Dans les prochaines heures, la Food & Drug Administration (FDA) devrait officiellement prononcer une interdiction des e-liquides sucrés sur tout le territoire américain. Pourtant, de nouvelles études semblent (encore) démontrer que les arguments avancés par l’organisme de santé afin de justifier ces futures restrictions, sont faux.
Le vapotage des jeunes, moins grave que ce qu’imagine la FDA ?
Ce qu’il faut retenir :
Trois récentes recherches remettent en cause les principaux arguments avancés par la FDA afin de justifier la future interdiction des e-liquides aux arômes sucrés (autres que tabac et menthol).
- Moins de 6 % des jeunes vapoteraient quotidiennement aux USA, un chiffre bien loin de ce que l’organisme appelle régulièrement « épidémie de vapotage »,
- Une étude soulève le fait que ces jeunes fumeraient probablement s’ils ne vapotaient pas,
- Deux recherches démontrent à nouveau l’absence d’effet passerelle. Au contraire, les jeunes fumeraient moins depuis qu’ils vapotent.
Samedi dernier, nous vous prévenions que la FDA pourrait annoncer dès cette fin de semaine, une interdiction de tous les e-liquides aux Etats-Unis, sauf ceux ayant pour arômes le tabac ou le menthol. Il faut dire que le vapotage pose problème à l’organisme depuis longtemps déjà. En effet, dès le 25 décembre 2017, nous apprenions que la Food & Drug Administration réfléchissait à une nouvelle législation concernant les e-liquides sucrés, car ils étaient déjà à l’époque accusés « d’attirer les jeunes » et de les rendre « plus susceptibles de passer au tabac par la suite ». Des arguments demeurés inchangés depuis lors.
Si depuis cette époque, de nombreux experts et autres études ont d’ores et déjà démontré une absence, et de l’effet passerelle, et d’une « épidémie de vapotage des jeunes », une nouvelle recherche [1] publiée récemment dans le Journal of the American Medical Association vient contester une nouvelle fois les arguments de l’organisation de santé américaine.
En effet, selon l’article publié il y a quelques jours, s’il est vrai que 4,1 millions d’adolescents seraient actuellement utilisateurs d’un vaporisateur personnel aux USA, ils ne seraient « que » 1,4 million à l’utiliser tous les jours, soit moins de 6 % de tous les étudiants du pays. Un chiffre que les auteurs de l’étude qualifient de « phénomène important », mais bien loin de « toute une génération de jeunes qui sont dépendants de ces produits », comme pouvait par exemple le prétendre Scott Gottlieb, ex-commissaire de la FDA, qui qualifiait d’ailleurs ce fait de « tragédie de santé publique ».
Et si la vape n’existait pas ?
Mais qui sont ces jeunes utilisateurs d’une cigarette électronique ? Et que feraient-ils s’ils ne vapotaient pas ?
C’est la question qui s’est posée une autre étude [2], dont les résultats ont été rapportés dans la revue médicale en ligne Qeios.
Après avoir analysé les derniers chiffres de la National Youth Tobacco Survey (NYTS), les chercheurs ont mis en lumière le fait qu’en 2017, seulement 0,1 % des jeunes vapoteurs n’avaient jamais fumé avant. Un chiffre qui a légèrement grimpé en 2018 puisqu’il est alors passé à 1 %. Et bien qu’il puisse encore augmenter cette année puisque le nombre de jeunes vapoteurs a encore croît en 2019 par rapport à l’année précédente (+ 3,6 %), les chercheurs affirment que la situation devrait rester similaire et que l’usage quotidien d’un vaporisateur personnel restera concentré parmi les adolescents qui ont déjà fumé auparavant.
Vapoteur conduit-il vraiment à fumer ?
Et l’effet passerelle dans tout ça ?
Une fois de plus, par le biais de cette nouvelle recherche, l’effet passerelle est très largement remis en doute. Les auteurs de l’étude Qeios notent ainsi que « s’il se peut bien que dans certains cas, l’essai initial d’une e-cigarette ait conduit à l’essai et à la consommation de cigarettes, les données suggèrent fortement que ce n’est pas la tendance dominante observée au niveau de l’ensemble de la population ». Ils expliquent ainsi que d’après leur recherche, « pour la grande majorité de ceux qui avaient des antécédents importants de tabagisme, la cigarette était le premier produit du tabac essayé, avant l’utilisation des e-cigarettes ».
Des résultats partagés par une troisième étude [3] parue cette semaine dans la revue Nicotine & Tobacco Research, qui met en lumière le fait qu’après « avoir tenu compte de la propension à utiliser les e-cigarettes en fonction de 14 facteurs de risque, l’utilisation des e-cigarettes ne semble pas être associée au tabagisme actuel et continu ».
En fait, selon les chercheurs, « la relation apparente entre l’usage de la cigarette électronique et le tabagisme conventionnel actuel s’explique entièrement par des facteurs de risque communs, ce qui ne permet pas de soutenir les allégations selon lesquelles les cigarettes électroniques ont un effet causal sur le tabagisme conventionnel concomitant chez les jeunes ».
En d’autres termes, si la vape n’existait pas, les jeunes se seraient très probablement tournés vers des produits combustibles.
Et si ce n’était pas encore assez, toujours selon les données de la NYTS, cette année, le nombre de jeunes qui ont déclaré vapoter a augmenté, mais le nombre de jeunes qui ont déclaré fumer, a diminué.
Vraiment impossible pour la FDA d’y voir un lien de cause à effet ?
Source : Reason
[1] Cullen KA, Gentzke AS, Sawdey MD, et al. e-Cigarette Use Among Youth in the United States, 2019. JAMA. Published online November 05, 2019. doi:10.1001/jama.2019.18387
[2] Robert West, Jamie Brown, Martin Jarvis. (2019). Epidemic of youth nicotine addiction? What does the National Youth Tobacco Survey reveal about high school e-cigarette use in the USA? (Preprint). Qeios. doi:10.32388/745076.3.
[3] Sooyong Kim, Arielle S Selya, The Relationship Between Electronic Cigarette Use and Conventional Cigarette Smoking Is Largely Attributable to Shared Risk Factors, Nicotine & Tobacco Research, , ntz157, https://doi.org/10.1093/ntr/ntz157