La cigarette électronique en Belgique
La Belgique face au défi du tabagisme
La Belgique connaît une évolution encourageante dans sa lutte contre le tabagisme. Selon les données les plus récentes de l’Enquête de santé 2023-2024, le pays compte désormais 12,8% de fumeurs quotidiens parmi la population de 15 ans et plus, marquant une diminution significative par rapport aux 15,4% enregistrés en 2018 et aux 25,5% de 1997. Cette tendance à la baisse témoigne de l’efficacité progressive des politiques de santé publique mises en œuvre depuis le milieu des années 2000.
Au total, 17,6% des Belges sont fumeurs (quotidiens et occasionnels confondus), tandis que 82,4% de la population est non-fumeuse. Le pays affiche ainsi des résultats supérieurs à la moyenne de l’Union européenne, se positionnant parmi les États membres les plus performants en matière de réduction du tabagisme.
Des disparités régionales et démographiques marquées
Les statistiques révèlent toutefois d’importantes disparités entre les trois régions du pays. La Wallonie présente le taux de fumeurs quotidiens le plus élevé avec 16,1%, suivie de Bruxelles avec 15% et de la Flandre avec 11,2%. Ces différences s’expliquent notamment par des facteurs socio-économiques, le tabagisme restant plus répandu dans les milieux défavorisés.
Les hommes demeurent plus nombreux à fumer que les femmes, avec respectivement 14,9% et 10,7% de fumeurs quotidiens. Néanmoins, l’écart tend à se réduire progressivement. La baisse la plus spectaculaire concerne les jeunes de 15 à 24 ans, dont le taux de fumeurs quotidiens est passé de 23,4% en 2004 à seulement 7,7% en 2023-2024.
Une stratégie ambitieuse pour une génération sans tabac
Face à ce fléau de santé publique responsable de plus de 14 000 décès annuels dans le pays, la Belgique a adopté en 2022 une Stratégie interfédérale 2022-2028 pour une génération sans tabac. Cette initiative ambitieuse vise à réduire la proportion de fumeurs quotidiens à 10% d’ici 2028 et à 5% d’ici 2040, avec un objectif intermédiaire de 9,2% pour 2030.
Cette stratégie s’inscrit dans le cadre de la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l’Organisation mondiale de la Santé, ratifiée par la Belgique en 2006. Elle englobe des mesures de prévention, de protection contre le tabagisme passif, d’augmentation de la fiscalité et de renforcement de l’aide au sevrage tabagique.
La cigarette électronique en Belgique : entre outil de sevrage et encadrement strict
Un cadre réglementaire en constante évolution
La Belgique a progressivement renforcé son encadrement des produits de vapotage. Depuis janvier 2024, les e-liquides sont soumis à un droit d’accise de 0,15 euro par millilitre, s’appliquant à tous les liquides destinés aux cigarettes électroniques, qu’ils contiennent ou non de la nicotine. Cette taxation concerne également les produits utilisés pour le DIY (bases, arômes, boosters).
L’année 2025 a marqué un tournant majeur avec plusieurs mesures restrictives. Depuis le 1er janvier, les cigarettes électroniques jetables (puffs) sont totalement interdites à la vente, faisant de la Belgique l’un des premiers États membres de l’Union européenne à adopter une telle interdiction. Cette mesure vise principalement à protéger les jeunes, particulièrement attirés par ces produits aux couleurs vives et aux goûts sucrés.
Depuis le 1er avril 2025, une nouvelle réglementation impose l’invisibilité des produits du tabac et du vapotage dans tous les commerces. Les cigarettes électroniques et leurs e-liquides ne peuvent plus être exposés de manière visible, ni à l’intérieur ni à l’extérieur des points de vente. Par ailleurs, la vente de ces produits dans les magasins alimentaires de plus de 400 mètres carrés est désormais interdite.
La Belgique interdit également la vente en ligne de cigarettes électroniques et de produits de vapotage contenant de la nicotine, une restriction qui ne s’applique pas dans tous les pays européens voisins.
Un outil de sevrage reconnu mais controversé
Malgré cet encadrement strict, la position belge sur la cigarette électronique comme outil de sevrage tabagique demeure nuancée. Des études menées en Flandre ont démontré que les utilisateurs de cigarettes électroniques affichaient des taux d’arrêt du tabac similaires, voire supérieurs, à ceux utilisant les substituts nicotiniques classiques ou les médicaments de sevrage.
