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À la rencontre de Jean Moiroud, président de la FIVAPE

Mis à jour le 20/11/2023 à 22h35
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À l’occasion de la rentrée, Jean Moiroud, président de la Fivape, détaille pour le Vaping Post les actions de la fédération, ses projets, et réagit sur l’actualité récente de la vape. Application de la TPD, angoisse des boutiques, face à face avec les buralistes, France Vapotage, il n’élude aucun sujet.

Une parole rare et mesurée

Jean Moiroud le reconnaît, « la parole de la Fivape est rare parce que nous sommes très concentrés sur l’action, notamment auprès des élus et des institutions de santé. Nous sommes une équipe de terrain. Mais l’organisation interne se consolide et vise à favoriser cette communication. Il nous est aussi difficile d’aborder certaines actions politiques pour des raisons de confidentialité et de stratégie. Ces sujets sont au coeur de notre action ».

La parole de la Fivape est rare parce que la fédération est tournée vers l’action.

La parole de la Fivape est certes toujours attendue, la fédération ne parlant que rarement, et jamais pour ne rien dire. Représentant aujourd’hui 650 acteurs indépendants de la vape, elle est l’association professionnelle la plus représentative d’Europe et la plus écoutée des pouvoirs publics.

La trame de l’action de la Fivape est clairement établie avec des objectifs qui restent « les mêmes depuis le début » explique Jean Moiroud, qui entend « défendre les produits de la vape à travers ses acteurs professionnels, boutiques et fabricants ». « Cette année, notre action est principalement axée sur les boutiques de vape, physiques et en ligne, parce que c’est là que résident les plus grands besoins et les enjeux de l’indépendance de demain. »

Après avoir aidé les fabricants au passage de la TPD, la Fivape répond aux besoins des boutiques physiques et en ligne. 

Pour autant les fabricants ne sont pas en reste : « nous avons répondu aux besoins des fabricants de liquides, notamment au moment de la transposition de la TPD. Il y avait un travail d’information et de conseil à faire. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase de normalisation et de consolidation, après cette période très difficile qu’a été la transposition. »

La FIVAPE a en effet pris une part active tant dans l’élaboration des textes de lois lors de l’application de la Tobacco Products Directive européenne en France, que dans le conseil aux professionnels pour la mise à disposition de produits répondant aux nouvelles réglementations, en termes de communication, d’étiquetage et d’information, notamment.

Les boutiques en première ligne

Les besoins les plus importants, aujourd’hui, sont formulés par les boutiques, comme le souligne Jean Moiroud : « les boutiques spécialisées, qu’elles soient isolées, en réseau, ou en ligne, doivent être défendues avec courage et conviction, dans un contexte de développement de l’offre par les buralistes et de questionnements sur la nature de nos métiers. Nos boutiques vendent aujourd’hui un produit de consommation courante, et nous nous battons pour que ce statut ne change pas. Dans le cas inverse, la vape pourrait subir beaucoup plus de limitations : nous en avons un exemple effrayant avec ce qu’il s’est passé en Italie. »

Les boutiques spécialisées, physiques et en ligne, doivent être défendues avec courage et conviction. 

L’Italie est l’exemple même de ce que pourrait devenir la vape à l’échelle européenne si la TPD2, et notamment la taxation sur la vape, voyait le jour dans la forme suggérée par la Commission. Monopole et taxes ont eu un effet si désastreux qu’aujourd’hui, à contre-courant des projets européens, le gouvernement italien envisage de faire machine arrière.

La grande question est celle du secteur du tabac, industrie et buralistes, au centre des interrogations des membres de la Fivape : « soyons clairs, l’industrie du tabac fera, en tout cas aux yeux du grand public, la même chose que nous, c’est-à-dire vendre des produits du vapotage.  La question est : comment faire connaître et reconnaître notre différence ? » interroge le président de la fédération. « Autant, pour les professionnels du secteur, la frontière est très claire entre une boutique spécialisée et un bureau de tabac, autant pour les organes institutionnels et pour l’opinion publique, la différence est mince. Ce sont des questionnements qui créent de l’angoisse au sein de la profession. Nous voulons apporter des réponses claires, créer des relations et trouver des accords qui donneront confiance en l’avenir. Notre raison d’être, c’est que les professionnels indépendants de la vape puissent travailler correctement et sereinement au quotidien et soient récompensés des risques qu’ils ont pris sans soutien, juste à la force de leurs convictions. »

Une boutique spécialisée est et restera le meilleur endroit pour arrêter de fumer. 

« Une boutique spécialisée est et sera toujours le meilleur endroit pour arrêter de fumer » souligne Jean Moiroud. Il précise que « si, dans un bureau de tabac, un fumeur qui souhaite passer à la vape échoue, pour diverses raisons, il n’est pas perdu pour son buraliste : il suffira qu’il lui vende ses cigarettes, à nouveau. En revanche, dans une boutique de vape, un client qui échoue dans son passage est perdu ! Une boutique spécialisée aura tout intérêt à ce que le fumeur arrête, et mettra tous les moyens en œuvre pour cela, accompagnement, expertise de pointe, conseil et disponibilité. ».

