplacement de la nicotine (patchs ou gommes à mâcher).

Le pire de 2023 ?

La proposition du gouvernement français d’interdire la cigarette électronique jetable pour empêcher les plus jeunes de l’utiliser, alors que l’effet passerelle n’a pas de fondement.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Pour 2024, nous devons distinguer deux volets différents : le volet technologique et le volet social. J’attends une plus grande pénétration du produit au niveau international, aidée par une technologie qui réduit les coûts et améliore les performances. À cet égard, nos travaux peuvent contribuer à améliorer le profil de sécurité des appareils, en offrant encore plus de certitude aux utilisateurs finaux, qui atteignent désormais un total de plus de 80 millions de vapoteurs dans le monde. D’un point de vue social, nous devons nous interroger sur la véritable finalité de nos recherches pour l’individu. Nous avons besoin d’études à long terme pour étudier le potentiel réel des cigarettes électroniques, le rôle possible de l’IA dans la réduction des risques du tabac (THR) et une nouvelle approche pour changer la perception du public à l’égard de la THR, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Jean Moiroud, président de la Fivape

40 000 réponses au questionnaire ‘Merci la vape’ sur les usages et le ressenti des vapoteurs : il s’agit tout simplement de la plus grande enquête jamais conduite sur le sujet dans le monde.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Jean Moiroud

Jean Moiroud

Le lancement de l’initiative Merci La Vape. Je retiens d’abord la portée symbolique de voir Aiduce, Sovape, La Vape du Cœur et la Fivape œuvrer ensemble pour envoyer un message clair et positif à nos décideurs. Au-delà, ce sont les résultats de la pétition, et surtout de l’enquête, qui sont les plus impressionnants. 40 000 réponses à un questionnaire pointu sur les usages et le ressenti des vapoteurs : il s’agit tout simplement de la plus grande enquête jamais conduite sur le sujet dans le monde. Et les retours sont sans appel : les vapoteurs sont très attachés au produit qui leur a permis de se défaire du tabac. Ils expliquent dans leurs témoignages qu’ils ne se laisseront pas faire si le législateur venait, par exemple, à interdire les arômes dans les e-liquides.

Le meilleur de 2023 ?

Merci La Vape évidemment, avec un dispositif citoyen, engagé et positif.

Le pire de 2023 ?

Les taxes qui se mettent en place en Europe, à l’initiative des États membres, faisant progressivement de la France le “village gaulois” de la vape.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

En France, les puffs mettront la vape à l’agenda du politique. C’est une opportunité pour les professionnels de faire de la pédagogie sur les spécificités de la filière et les enjeux de la lutte contre le tabac. Il s’agira de mettre en débat la question des circuits de distribution, de montrer toute la pertinence des boutiques spécialisées et de replacer au centre des discussions l’âge moyen d’entrée dans le tabac. En Europe, c’est plus compliqué d’y voir clair… Les calendriers sont toujours incertains, mais les sujets sont plus que jamais sur la table. Parmi ceux-ci, la taxation des e-liquides et surtout la mise à jour de la directive sur les produits du tabac (TPD) qui abordera probablement l’exclusion de certaines catégories d’arômes. De gros dossiers en perspective pour notre filière !

Damian Sweeney, partenaire de European Tobacco Harm Reduction Advocates (ETHRA)

Les décideurs politiques doivent être pleinement conscients des conséquences involontaires de politiques prohibitives.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

L’année 2023 a vu le lancement de la dernière série de consultations visant à évaluer le cadre législatif de lutte antitabac, qui alimentera la prochaine TPD. ETHRA a participé à chaque étape du processus et notre message a été clair. Nous avons souligné que le fait de disposer d’une large gamme de produits à base de nicotine plus sûrs (PNS) accessibles et attrayants permettra d’atteindre plus rapidement l’objectif de l’UE consistant à parvenir à une société sans fumée d’ici 2040. Nous avons souligné qu’il doit y avoir une distinction politique claire entre les produits combustibles et non combustibles. Les décideurs politiques doivent être pleinement conscients des conséquences involontaires de politiques prohibitives telles que l’interdiction des arômes et une fiscalité élevée (tabagisme accru, marché noir). Les PNS offrent la possibilité de réduire les taux de tabagisme et d’améliorer la santé publique et devraient être adoptés et non combattus.

