Dix ans. Dix ans déjà que le Vapexpo existe, et cette édition en tout point exceptionnelle est aussi l’occasion de faire un point. Pour changer un peu, nous vous proposons une méditation en forme d’errance dans ses allées.
Joyeux anniversaire
Dix ans. Dix ans (en réalité un peu plus) que chaque année, Paris devient pour trois jours le centre de la vape française. Le salon est colossal, et je donnerais cher pour, juste un instant, être dans la tête de Patrick Bédué lorsqu’il ferme ses portes pour la dernière fois le lundi soir. Le mot “dormir” doit y figurer en bonne place.
Tant d’énergie pour l’organiser, tant d’énergie pour gérer, une fois les portes ouvertes, tous les impondérables, courir partout pour trouver des solutions à tous les problèmes, veiller à ce que ce qui a été organisé se déroule conformément au plan (parce que c’est mieux lorsqu’il se déroule sans accroc) tout en étant toujours souriant et sympathique, en prenant le temps d’un petit mot pour chacun. L’équipe du président s’est dépensée sans compter.
Et la question que l’on se pose, c’est : comment, au terme de ce marathon, trouve-t-on la force de se dire “l’année prochaine, on repart” ? L’exploit le plus important n’est pas d’organiser le salon, et pourtant c’en est un colossal. L’exploit, c’est qu’une fois tout cela fait, l’envie soit encore présente par-delà l’épuisement pour recommencer l’année suivante, encore et encore. Patrick Bédué nous le disait en interview : il a envie de fêter le vingtième anniversaire. Dix fois de plus à la tâche, s’en retourner, au moins.
Dix ans que vous faites ça, Monsieur Bédué. Alors que dire ? Juste merci. Merci de ne pas avoir choisi d’être ailleurs à faire autre chose, parce que si vous n’étiez pas là, il est permis de douter que quelqu’un d’autre prendra votre place. Mais nous avons été trop loin. C’est l’inconvénient de la route, parfois, on s’égare. Revenons au début, à l’ouverture du salon.
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la vapeur
Le premier matin est paradoxal. Quelques passionnés attendent devant le salon qu’il ouvre ses portes, prêts à se ruer comme naguère les fans aux concerts de Johnny. C’est rigolo, d’ailleurs, puisqu’à deux pas se déroule, dans un autre hall, une grande exposition consacrée à feu monsieur Smet, plus connu sous le nom d’Hallyday.
Mais, en dehors de ces férus, c’est calme. Les arrivées vont se faire plus nombreuses au fur et à mesure que la matinée avance, permettant de constater que, décidément, le vapoteur n’est pas matinal. Ou alors, il est encore dans le train, l’avion, la voiture ou tout moyen de transport à sa convenance.
Dans le salon, force est de constater que la circulation reste fluide, même le dimanche, le jour qui a vu passer le plus grand nombre de visiteurs. Le hall est plus grand, les allées larges, et en trois jours, il n’y a qu’une fois où votre serviteur s’est retrouvé coincé par un petit bouchon humain. Un bouchon de plusieurs personnes, bien entendu, jamais, je ne me permettrais.
On circulait un peu moins vite dans le coin des modeurs. Parce que la foule y était dense, et l’attention sans cesse captée par quelques pièces d’orfèvrerie. Qui a dit que le high end était mort ? Certainement pas les clients qui, admirant un mod ou un atomiseur, se disaient que le coût en valait bien la chandelle.
Bien sûr, on y croisait des amis. Tasos Psychogyiopoulos et Dimitris Theodorou d’Atmizoo, que je ne pouvais pas ne pas citer, vapotant avec leurs atomiseurs toute l’année, Samuel Pesenti, qui laissait admirablement croire qu’il n’avait pas le trac pour la conférence à laquelle il allait participer (bravo, Sam, j’y ai presque cru) ou Phil Alves. Ah, Phil ! Qui met toutes ses tripes dans ses créations, et qui a l’air constamment de se demander : “Est-ce que ça va plaire ? Est-ce que j’en ai fait assez” ? Tu as eu un Award, l’ami, ça te va, comme réponse ?
Tout le monde n’avait pas pu faire le déplacement, c’est dommage. Mais on a eu une pensée pour eux.
Embarquement immédiat porte Québec
Les macérats, extraits de tabac naturel, NET et autres faisaient leur grand retour. Parmi eux, des Canadiens aussi sympathiques que leurs produits étaient agréables à vaper. Par rapport à ce qu’elle a pris en travers de la figure, l’industrie de la vape au Canada marche bien. Relativement s’entend, et pour certains.
