La protection des enfants est essentielle, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) y contribue à travers de nombreux programmes et notamment la lutte contre le tabagisme. Dans un rapport consacré aux États de la région Europe, l’OMS envisage le chemin vers une génération sans fumée. Il inclue des cadres réglementaires universels, engagements des États et outils que ses membres « devraient » utiliser pour protéger leurs enfants de ce fléau.
Une Europe sans fumée en partant de San Francisco, forcément c’est plus long
La rédaction du rapport (pdf) a été confiée à Yvette Van Eijk chercheuse au Center for Tobacco Control Research and Education de l’Université de Californie, San Francisco (UCSF). Stanton Glantz, anti-vape notoire, est co-directeur du centre de recherche sur les questions du tabac de l’UCSF et le mentor de l’auteure.
Traitant de la question du tabagisme des plus jeunes dans la zone européenne de l’OMS (1), le document reconnaît d’emblée que certains États de la région sont en passe de devenir des “pays sans tabac”, c’est à dire des pays où la prévalence tabagique est de 5 % ou moins. Hélas, l’auteure n’en dira pas davantage sur ces pays, ils ne sont pas nommés pourtant leur expérience pourrait inspirer les autres.
Les lecteurs pourront aussi s’étonner que la directive tabac européenne ne soit pas citée une seule fois. Elle doit pourtant obligatoirement être mise en oeuvre par 27 pays de la zone concernée par le rapport et inclut des réponses aux questions soulevées dans le document.
L’enquête de l’OMS auprès des jeunes de la zone Europe
L’âge d’initiation à la cigarette varie d’un pays de la zone Europe à l’autre. On retiendra néanmoins de l’enquête 2013/2014 (2) que 17 % des jeunes interrogés avaient commencé à fumer avant l’âge de 13 ans or le degré de dépendance dépend en partie de l’âge auquel le fumeur a commencé.
Expérimenter la cigarette avant 15 ans augmenterait de 50% le risque de dépendance, encore accru par la consommation répétée de cigarettes sur une période prolongée.
Les auteurs du rapport expliquent que des symptômes de dépendance peuvent apparaître chez les jeunes quelques jours ou quelques semaines seulement après avoir fumé la première cigarette, avant même qu’ils ne s’installent dans un tabagisme quotidien.
Selon les estimations, trois enfants sur quatre qui fument à l’adolescence continueront de fumer quotidiennement à l’âge adulte bien que la plupart d’entre eux expriment l’intention d’arrêter de fumer dans un avenir proche.
Les adolescents sous-estiment la dépendance à la cigarette
Les rédacteurs précisent encore que selon les sondages la plupart des adolescents pensent qu’ils arrêteront de fumer d’ici un an alors qu’en réalité un tiers seulement d’entre eux se défera de la cigarette dans cet horizon.
Cigarette électronique : passerelle, renormalisation et formaldéhyde
A l’image des positions de l’UCSF et notamment de celles de Stanton Glantz, mentor de l’auteure, le rapport avance une argumentation partiale loin de refléter les connaissances et les débats entre experts de la scène internationale.
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Le vapotage est pour les rédacteurs du rapport une source d’inquiétude. Contre toute la littérature scientifique disponible, ils affirment que « la vape est potentiellement nocive, car certains produits contiennent des substances chimiques toxiques comme l’acroléine et le formaldéhyde à un niveau similaire à celui des cigarettes. »
Si aucun scientifique n’affirme aujourd’hui que la vape est une pratique sans aucun risque, il existe néanmoins un consensus : vapoter est moins dangereux que fumer. L’agence de santé anglaise après avoir compilé près de 200 études estime que le risque pris en vapotant est de 95% inférieur à celui de fumer. Des chercheurs néo-zélandais ont récemment conforté les chiffres avancés par Public Health England.
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Le vapotage des jeunes dans la zone européenne serait selon les rédacteurs du rapport encouragé par le marketing en ligne. La diversité des arômes, des formes et des motifs « plaisent aux enfants » et de nombreux dispositifs ne ressemblent pas à des cigarettes, « mais à des articles de tous les jours comme les stylos ».
Cette argumentation contre le vapotage est régulièrement développée aux Etats-Unis, elle rencontre cependant peu d’écho en France ou au Royaume-Uni, les deux pays européens où le vapotage est le plus développé. La directive tabac européenne, que l’auteure semble ignorer, proscrit en effet les communications commerciales en ligne.
L’organisation mondiale de la santé, à l’instar de nombre d’autorités de santé et de sociétés savantes est préoccupée par la renormalisation de la cigarette et d’un effet passerelle vers le tabagisme. Les données de terrain sont pourtant rassurantes. Elles révèlent dans un nombre croissant de pays que généralement lorsque la vape progresse, le tabagisme des jeunes recule, y compris aux États-Unis. L’organisation craint maintenant qu’elle ne « provoque et renforce la dépendance par la nicotine, ce qui peut entraîner l’utilisation soutenue de la vape à l’âge adulte ou un passage ultérieur au tabagisme ».
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En conclusion, les auteurs appellent les pays de la région européenne à donner une plus grande attention questions émergentes et notamment assurer une meilleure protection des enfants contre l’utilisation et la commercialisation des cigarettes électroniques.
Réduction des risques : raccourci vers la génération sans fumée ?
Absentes du rapport de Yvette van der Eijk, la Suède et l’Angleterre sont pourtant les deux pays de la zone Europe les plus avancés sur le chemin d’une génération sans fumée. Ils ont en commun d’offrir à leurs habitants des produits de réduction des risques.
Le SNUS, un produit culturel et historique, a contribué au déclin du tabagisme en Suède, elle affiche une prévalence de 5% chez les hommes.
L’Angleterre mène une politique volontariste et promeut l’approche de réduction des risques auprès des fumeurs. Les chiffres du tabagisme y déclinent plus vite que prévu, les autorités de santé entrevoient la première génération sans fumée, elle a annoncé de nouveaux objectifs pour 2022 et le plan d’action associé au mois de juillet.
(1) Pays de la zone Europe de l’OMS appartenant à l’Union Européenne : Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, Finlande, France, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie, Slovénie, Suède.
Pays de la zone Europe de l’OMS hors de l’Union Européenne : Albanie, Andorre, Arménie, Azerbaïdjan, Bélarus, Bosnie-Herzégovine, Ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Finlande, Géorgie, Islande, Israël, Kazakhstan, Kirghizistan, Monaco, Monténégro, Norvège, Ouzbékistan, République de Moldova, Saint-Marin, Serbie, Suisse, Tadjikistan, Turkménistan, Turquie, Ukraine
(2) Health policy for children and adolescents, no. 7 – Health behaviour in school-aged children (hbsc) study : international report from the 2013/2014 survey (pdf)