Le meilleur de 2023 ?

La Suède a presque atteint le statut de pays sans fumée et le snus y a joué un rôle central, comme en témoigne l’annonce du gouvernement suédois selon laquelle il y aura une réduction de 20 % de la taxe sur le snus.

Le pire de 2023 ?

La décision sans preuve du gouvernement belge d’interdire les sachets de nicotine.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Nous attendons toujours la révision de la directive sur les accises sur le tabac de la Commission européenne qui verra probablement des taxes appliquées aux produits à base de nicotine plus sûrs. Comme nous l’avons déjà vu en Allemagne, une fiscalité excessive pourrait être désastreuse pour les PNS. La COP10 de l’OMS se tiendra au Panama en novembre prochain (celle-ci a depuis été reportée à 2024, N.D.L.R.). Les discussions et les décisions sur les PNS, susceptibles d’inclure des arômes, occupent une place importante à l’ordre du jour. Les saveurs sont également un sujet de préoccupation pour la prochaine TPD. Alors que certaines ONG appellent de plus en plus à interdire les arômes, la voix des consommateurs en faveur des arômes devient de plus en plus forte de jour en jour. Grâce au travail acharné des associations de consommateurs, je suis convaincu que notre voix est entendue par les décideurs politiques et par ceux chargés de préparer les rapports pour la Commission européenne.

Dustin Dahlmann, président de l’Independent European Vape Alliance (IEVA)

La Global Vape Alliance rassemble pour la première fois les grands organismes internationaux de la vape : ECCC (Chine), VTA (États-Unis), UKVIA (Royaume-Uni) et IEVA (Europe).

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Dustin Dahlmann

Dustin Dahlmann

En ce qui nous concerne, l’événement le plus important a été la signature de l’accord Global Vape Alliance à InterTabac à Dortmund. La déclaration vise à favoriser la collaboration, à promouvoir des pratiques responsables et à défendre la cause de la réduction des risques dans l’industrie du vapotage. La Global Vape Alliance rassemble pour la première fois les grands organismes internationaux de la vape : ECCC (Chine), VTA (États-Unis), UKVIA (Royaume-Uni) et IEVA (Europe). La déclaration historique souligne le pouvoir de l’unité au sein du secteur. En se réunissant sous son égide, les leaders de l’industrie s’engagent à apporter des changements responsables et positifs à l’échelle mondiale, signifiant ainsi une nouvelle ère dans l’engagement de l’industrie en faveur de la santé publique, de la durabilité environnementale et du bien-être des fumeurs à la recherche d’alternatives aux produits du tabac traditionnels.

Le meilleur de 2023 ?

L’accord Global Vape Alliance constitue une étape importante dans la coopération internationale de l’industrie du vapotage.

Le pire de 2023 ?

Cette année, l’interdiction des arômes aux Pays-Bas a encore été durcie, et sera appliquée l’année prochaine. Les arômes sont déjà interdits au Danemark. C’est une très mauvaise évolution pour la santé publique. Les saveurs sont extrêmement importantes pour passer du tabac au vapotage.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

De nouvelles directives ont été annoncées au niveau européen et les directives existantes sont en cours de révision. Le nouveau règlement sur les batteries stipule qu’elles pourront être retirées et remplacées indépendamment par les consommateurs à partir de fin 2026. Cela concernera tous les modèles de cigarettes électroniques dotés d’une batterie intégrée, en particulier les cigarettes électroniques jetables. En outre, une proportion minimale de matériaux recyclés dans les emballages en plastique a été introduite dans le projet de règlement européen sur les emballages. Cela inclut également les bouteilles de liquide. La révision de la TPD et de la directive fiscale revêt aussi une grande importance. La base de toute réglementation des cigarettes électroniques devrait être la preuve scientifique de la réduction des risques. Il s’agit d’utiliser le potentiel des cigarettes électroniques pour réduire les taux de tabagisme.