A lire : Les boutiques de vape aident à arrêter de fumer, c’est prouvé !

Professionnel du vapotage, un métier

La spécialisation est un sujet fondamental pour la Fivape. « Éthiquement et qualitativement, nous défendrons toujours en premier lieu l’offre des boutiques spécialisées. Notre indépendance et notre expertise nous permettent aujourd’hui d’avoir le soutien des professionnels de la réduction des risques et, plus largement, celui des professionnels de santé. Ils nous adressent chaque jour plus de fumeurs pour que nous les aidions à quitter le tabac ! Tout cela n’existerait pas sans cette spécialisation. ».

Les emplois dans la vape, ce sont des professionnels qui mettent leurs compétences au service d’un objectif, l’arrêt du tabac. 

Et les moyens nécessaires sont effectivement investis par les professionnels, comme le fait remarquer Jean Moiroud « il y a environ 2700 boutiques spécialisées en France, ce qui représente approximativement 5400 emplois. N’oublions pas non plus le secteur du e-commerce, qui avec plus de 100 sites e-commerce permet aux français les plus isolés d’accéder une grande variété de produits. Ces emplois, ce sont des pros qui, tous les jours, mettent leurs compétences au service d’un seul objectif : que les gens arrêtent de fumer. C’est leur métier ! La Fivape est là pour les accompagner, pour défendre leur expertise et pour soutenir leurs efforts sur le terrain. Dans ce cadre, la Fédération met en place et ouvrira dans les tout prochains mois l’accès à des formations diplômantes, une première mondiale. Ce projet de longue haleine nous tient à coeur depuis de nombreuses années est enfin dans son ultime phase d’aboutissement. ».

A lire : Boutiques françaises : vers une stabilisation du marché

Les buralistes ne sont pas des ennemis naturels, ils ont aussi leurs difficultés. 

Ce souci de la spécialisation va au-delà du clivage idéologique, ce que Jean Moiroud explique très bien : « nous ne sommes plus dans la position d’il y a quelques années où le buraliste était “l’ennemi naturel”, de façon un peu abstraite. J’ai rencontré des buralistes, il y a des gens bien, ce sont des commerçants qui ont aussi des difficultés et qui ont leur commerce à faire tourner. Mais il faut faire la différence entre les individualités du terrain et l’instrumentalisation de la profession qui est souvent faite pour servir les intérêts de l’industrie du tabac. Nous ne voulons pas que la vape devienne juste un relais de croissance parmi tant d’autres. Pour nous, la vape, c’est bien plus que ça : c’est la fin du tabac. »

Que les buralistes se lancent dans la vape, c’est bien. Qu’ils n’aillent pas jusqu’au bout de leur démarche en arrêtant de vendre du tabac, c’est regrettable.

Il est clair que dans le grand projet de transformation des buralistes en “drugstores à la française”, la vape sera, chez les dépositaires de la carotte, un produit comme tant d’autres, entre l’épicerie et les jeux. Mais quelques buralistes, Jean Moiroud le souligne également, se lancent dans la vape avec un espace dédié, un salarié formé et un choix important. Le seul regret de la Fivape : “qu’ils n’aillent pas jusqu’au bout en arrêtant de vendre du tabac”.

A lire : Interview : Philippe Coy, président de la Confédération des buralistes

France Vapotage en questions

“France Vapotage est une organisation affairiste financée par l’industrie du tabac.” 

La FIVAPE est plus sceptique au sujet de France Vapotage, et Jean Moiroud ne s’en cache pas « L’arrivée de France Vapotage ne me surprend pas. Il s’est passé la même chose en Angleterre. C’est une organisation affairiste, financée par l’industrie du tabac, qui cherche à agréger des professionnels partageant sa vision dans un organisme d’affaires publiques. Ils souhaitent faire croire à tout le monde que nos discours convergent, mais nos finalités ne sont pas les mêmes. »

La fédération France Vapotage, association créée en juillet 2018 qui mêle des professionnels de la vape indépendante et des piliers de l’industrie du tabac, a en effet envoyé un courrier à plusieurs associations et fédérations de vapoteurs pour leur proposer de se rencontrer et de joindre leurs actions.