L’associé de l’entreprise a aussi des vape shops au Québec. Très tôt, lorsqu’il s’est rapproché de la société, il a commencé à proposer des produits à base de tabac, séduisant autant ses clients historiques que des nouveaux. À tel point que, lorsque le flavor ban est arrivé, il n’a perdu “que” la moitié de ses clients. Pour d’autres, la chute a été si brutale que la seule solution a été la fermeture.
“J’avais déjà remplacé la moitié de mes produits par des liquides à base de tabac, explique-t-il. Ça me permet de tenir, et de continuer d’avoir des gens qui viennent chez moi arrêter de fumer.”
Le flavor ban serait-il une catastrophe en Europe ? Oui, bien entendu. Mais il ne signerait pas l’arrêt de mort de la vape. Il existe dans les liquides à base de tabac naturel une diversité et une qualité qui permettraient de continuer d’exister, de sortir des gens du tabac et de leur sauver la vie. C’est toujours ça de pris.
Le temps joue en notre faveur, c’est du moins la conviction profonde de votre serviteur. Mais, dans l’intervalle, des jours sombres nous attendent, flavor ban ou pas. Une chose est sûre : la raison est plus du côté de ceux qui louchent sur la plante de monsieur Nicot que chez les aficionados du sucralose. Nos cousins d’outre-Atlantique l’ont appris durement, parfois à leurs dépens.
Chez nous, les Italiens sont champions des macérats et des extraits de tabac naturel. La France va-t-elle se laisser distancer ? Le coq gaulois se rebiffe à cette simple idée, et quelques recettes goûtées chez des fabricants laissent augurer du meilleur.
Les extraits de tabac naturel sont très exigeants en termes de mode de consommation. Très à l’aise dans du MTL, à des puissances très basses, très subtils en goût, ils sont pour l’instant destinés à un marché de connaisseurs. Un peu comme les cigares pour les fumeurs ou certaines liqueurs rares dans le domaine des spiritueux. Des moments toujours suspendus, ritualisés, qu’il va falloir trouver un moyen, dans le pire des cas, de démocratiser.
Papy fait de la résistance
On croise plein de gens, au Vapexpo. Comme ce gars, là-bas, qui me fixe droit dans les yeux et me sourit alors que nous allons nous croiser, comme si nous nous connaissions. Poliment, je m’arrête à sa hauteur pour lui serrer la main. On serre beaucoup de mains, au Vapexpo, on s’y fait beaucoup la bise, aussi. C’est vrai qu’il ressemble à quelqu’un que je connais, mon ami Augustin, qui a travaillé dans le high end et faisait des vidéos sur YouTube. Je le lui dis, d’ailleurs, qu’il ressemble à Augustin Moritz.
“C’est parce que c’est moi”, répond-il, ternissant aussitôt mon humeur. Médiocre usurpateur ! Certes, l’imitation est bonne, mais Augustin avait une barbe noire et drue, tandis que lui a une barbe, certes drue, mais poivre et sel.
Pourtant, il me le confirme, c’est bien lui. Mon pauvre, mais que t’est-il arrivé ? Tandis que je lui jette un regard de commisération, voici que surgit Brice Lepoutre. Lui aussi, sa barbe a grisonné, ce doit être une sorte de virus. J’espère que je ne l’ai pas attrapé, je n’en sais rien, je n’ai pas de barbe. Augustin et moi lui demandons de ses nouvelles. “Ils m’ont mis avec les antiquités au musée”, explique Brice. Puis, devant nos regards franchement interloqués, il ajoute précipitamment : “Je veux dire : je suis conservateur.”
Le musée de la Vape. Curiosité pour les plus jeunes, claque pour les autres. C’est là que l’on se rend compte que, finalement, on n’a pas inventé grand-chose, mais qu’on a essentiellement amélioré les techniques. On y retrouve les vieux modèles qui nous faisaient rêver, comme l’Innokin 134, par exemple (Innokin, faites-en un remake !). Ici, un Stardust, là une eGo, le premier mod électronique, français, eh oui…
Nous évoquons des souvenirs. “Il y a même un modèle, un des tout premiers, il était jetable, tu avais une petite batterie, un petit réservoir, et quand c’était fini, poubelle.” Une vape jetable ! Quel gaspillage. Heureusement qu’on a fait des progrès, plus personne n’aurait une idée aussi saugrenue aujourd’hui, n’est-ce pas ? Nous échangeons un regard lourd de sens.