Michael Landl, directeur de World Vapers’ Alliance

Alors que le Royaume-Uni était à l’avant-garde de la réduction des risques, il a fait un pas en arrière inquiétant cette année.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Michael Landl

Michael Landl

En 2023, l’événement qui m’a le plus marqué a été la réussite historique de la Suède en matière de réduction du tabagisme. Notre campagne dédiée a été à l’avant-garde de la propagation de ce triomphe, exhortant les autres pays et l’UE à adopter une approche similaire de réduction des risques. Pour attirer l’attention, nous avons déployé des Vikings qui ont symboliquement coupé une cigarette géante devant le Parlement européen. Cet acte est devenu un appel à l’action emblématique. Tout au long de l’année, nous avons eu des réunions cruciales avec des hommes politiques influents au Parlement européen, en Allemagne, en Croatie et dans le monde. Ces interactions ont joué un rôle clé dans la promotion du modèle suédois et dans le plaidoyer en faveur d’une approche fondée sur des données probantes et centrée sur le consommateur en matière de vapotage et de réduction des méfaits.

Le meilleur de 2023 ?

En unissant la communauté du vapotage, la campagne “Mythbusters” a affronté avec force la désinformation qui empêche les fumeurs de passer à la vape. Grâce à des efforts collectifs, nous avons prouvé que nos voix, lorsqu’elles sont harmonisées, peuvent véritablement remodeler le discours et démontrer que nos idées ont du poids.

Le pire de 2023 ?

Alors que le Royaume-Uni était à l’avant-garde de la réduction des risques, il a fait un pas en arrière inquiétant cette année. L’adoption de réglementations plus strictes sur les arômes et les vapes jetables menace l’essence même de leur position progressiste, empêchant potentiellement les fumeurs d’accéder à des alternatives plus sûres. Ce changement signale une tendance politique inquiétante, remettant en question les progrès durement gagnés dans la communauté du vapotage.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Au cours des 12 prochains mois, la directive sur les produits du tabac (TPD) posera des défis importants à l’UE. Nombreux sont ceux qui plaideront en faveur de l’interdiction des arômes et des produits jetables, voire d’une augmentation des taxes. À court terme, le futur s’annonce difficile. Pourtant, à plus long terme, la trajectoire est indéniablement positive. La vérité éclatante demeure : le vapotage sauve des vies. À mesure que cette prise de conscience gagne du terrain, j’espère que l’élaboration des politiques adoptera une approche plus éclairée et fondée sur la science, donnant la priorité à la santé publique plutôt qu’aux mesures motivées par la peur.

Sébastien Béziau, vice-président de Sovape et directeur de publication de Vapyou

La fin du tabagisme qu’annonce l’essor inéluctable du vapotage fait vaciller toutes les sources de revenus.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Sébastien Béziau

Sébastien Béziau – ©Jean-Romain Pac

Cette année encore, de nombreuses études, notamment des méta-analyses Cochrane, sont venues confirmer la moindre nocivité du vapotage par rapport à la cigarette et son efficacité supérieure pour l’arrêt du tabac par rapport à d’autres méthodes, substituts nicotiniques ou médicaments. Aux USA, la courbe du tabagisme des jeunes s’est totalement effondrée en corrélation avec l’essor du vapotage. Il n’y a pas d’effet passerelle, la vape est un boulevard de sortie du tabagisme. D’autres études enfin se consacrent à vérifier la qualité des travaux scientifiques, et il est de plus en plus fréquent que des revues scientifiques rétractent les publications les plus alarmistes et mensongères. Jamais on n’a été aussi sûr. La science a parlé. Quelques rares pays l’ont compris.

