En seulement quelques semaines, les fumeurs qui passent à la cigarette électronique ou au tabac chauffé amélioreraient leur VO2max, indicateur clé de la capacité respiratoire, selon une étude italienne.
Un test simple pour mesurer les effets de l’arrêt du tabac
Les méfaits du tabagisme sur la santé sont nombreux. Parmi eux se trouve la diminution de la capacité respiratoire. Cette dernière s’explique de plusieurs manières. D’abord, le monoxyde de carbone (CO), contenu dans la fumée de cigarette, a une affinité 200 fois supérieure à celle de l’oxygène pour les globules rouges. Le CO se fixe donc facilement aux globules rouges, et réduit ainsi l’espace pour l’oxygène, jusqu’à 20 %. Autrement dit, les globules rouges se retrouvent à transporter 80 % d’oxygène et 20 % de monoxyde de carbone, au lieu de 100 % d’oxygène. En abîmant les parois des artères, le tabagisme réduit aussi leur capacité à se dilater durant l’effort, compliquant encore la circulation de l’oxygène. Un manque d’oxygène qui force le cœur à battre plus rapidement pour compenser, mais, manquant lui aussi d’oxygène, l’efficacité de son travail s’en retrouve diminuée. Un véritable cercle vicieux.
Si les bénéfices pour la santé du sevrage tabagique sont aujourd’hui bien documentés, les informations concernant l’arrêt du tabac grâce à la cigarette électronique ou au tabac chauffé continuent de manquer. En mai 2025, une équipe de chercheurs italiens a publié les résultats d’une recherche1 destinée à étudier les effets du sevrage tabagique grâce au vaporisateur personnel ou à l’IQOS, sur la santé respiratoire. Pour ce faire, les scientifiques ont utilisé les données d’un précédent travail (CEASEFIRE2) sur l’efficacité de ces produits pour arrêter de fumer.
Pour cette recherche, les auteurs se sont intéressés à la capacité aérobie maximale, ou VO2max. Il s’agit de la consommation maximale d’oxygène lors d’un exercice d’intensité croissante jusqu’à épuisement. La VO2max est l’indicateur de référence de la capacité aérobie, c’est-à-dire l’efficacité des systèmes respiratoire, cardiovasculaire et métabolique, dans le transport et l’utilisation de l’oxygène.
Lors de l’étude CEASEFIRE, 220 participants ont été suivis afin d’étudier leur comportement tabagique. Au cours de cette recherche, 187 d’entre eux se sont rendus à différentes visites de suivi, dont celles des semaines 4 et 12 durant lesquelles leur capacité respiratoire a été mesurée. Lors de ces visites, les participants devaient monter et descendre d’une marche de gymnase à un rythme régulier, mais croissant. Le métronome qui leur indiquait le rythme à suivre commençait à 15 pas/minute, puis progressait de 5 pas supplémentaires toutes les 2 minutes. Le rythme augmentait ainsi jusqu’à 35 pas/minute. À chaque étape, la fréquence cardiaque des participants était mesurée.
Pour estimer la capacité respiratoire (VO2max) des patients, les chercheurs utilisaient un logiciel dans lequel ils entraient la fréquence cardiaque du participant à chaque palier d’intensité, son âge, son poids, et l’intensité de l’exercice (nombre de pas par minute). Ce test, baptisé Chester Step Test (CST), s’appuie sur la relation linéaire qui existe entre la fréquence cardiaque et l’intensité de l’exercice3. Comme l’expliquent les auteurs de l’étude, cette méthode « peut ne pas être aussi précise que les mesures directes de la V̇O2max obtenues lors d’un test d’effort cardiopulmonaire standard », mais elle présente l’avantage d’être simple à mettre en œuvre et ne nécessite pas d’appareillage complexe. À titre d’information, l’étude de référence3 qui a mesuré la précision de ce test par rapport à de véritables mesures de la VO2max à l’aide d’un métabolomètre ou d’un pneumotachomètre a rapporté une margeur d’erreur comprise entre 5 et 15 %.
Des améliorations notables chez les vapoteurs et utilisateurs d’IQOS
Parmi les 187 participants, 67 avaient complètement fait la transition du tabagisme au vapotage ou au tabac chauffé, 88 avaient réduit leur consommation de cigarettes (d’au moins 75 %), et 32 n’avaient pas modifié leur habitude tabagique.