Brice Lepoutre, conservateur du musée de la Vape
Créateur du Grand Forum, défenseur infatigable de la vape dans les médias, on ne présente plus Brice Lepoutre, devenu le temps du Vapexpo conservateur du musée de la Vape. “Patrick Bédué m’a appelé pour me demander si je n’avais pas du vieux matériel, au début, et, de fil en aiguille, je lui ai proposé de m’occuper de l’exposition.” Cette dernière a été un franc succès. “J’ai été surpris de l’affluence et des retours enthousiastes. On avait des anciens, des jeunes, des responsables de boutiques qui venaient pour donner un cours à leurs jeunes vendeurs. Il y a eu jusqu’à 25 personnes en même temps, je ne savais plus où donner de la tête.”
L’occasion aussi de rappeler l’importance de la France dans la vape moderne : premier reconstructible, créé par Athea Mods dans des circonstances rocambolesques, premier tank, premier mod électro. Ce qui a, paraît-il, beaucoup agacé les Américains, qui ont dû s’incliner devant les dates de sortie, irréfutables…
Chassez le naturel, il revient dans le clearo
Le bio est partout. L’envie de naturel a gagné jusque dans les allées du Vapexpo, et c’est de circonstance, puisque c’est là également que se déroule le salon de l’agriculture. Pas en même temps, évidemment, quoique, ça ambiancerait un peu de lâcher un taureau sauvage dans les allées. Vous avez arrêté la clope, maintenant, reprenez le sport.
Première étape chez Tevap, Terroir & Vapeur. Nous en avions déjà parlé dans un précédent numéro, dans “Du côté des juice makers”, mais voir toute l’équipe, chaleureuse et conviviale, ça fait du bien. Ils sont occupés : les liquides sur base naturelle TeVap, et BordO2 qu’ils ont racheté et dont ils ont revisité la gamme, il y avait de quoi faire et de quoi se mettre les papilles en folie.
Enthousiasme, c’est aussi ce qui vient à l’esprit quand on songe à Vape Bio. Convaincu par son produit, passionné par son sujet, l’homme est plein d’énergie et de sourires. Et après test, on en repart convaincu : le bio, c’est bon.
Du côté de VDLV, des feuilles de tabac décorent les meubles, pour souligner que l’entreprise fabrique sa propre nicotine à partir de tabac français. L’authenticité va avec le naturel.
Le combat du chef
Bon, vous l’attendiez tous, bien entendu, c’était LA star du salon, l’invité de prestige, Norbert Tarayre, qu’on ne présente plus (en vrai, il a fait tellement de choses que la liste serait trop longue, allez citons Top Chef et voilà) venu pour le concours Vape Chef.
Le principe est simple : Norbert fait un gâteau, et dix mixologues ou équipes de mixologues doivent essayer de le reconstituer avec une sélection d’arômes imposés. Un jury goûte et note, et dans le jury, il y avait votre serviteur. Si vous voulez savoir qui a gagné, il y a un article dans le Vaping Post.
Vous savez, les célébrités ne sont pas toujours à l’écran comme dans la vie. Certains, avenants et souriants à l’écran, jouent en réalité un rôle, et s’avèrent être des personnages très désagréables une fois les caméras éteintes. Norbert, par exemple, ce n’est pas du tout le cas.
L’homme est sympathique et franc. Et surtout, il se dépense sans compter. Sur scène, il fait le show en vrai pro, en dehors, plus posé, il est toujours disponible pour ceux qui lui demandent un selfie ou veulent échanger un petit mot. Quant à la cuisine, c’est son métier, mais c’est aussi sa passion, et elle est communicative.
Les participants du concours et le public se sont bien amusés, et c’est l’essentiel. Parce que, honnêtement (c’était voulu et assumé), du point de vue de la recette, ils n’avaient aucune chance. Quand Norbert a expliqué à la fin ce qu’il avait préparé, il avait fait plus de cuisine rien que pour la crème au-dessus qu’un amateur moyen dans sa semaine.
Le gâteau était un bonheur. Le genre de choses qu’il faut absolument goûter si on se demande quelle est la différence entre un cuisinier amateur et un professionnel : on ne joue pas du tout dans la même catégorie.
D’ailleurs, Norbert a expliqué qu’il avait accepté l’invitation par curiosité, et qu’il s’attendait à tomber sur un petit salon obscur avec trois tables et deux chaises. Quand il est arrivé au Vapexpo, toujours selon lui, il en est resté bouche bée.