Une recherche menée à l’Université de Louvain a révélé que 38% des participants ayant utilisé une cigarette électronique avaient réussi à arrêter de fumer après plusieurs mois, un taux encourageant pour des fumeurs qui n’avaient initialement pas l’intention d’arrêter. Le Conseil supérieur de la santé belge reconnaît d’ailleurs que la cigarette électronique est moins nocive que les cigarettes classiques et peut être envisagée comme une aide au sevrage tabagique.
Tabacstop et la Fondation contre le Cancer, organisations de référence en matière de lutte antitabac, ne s’opposent pas au vapotage lorsqu’il est utilisé dans le cadre d’un sevrage tabagique chez les adultes. Toutefois, ces organismes insistent sur le fait que le vapotage ne doit pas être considéré comme anodin et que l’objectif reste l’arrêt complet de toute consommation de nicotine.
Une perception publique préoccupante
Selon l’Enquête sur le tabagisme 2021 de la Fondation contre le Cancer, près de 10% des Belges vapotent, dont 3% quotidiennement. Ils le font principalement pour arrêter de fumer ou diminuer leur consommation de tabac. Cependant, les données montrent que 75,5% des vapoteurs continuent de fumer du tabac combustible en parallèle, ce qui limite considérablement les bénéfices potentiels du passage au vapotage.
Un sondage réalisé en 2021 révélait qu’environ sept Belges sur dix considèrent que le vapotage est aussi nocif que le tabagisme, une perception qui contraste avec le consensus scientifique international établissant que la cigarette électronique est significativement moins nocive que la cigarette traditionnelle. Cette méconnaissance des risques relatifs constitue un frein potentiel à l’utilisation de la cigarette électronique comme outil de sevrage.
Les défis de l’aide au sevrage tabagique
Bien que 62% des fumeurs belges déclarent avoir l’intention d’arrêter de fumer, seuls 21% envisagent de le faire dans les six prochains mois. Parmi ceux qui ont tenté d’arrêter, 68% l’ont fait sans aide, 14% ont utilisé des substituts nicotiniques, 11% des cigarettes électroniques avec nicotine et 7% des cigarettes électroniques sans nicotine.
La Belgique ne propose actuellement qu’un remboursement limité des thérapies de substitution nicotinique par l’assurance maladie obligatoire, bien que certaines mutualités offrent des aides financières complémentaires. La Stratégie interfédérale 2022-2028 prévoit une amélioration du remboursement des aides au sevrage pour renforcer les chances de réussite à long terme.
Le service Tabacstop, soutenu par les autorités et la Fondation contre le Cancer, propose un accompagnement gratuit par téléphone au 0800 111 00, ainsi qu’un coaching personnalisé avec des tabacologues, une application mobile et des groupes de soutien en ligne.
Vers l’avenir : entre espoirs et incertitudes
Les résultats encourageants obtenus ces dernières années, notamment la baisse spectaculaire du tabagisme chez les jeunes, témoignent de l’efficacité des politiques menées. La Belgique se rapproche progressivement de l’objectif fixé par l’OMS dans le cadre du Plan d’Action Mondial contre les maladies non transmissibles, qui vise une réduction de 30% de la prévalence du tabagisme par rapport au niveau de 2010.
Néanmoins, des défis persistent. L’augmentation du tabagisme féminin, les fortes inégalités sociales en matière de consommation de tabac et la nécessité de renforcer l’accompagnement des fumeurs vers l’arrêt constituent autant de priorités pour les années à venir. L’évolution de la réglementation sur la cigarette électronique devra également trouver un équilibre délicat entre la protection des jeunes et le maintien de l’accès à cet outil pour les fumeurs adultes en démarche de sevrage.
Sources et références
- Sciensano – Enquête de santé 2023-2024 – Consommation de tabac
- indicators.be – Fumeurs (i23)
- Stratégie interfédérale 2022-2028 pour une génération sans tabac – Cellule Générale de Politique Drogues
- SPF Santé publique – Réglementation spécifique aux cigarettes électroniques *(ou page générale tabac Belgique)*
- SPF Finances – Liquides cigarettes électroniques
- La Libre Belgique – Le nombre de fumeurs en baisse en Belgique (janvier 2023)
- Medipedia – Les Belges et le tabac : quelques chiffres
- Test-Achats – Vapoter pour arrêter de fumer
- Fondation contre le Cancer – Enquête Tabac 2021 et 2022
- Aide aux Fumeurs – Passé, présent et futur du tabac en Belgique