Pour les fumeurs étant passés du tabagisme au vapotage ou au tabac chauffé, les gains de VO2max étaient de 2,4 à 2,7 ml/kg/min, aux semaines 4 et 12. Soit une amélioration de 6 à 7 % par rapport aux mesures initiales, avant leur remplacement des cigarettes au vaporisateur personnel ou à l’IQOS.
Pour les fumeurs ayant réduit le nombre de cigarettes consommées, ces gains étaient de 1,3 à 1,9 ml/kg/min, soit de 3 à 5 %.
Pour les fumeurs ayant continué de fumer, il n’y avait aucun gain.
À titre de comparaison, un entraînement sportif peut améliorer la VO2max de 5 à 20 %4,5,6, dépendant du niveau initial, lorsque le vieillissement entraîne sa diminution d’environ 1 % par an après 30 ans7.
Aucune différence significative n’a été remarquée entre l’utilisation d’une cigarette électronique ou d’un IQOS.
Les auteurs concluent : « Cette analyse a posteriori suggère des améliorations précoces et significatives de la capacité d’exercice chez les fumeurs en bonne santé qui ont cessé de fumer en passant à l’utilisation exclusive de cigarettes électroniques ou de tabac chauffé. »
Soulignons toutefois que cette étude présente deux limites majeures : les gains de VO2max observés (2,4-2,7 ml/kg/min) sont comparables à la marge d’erreur du test (±3,9 ml/kg/min), et sont inférieurs au seuil de détection fiable de ce test (≥3,8 ml/kg/min). Des limites qui n’invalident pas les résultats de cette recherche, mais qui invitent à les traiter avec prudence.
Il convient de noter que plusieurs auteurs de cette étude ont des liens documentés avec l’industrie du tabac : certains sont affiliés au CoEHAR ou à ECLAT (structures financées par la Foundation for a Smoke-Free World, elle-même soutenue par Philip Morris International), et l’ensemble de l’équipe utilise des données issues de l’essai CEASEFIRE initialement financé par Philip Morris Products S.A. Ces liens multiples avec l’industrie du tabac constituent des conflits d’intérêts majeurs qui doivent aussi être pris en compte dans l’interprétation des résultats.
Sources et références
1 Spicuzza, L., Pennisi, F., Caci, G., Cibella, F., Campagna, D., Adebisi, Y. A., Saitta, C., George, J., Geraci, G., & Polosa, R. (2025). Improved aerobic capacity in a randomized controlled trial of noncombustible nicotine and tobacco products. Scientific Reports, 15, 19104. https://doi.org/10.1038/s41598-025-03904-w.
2 Caponnetto, P., Campagna, D., Maglia, M., Benfatto, F., Emma, R., Caruso, M., Caci, G., Busà, B., Pennisi, A., Ceracchi, M., Migliore, M., & Signorelli, M. (2023). Comparing the Effectiveness, Tolerability, and Acceptability of Heated Tobacco Products and Refillable Electronic Cigarettes for Cigarette Substitution (CEASEFIRE): Randomized Controlled Trial. JMIR public health and surveillance, 9, e42628. https://doi.org/10.2196/42628.
3 Sykes, K., & Roberts, A. (2004). The Chester step test—a simple yet effective tool for the prediction of aerobic capacity. Physiotherapy, 90(4), 183-188. https://doi.org/10.1016/j.physio.2004.03.008.
4 Bacon, A. P., Carter, R. E., Ogle, E. A., & Joyner, M. J. (2013). VO2max trainability and high intensity interval training in humans: A meta-analysis. PLoS One, 8(9), e73182. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0073182.
5 Milanović, Z., Sporiš, G., & Weston, M. (2015). Effectiveness of high-intensity interval training (HIT) and continuous endurance training for VO2max improvements: A systematic review and meta-analysis of controlled trials. Sports Medicine, 45(10), 1469-1481. https://doi.org/10.1007/s40279-015-0365-0.
6 Wen, D., Utesch, T., Wu, J., Robertson, S., Liu, J., Hu, G., & Chen, H. (2019). Effects of different protocols of high intensity interval training for VO2max improvements in adults: A meta-analysis of randomised controlled trials. Journal of Science and Medicine in Sport, 22(8), 941-947. https://doi.org/10.1016/j.jsams.2019.01.013.
7 Hawkins, S., & Wiswell, R. (2003). Rate and mechanism of maximal oxygen consumption decline with aging: Implications for exercise training. Sports Medicine, 33(12), 877-888. https://doi.org/10.2165/00007256-200333120-00002.
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