Surtout, lui-même vapoteur, il a raconté son parcours, et comment la vape lui a sauvé la vie, littéralement. Pour conclure sur un plaidoyer vibrant, expliquant que la mixologie est un univers incroyable, dont on n’a pas fait le tour du point de vue gustatif, au contraire : on n’en est qu’au début. Avec de la persévérance, de la technicité, de l’imagination et de l’audace, d’incroyables horizons de saveurs nous tendent les bras.
Rien de neuf, que du mieux
Niveau nouveautés, il faut chercher chez Fuu qui a présenté ses bases DIY innovantes baptisées Perfect Mix à Vapexpo. Quatre bases différentes qui permettent d’obtenir de meilleurs résultats : les saveurs sont plus prononcées, le goût amélioré mais pas transformé et en prime, le temps de step est divisé par deux. Plus éloquent que tout, les testeurs sur le stand, qui ont été largement convaincus.
Nouveauté matériel, l’Aegis Legend 3, avec son mode de verrouillage résolument nouveau. Fini les 3, 4 ou 5 clics, fini les boutons. Là, il vous suffit de prendre la box dans votre main, et un système de déblocage tactile fait le reste. Ça marche bien, ça impressionne, et, très vite, l’aspect pratique se démontre.
Et comment ne pas passer à côté de la Nexi One, petit pod à cartouches préremplies qui vient avec le PB, une base/chargeur nomade qui permet de le recharger quatre fois. Prix de l’Innovation au Vapexpo, si tout le travail est déjà fait, que me reste-t-il ?
On en parle, du Puremax ? On ne va pas se gêner. Le petit mod de SX Mini a fait grand bruit chez ceux qui l’ont essayé. Dispositif anti-dry hit, antifuites, mix technologique entre puissance et contrôle de température, il concentre en très peu de place un nombre important d’innovations qui en font d’emblée un classique.
Et sinon ? Les grands principes restent les mêmes : comment envoyer un signal électrique plus ou moins modulé à une résistance qui va chauffer une fibre contenant du liquide afin de produire de la vapeur. On semble avoir fait le tour du sujet, jusqu’à peut-être la prochaine révolution, mais ce n’est pour autant pas terminé. Parce que ces principes s’améliorent, et on voit le soin que les fabricants apportent à la recherche sur l’efficience, l’ergonomie, la sécurité… On fait du neuf avec du mieux, et c’est bien. Le musée de la vape est là pour nous rappeler que la progression a été immense, et que la marge de progression l’est sans doute encore.
Mon cœur te dit je t’aime, il ne vape que pour toi
Le rédac-chef m’adresse des signaux frénétiques, l’article est beaucoup trop long, il est temps de conclure. Pourtant, c’est dans le thème : le salon aussi était long, et pourtant, on n’avait pas envie que ça s’arrête.
J’aurais voulu vous parler de Guillaume Thomas du Vaporium, aux liquides aussi excellents que leurs noms sont improbables (et si vous n’avez pas lu leurs descriptions sur le kakemono à 50 ans, vous avez loupé votre vie), de Jean-Christian Haltel des Jus du Chat Perché, aux liquides aussi excellents que son univers, de Bertrand Baillot de Beurk Research, aux liquides aussi fous que lui, de La Fine Équipe, de Big Papa, de… Bref, vous aurez compris.
Comment partir sans saluer la Porsche chez Geekvape, qui démontre que l’automobile, c’est un art à part entière. Ou la Fiat 500 chez LPV, parce que l’automobile, c’est aussi un art de vivre.
Parler des conférences, également, toutes avec des intervenants de haut niveau. Mais nous n’en dirons pas plus, par manque d’objectivité, puisque nous avons participé à leur élaboration. Elles seront disponibles en vidéo grâce à la régie du Vapexpo.
Et comment conclure sans vous parler de la charmante jeune femme de Ladybug Juices dont le maquillage m’a laissé bouche bée.
N’oublions pas ceux dont on n’a pas parlé ici, faute de place, faute de temps. Trois jours est un temps trop court à passer parmi d’aussi excellentes personnes. Rendez-vous est pris l’an prochain, pour que vous nous fassiez à nouveau rêver.
Rendez-vous l’année prochaine !
- Vapexpo Paris 2025
- Du 22 au 24 mars 2025
- Paris Expo Porte de Versailles
- 1, place de la Porte de Versailles
- 75015 Paris
- https://vapexpo-france.com
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