Le plan de l’Europe pour lutter contre le cancer a été dévoilé ce 3 février. Et, sur le chapitre du tabagisme comme celui de la vape, il hésite entre utopie, manque d’ambition et délire pur. Pour l’Europe, lutter contre le cancer, c’est tuer la vape.
Un objectif à très long terme
Le plan de lutte contre le cancer en Europe, édition 2021, vient d’être dévoilé. Et le moins qu’on puisse en dire, sur le chapitre du tabagisme, c’est que la spécialité oncologie a encore de beaux jours devant elle dans les facultés de médecine.
C’est un plan général, qui n’a pas vocation à être appliqué tel quel, mais fixe des directions à suivre sur certains sujets aussi variés que le tabagisme, l’alimentation ou l’environnement. Un document de référence, donc, pour savoir ce que la Commission européenne pense et désire pour les cinq prochaines années.
Le plan couvre un vaste panel de sujets. Accroître la détection précoce du cancer pour mieux le soigner, mobiliser le potentiel de recherche sur le traitement et la prévention, réduire l’exposition aux produits toxiques et radiations à risque, améliorer la vie des malades après leur rémission.
Cette phrase, néanmoins, dans l’introduction, laisse perplexe : « Le plan de lutte contre le cancer marque le début d’une nouvelle ère dans la prévention et le traitement du cancer […] ».
Pourtant, de prime abord, c’est ce que font déjà à la fois les politiques publiques et les organismes de recherche scientifique, publics et privés, depuis quarante ans. Avec succès : même si le cancer reste un fléau, les avancées sont réelles, et nombre de cancers qui étaient annonciateurs d’une mort certaine il y a un demi-siècle ont aujourd’hui un taux de survie et de rémission significatif.
En quoi est-ce une « nouvelle ère », la commission ne le précise pas. Sur bien des points, il a de quoi inquiéter, et, sur la lutte contre le tabagisme, il a même de quoi terrifier.
La lutte contre le tabac selon l’Europe
Le premier point que l’on constate, c’est que la référence choisie pour la lutte antitabac par la Commission européenne est l’OMS. Et ce n’est pas une bonne nouvelle.
La Commission vise à une « Europe sans Tabac », ce qui peut sembler un objectif louable. Mais, dans le détail, une « Europe Sans Tabac », c’est 5 % de fumeurs en 2040 selon les fonctionnaires de Bruxelles.
On observera tout d’abord que 5 % de fumeurs, ce n’est pas une « Europe sans tabac ». Selon les projections démographiques qui prédisent 500 millions d’habitants en 2040 en Europe, ça fait 25 millions de fumeurs, dont la moitié mourront du tabac.
Dans un second temps, 2040, c’est dans 19 ans. Et si l’on se base sur les chiffres de l’OMS que la Commission aime tant, 19 ans de tabagisme en Europe, ce sont 13 millions de morts. C’est plus que la population belge.
Pour cela, la stratégie de la Commission est simple : viser les jeunes et essayer de les empêcher de commencer à fumer. Une idée apparue ici et là, et qui semble faire son bonhomme de chemin. Si elle est présentée avec des circonvolutions langagières, on peut la résumer ainsi : tant pis pour ceux qui fument, on les laisse mourir, cap sur la génération suivante.
Outre tout ce que l’on pourra trouver à redire sur le plan humain, il suffit de surcroît de passer devant un lycée ou un collègue à l’heure de la sortie pour constater que ce plan a déjà échoué.
La baisse de prévalence tabagique que l’on pourrait, éventuellement, constater en Europe ne serait alors pas due aux fumeurs qui arrêtent, mais aux fumeurs qui meurent.
Mais l’Europe, malgré les apparences, ne compte pas abandonner les fumeurs à leur destin. Elle a l’arme ultime, « l’un des instruments les plus efficaces pour lutter contre le tabagisme », et cette solution miracle, c’est : la taxe.
Il faudra, selon la Commission « réexaminer […] le cadre juridique sur les achats transfrontaliers de tabac par des particuliers ». Ce que tentent de faire des pays comme la France depuis un demi-siècle. En vain tant les pays concernés freinent des quatre fers, et il n’y a aucune raison pour que cela change, vœu pieu de la Commission ou pas.
Et c’est à ce moment, page 9, que le plan se rappelle de l’existence de la vape. Et il y a de quoi le regretter.
Il faut tuer la vape
Pour la Commission européenne, la vape et le tabac fumé, c’est la même chose. C’est ce qu’il ressort de la partie consacrée au vapotage. La Commission semble vouloir s’occuper du vapotage, et ne manque pas d’idées.
Pour faire court, l’idéal, selon les fonctionnaires de Bruxelles, est de taxer la vape et le tabac de façon identique, d’imposer les emballages neutres, d’interdire toute publicité, et d’interdire les arômes.
Il a souvent été spéculé sur les arômes que la Commission pourrait vouloir interdire, la réponse figure dans le rapport, en toutes lettres, page 9 : tous. Pour la Commission européenne, un bon e-liquide, c’est du propylène glycol, de la glycérine végétale, de la nicotine, le tout dans un emballage neutre et taxé le plus possible.
Dès lors, sachant que la vape est l’outil de sevrage tabagique le plus efficace pour arrêter de fumer, vu ce que la Commission lui réserve, on comprend qu’elle ne planifie pas ensuite de victoire décisive sur le tabac avant 20 ans.
En d’autres termes, la Commission européenne va tuer 13 millions d’Européens, et détruire une filière économique dynamique et pleine d’avenir tandis qu’une crise économique terrible s’annonce en conséquence du Covid.
Certes, ce plan contre le cancer n’est pas applicable tel quel, c’est un document de référence, mais c’est celui sur lequel vont se baser les prochaines décisions concrètes, dont la révision de la TPD qui sera discutée en fin d’année. Laquelle TPD est explicitement citée dans le plan comme un moyen d’arriver à ses fins.
Dogmatique, sourd et aveugle, ce plan n’est rien d’autre, dans le domaine de la réduction des risques liés au tabagisme, que la chronique d’une catastrophe annoncée.
Source : Europe’s Beating Cancer Plan