Le meilleur de 2023 ?

Quand le gouvernement britannique annonce qu’il va offrir un kit de vape gratuit à 1 million de fumeurs.

Le pire de 2023 ?

Quand j’ai appris que le vapotage pouvait réduire la taille de mes testicules.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Mais, ailleurs, quasiment partout dans le monde, la science ne compte plus. La question du vapotage n’est plus que politique et/ou religieuse. Je n’arrive pas à comprendre vraiment, peut-être un peu des deux. La lutte contre le tabagisme est un sujet hyper consensuel a priori, et depuis des décennies un écosystème s’était installé pour manger sur la bête, les antitabac compris. La fin du tabagisme qu’annonce l’essor inéluctable du vapotage fait vaciller toutes les sources de revenus. L’industrie du tabac s’accroche aux branches pour faire glisser son business vers les produits RDR, les antitabac s’accrochent à leur fonds de commerce en se créant un nouvel ennemi : le vapotage. Des projets ? Supprimer les arômes, taxer la vape, continuer à décourager les fumeurs d’essayer, voire leur interdire.

Gillian Golden, directrice générale de l’IBVTA

En 2023, le tabagisme parmi les adultes au Royaume-Uni a chuté à son plus bas niveau : 12,9 %.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Gillian Golden

Gillian Golden

L’un des moments forts de l’année a été le rapport commandé par le gouvernement britannique, la Khan Review, qui a clairement indiqué que le vapotage a un rôle important à jouer dans l’objectif même du gouvernement d’être “sans fumée d’ici à 2030” (2034 en Écosse). Nous attendons aussi les résultats d’une première étude mondiale de ce type : l’essai contrôlé randomisé COSTED a recruté des fumeurs dans six services d’urgence d’hôpitaux et a offert à une cohorte un soutien régulier dans l’abandon du tabac, tandis que l’autre cohorte a reçu un produit de vape. Une fois ces résultats publiés, j’espère qu’ils convaincront davantage de professionnels de la santé de soutenir le vapotage comme alternative beaucoup plus sûre au tabagisme.

Le meilleur de 2023 ?

Au cours de l’année dernière, le tabagisme parmi les adultes au Royaume-Uni a chuté à son plus bas niveau : 12,9 %. Le vapotage a joué un rôle important à cet égard, ce dont l’industrie devrait être très fière.

Le ministre de la Santé publique, Neil O’Brien, a annoncé qu’un million de vapes gratuites seraient distribuées aux fumeurs adultes en Angleterre dans le cadre d’un programme Swap to stop financé par le gouvernement.

Le pire de 2023 ?

Sans aucun doute, l’amalgame médiatique de plusieurs sujets : en particulier le vapotage des jeunes et la vente de produits illicites. Selon une étude d’Action on Smoking and Health, 40 % des personnes pensent désormais que le vapotage est aussi nocif, voire plus, que le tabagisme, soit une augmentation de 60 % en seulement trois ans.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Les prochaines élections générales britanniques, qui auront lieu avant janvier 2025, seront importantes. Au moment où j’écris, nous savons que le gouvernement actuel a de grands projets en matière de tabagisme et de vapotage, mais nous ne savons pas encore quels changements pourraient survenir au cours de ce prochain mandat. Si l’industrie veut résoudre certains des problèmes actuels, cela signifiera que les fabricants, en particulier ceux basés en Chine, devront faire davantage de contrôles sur leurs chaînes d’approvisionnement mondiales. Nous ne pouvons pas continuer à importer chaque année des tonnes de produits illégaux, qui donnent une mauvaise image du secteur. Enfin, un aspect positif potentiel de la réaction négative sur les produits à usage unique pourrait être que les fabricants et les ingénieurs soient incités à innover dans les appareils et les liquides. Il existe encore un marché cible de 6 millions de fumeurs adultes actuels au Royaume-Uni.