A lire : France Vapotage : interview de Vincent Durieux, Vice-président

“Nous devons rester indépendants de l’industrie du tabac, quoiqu’il en coûte”

Jean Moiroud explique pourquoi la Fivape ne saisira pas la main tendue de France Vapotage : « Nous devons rester indépendants de l’industrie du tabac, quoi qu’il en coûte. Pour deux raisons. La première est morale : nous ne cautionnons pas l’hypocrisie des géants du secteur. Leurs parts de marché sont en baisse sur le tabac à combustion dans les pays développés, ils adaptent donc leur offre face à cette tendance inéluctable. Mais dans le même temps, ils cherchent à augmenter leurs parts de marché dans les pays en voie de développement, avec les mêmes produits et les mêmes méthodes que chez nous il y a quelques décennies. Dans les pays d’Afrique et d’Asie, des campagnes de publicité infâmes pour des cigarettes à destination des jeunes affichent des slogans comme “fumer attire les filles’’… Comment voulez-vous qu’on croie une minute à leur volonté d’agir en faveur de la santé publique à l’échelle globale ? »

« La seconde raison de notre réserve est politique : notre indépendance est la clef du dialogue engagé avec le gouvernement. La Ministre de la santé refuse de discuter avec l’industrie du tabac. Nous portons, au moins dans les faits, une mission de santé publique, nous ne voulons pas nous fermer cette porte. »

“La Fivape sera peut-être considérée comme le méchant qui a refusé la main tendue, mais nos objectifs porteurs d’une conviction forte passent avant tout”

Était-ce difficile de refuser la main tendue de France Vapotage ? « Comme dans tout exercice fédéral, c’est souvent plus facile d’accepter et de prêter instinctivement de bonnes intentions à l’autre, parce que c’est plus simple que de refuser. Mais ce n’est pas le rôle de la Fivape » affirme son président, qui explique que « pour défendre, il faut faire des choix : nos attributions ne sont pas compatibles. Nous serons peut-être présentés comme les « méchants », dans l’histoire, à refuser la main tendue, mais il faut bien comprendre que nos objectifs sont porteurs d’une conviction forte et que la défense d’une filière indépendante, de ses emplois, de ses valeurs et de son énergie, passe avant tout ».

On a pu dire ici et là que certains professionnels du vapotage avaient justement rejoint France Vapotage parce qu’on leur avait refusé l’accès à la Fivape ? « Les conditions d’accès à la Fivape ont toujours été les mêmes, ouvertes à toutes les entreprises de vape indépendantes du secteur du tabac. La seule contrainte est qu’elles ne vendent pas de produits à fumer, qu’elle ne réalisent pas la majeure partie de leur CA avec des entreprises affiliées au tabac et qu’elles ne soient pas constituées de fonds issus de cette industrie. C’est le seul filtre insurpassable, celui qui atteste de notre indépendance. Et notre association n’a jamais accueilli autant d’adhérents que ces 6 derniers mois. C’est une chance mais aussi une responsabilité dont nous sommes conscients. Cette confiance de nos adhérents, c’est une reconnaissance qui nous porte et nous donne de l’énergie pour défendre nos métiers et les produits de la vape. »

La Fivape est plus forte que jamais, et toujours tournée vers l’action. 

La Fédération Interprofessionnelle de la Vape, menée par les huit membres bénévoles de son Conseil d’administration, soutenus par un cabinet juridique et un cabinet d’affaires publiques et épaulés par quatre salariés, est donc plus forte que jamais, et plus que jamais dans l’action.

Et si les combats à mener sont toujours nombreux et que les affrontements s’annoncent rugueux, les indépendants continuent à faire face.

Le site de la Fivape : www.fivape.org

Droit de réponse de Vincent Durieux, Vice-Président de la Fédération France Vapotage.

Nous avons pris connaissance de l’interview de M. Jean Moiroud, Président de la FIVAPE. Injustement mis en cause, nous demandons le droit de réponse suivant : 

Nous regrettons sincèrement le rejet de notre proposition de dialogue, ainsi que l’emploi de certains termes inutilement blessants et polémiques, qui nous l’espérons dépassent la pensée de leur auteur.  

La création de la fédération France Vapotage est le moyen pour des fabricants de se rassembler, de soutenir la filière et d’assurer sa représentation auprès des pouvoirs publics. La plupart de nos membres n’étaient pas adhérents des autres associations . Nous accueillons et accueillerons des entreprises aux profils très variés : des start-up, des pure players, et effectivement des industriels dont l’activité principale est jusqu’ici le tabac. Ces groupes qui s’inscrivent aujourd’hui dans une transformation majeure. Il est evident que cela prendra du temps, mais dans un souci de santé publique, et dans l’intérêt de tous, entreprises et consommateurs, il est souhaitable de travailler ensemble et non pas les uns contre les autres.  

Notre seul et unique objectif est le développement du vapotage en France. Nous combattons la confusion entre vapotage et tabac et défendons au contraire le vapotage comme instrument de sortie du tabagisme.  

Notre main reste tendue. Nous refusons d’entrer dans une concurrence entre associations qui au final porterait préjudice à la vape. Nous appelons au dialogue et au rassemblement pour défendre les causes qui nous sont communes. Il en va du développement économique de notre secteur, mais aussi de sa capacité à relever les défis de demain, en particulier en matière d’information des consommateurs, de protection des mineurs, de sécurité et de qualité des produits.