Tim Phillips, directeur général d’ECigIntelligence

Malgré les discours des médias, des hommes politiques et des lobbys antivape, il n’y a pas vraiment de signe de baisse de la popularité de la vape.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Tim Phillips

Tim Phillips

Le marché des produits jetables s’est fortement développé, cela s’est associé à une préoccupation accrue concernant l’utilisation par les jeunes. Les premiers signes de leur interdiction sont apparus associés à une prise de conscience soudaine de l’impact du vapotage sur l’environnement. D’un point de vue positif, malgré les discours des médias, des hommes politiques et des lobbys antivape, il n’y a pas vraiment de signe de baisse de sa popularité. Les consommateurs auxquels il s’adresse sont toujours aussi présents. Enfin, la taille de la section consacrée à l’e-cigarette lors de l’InterTabac à Dortmund a montré à quel point le marché de la vape est devenu important.

Le meilleur de 2023 ?

Malgré la rhétorique antivape, le consensus scientifique sur la réduction des risques est plus solide que jamais. Si cela n’empêche pas certains pays d’adopter une position antivapotage pour des raisons politiques, cela signifie que ceux qui sont plus favorables à l’e-cigarette le resteront probablement. Les produits de la vape ont été exclus de l’interdiction générationnelle néo-zélandaise et nous pensons qu’ils pourraient l’être également de l’interdiction anglaise, si elle est mise en œuvre. Cela pourrait également créer un précédent pour des lois similaires dans d’autres pays.

Le pire de 2023 ?

La tentation est grande pour les gouvernements d’interdire complètement les produits jetables. Bien que cela ne se soit pas encore produit à grande échelle, nous pensons que cela se produira dans de plus en plus de pays.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Le marché des produits jetables va continuer à se développer. Les fabricants répondront aux préoccupations environnementales (ou à la réglementation) par des dispositifs qui se ressemblent mais qui ne sont pas vraiment jetables. En Europe, certains gouvernements seront favorables à la vape (comme le Royaume-Uni) ou hostiles (comme les Pays-Bas), mais beaucoup attendront la prochaine TPD. Aux États-Unis, la situation actuelle – des produits qui restent en vente parce que leurs PMTA n’ont pas été traitées et une interdiction fédérale de facto des arômes – se poursuivra. Mais la FDA pourrait apporter des changements en réponse aux critiques, notamment en adoptant de nouvelles façons d’appliquer et d’évaluer des demandes. Ailleurs dans le monde, il y aura de la croissance, mais la prochaine réunion de la COP au Panama aura une influence. Les interdictions générationnelles et les emballages neutres seront largement envisagés. Mais le vapotage pourrait également être inclus dans un plus grand nombre de programmes nationaux de sevrage tabagique.

Xavier Brunschvicg, porte-parole du Collectif des professionnels de la vape pour la santé publique

Nous faisons partie des pires élèves en Europe. Et on continue d’accabler la vape alors que c’est la solution…

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Xavier Brunschvicg

Xavier Brunschvicg

La tribune du Monde le 30 avril dernier pour l’interdiction de la puff signée par des professionnels de santé et des militants associatifs. Ce n’est pas tant la tribune qui m’a consterné que la reprise massive dont elle a fait l’objet dans les médias. Un véritable rouleau compresseur renforcé par la publication d’un sondage très orienté aux interprétations tendancieuses, voire factuellement erronées. Ce qui m’a le plus frappé à ce moment, c’est que trop peu de voix s’élevaient pour enrayer le bad buzz, générant ainsi une profonde frustration. C’est de là qu’est née l’idée de créer le Collectif des professionnels de la vape (CPV). Avec un double objectif : intervenir à chaud dans les médias en croisant le fer avec les ayatollahs antivape et éduquer les journalistes à la vape dans le temps long.

Le meilleur de 2023 ?

J’ai beaucoup aimé la lecture de La face cachée des antivapes de Vincent Cuisset et Charly Pairaud. Dommage que l’on n’en ait pas parlé davantage.

Le pire de 2023 ?

L’effarante stabilité du tabagisme quotidien en France. Autour de 25 %. Encore plus dans les catégories sociales défavorisées. Nous faisons partie des pires élèves en Europe. Et on continue d’accabler la vape alors que c’est la solution…

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

Je suis très inquiet. Je pense bien sûr à l’interdiction des arômes, à la création d’une taxe sur les e-liquides ainsi qu’à des contraintes renforcées en matière d’information des consommateurs. Mais je pense aussi à cette petite musique qui commence à s’installer et qui laisserait croire que la vape est finalement aussi dangereuse, voire plus, que la cigarette. La désinformation progresse. Je suis d’autant plus inquiet que les professionnels du secteur sont à la fois atomisés et peu mobilisés. Chacun gère son business “as usual”, comme si de rien n’était. Mais quand le ciel nous tombera sur la tête, alors il sera trop tard…

Serge Le Faurestier, secrétaire général et chargé de com’ de La Vape du Cœur

On sent un net recul sur le sujet de la vape alors que, par le passé, la DGS était bien plus ouverte et constructive.

Quel(s) événement(s) retenez-vous de l’année 2023 ?

Serge Le Faurestier

Serge Le Faurestier

Cela fait donc 20 ans que la vape existe et toujours pas de malades ni de morts à cause de celle-ci. Pour autant, la vape continue à être attaquée de toutes parts. Les antivape ne s’arrêtent jamais et les attaques se font de plus en plus rudes. Les marchands de doute persistent (et signent) à refuser de parler de réduction des risques avec la vape. L’année 2023 sera marquée par le projet de suppression de tous les arômes sauf tabac et de taxes d’accise sur les e-liquides. Nous sommes plus dans l’idéologie que dans le pragmatisme scientifique, a contrario de ce que fait le Royaume-Uni, par exemple. Pour autant, les professionnels de santé continuent de faire confiance à La Vape du Cœur. Nous avons actuellement plus de 200 partenaires avec qui nous travaillons régulièrement. Pour la période fin 2022/fin 2023, nous avons distribué plus de 8 700 kits et 127 000 fioles d’e-liquide.

Le meilleur de 2023 ?

Pour La Vape du Cœur, je pense que l’on peut citer notre partenariat officiel avec le CHU de Caen pour la mise en place du projet Hôpital Sans Tabac.

Le pire de 2023 ?

Sans conteste, je citerai la menace concrète de suppression des arômes autres que le tabac et les taxes d’accises envisagées par les autorités de santé publique. La position de la Direction générale de la Santé (DGS), avec le CNCT comme appui idéologique, est incompréhensible. On sent un net recul sur le sujet de la vape alors que, par le passé, la DGS était bien plus ouverte et constructive. Tout du moins, à l’époque où elle était dirigée par Benoît Vallet.

Selon vous, comment évoluera la situation dans les 12 prochains mois ?

En novembre prochain, la COP10 de la FCTC/OMS aura lieu au Panama (événement reporté à 2024, N.D.L.R.). Les plus grandes craintes sont à attendre de ce colloque, particulièrement opaque et fermé. 2024 pourrait donc bien être l’année qui verra les taxes arriver et, de façon moins affirmative, la suppression des arômes. Ce sujet a été évoqué tout au long de 2023 et les menaces sont sérieuses. Ces mesures ne concernent pas seulement la France, et certains pays de l’UE les ont déjà mises en place. On en parle également pour la prochaine TPD V3. C’est pourquoi il est important de signer la pétition Merci la Vape qui sera clôturée le 31 décembre 2023. 2024 verra certainement également la disparition des puffs. On peut se dire que c’est une bonne chose, mais je pense qu’il eût été de bon aloi d’en étudier le bien-fondé plus en profondeur.

Quelles évolutions par rapport aux années précédentes ?