Être végan, c’est avoir à résoudre les mêmes problèmes que tout le monde avec un panel de solutions plus réduit et plus exigeant. Notamment le tabagisme : si le tabac végan existe, et est aussi nocif, qu’en est-il de la vape ? Peut-on être végan aujourd’hui et vapoter en respectant ses convictions ? Réponses.
Sommaire :
Qu’est-ce qu’un végan ?
Il faut reconnaître que le mouvement végan, si il fait parler, n’est pas très bien connu du grand public. Posez la question autour de vous, et vous obtiendrez des réponses qui s’approchent de la réalité sans toutefois être complètes, ou exactes. La confusion la plus fréquente, c’est de confondre véganisme et végétalisme. Le plus simple est de reposer quelques définitions.
Le végétarien ne mange pas de chair animale. Viandes et poissons sont donc exclus de son alimentation, mais il peut consommer des produits d’origine animale, lait, miel, et les œufs (même si certains s’y refusent).
Le végétalien ne mange aucun produit d’origine animale, que ce soit d’animaux morts (viande, chair de poisson, mollusques…) que vivants (lait, miel, œufs…). Mais végétalien ne veut pas dire végan.
Le végan (forme francisée et utilisée au masculin comme au féminin de l’anglais vegan) est aussi appelé végétalien intégral. Son mode de vie exclut la consommation de tout produit issu des animaux ou de leur exploitation. Ceci recouvre tous les aspects de l’existence, de l’alimentation à l’habillement, en passant par les cosmétiques ou les loisirs.
Ceci inclut l’exploitation directe ou indirecte. Ainsi, même si un produit ne contient aucune trace de substance d’origine animale, le simple fait qu’il ait été testé sur un animal (par exemple un cosmétique) l’exclut de la liste. Posséder un animal domestique n’est pas non plus végan.
Être végan ne veut pas forcément dire être antispéciste : être antispéciste n’est qu’une des raisons pour adopter le mode de vie végan, mais il peut y en avoir, d’autres, à commencer par la défense du droit des animaux.
Dernier point, mais pas des moindres : le végan n’est pas une sorte de fou furieux qui a toujours un briquet dans sa poche pour incendier une boucherie et déambule dans la rue couvert de sang pour choquer, contrairement à l’image qui est donnée d’eux dans la presse (et qui est due à une minorité extrémiste, comme il y en a partout).
Au cours de la réalisation de ce dossier, nous avons échangé avec beaucoup de végans, qui se sont montrés, ouverts, sympathiques, désireux d’expliquer leurs choix plus par désir de se faire comprendre que de convaincre. Aucun d’entre eux ne nous a demandé ce que nous mangions ni n’a essayé de nous convertir. Qu’ils soient ici remerciés de l’aide qu’ils nous ont apportée, toujours avec plaisir.
Véganisme et tabagisme
La première chose à laquelle va devoir renoncer un végan, c’est la facilité. Dans tous les domaines, nourriture, habillement, cosmétiques, et même la santé.
C’est tout le paradoxe : même un médicament végétalien a été testé sur des animaux avant d’être commercialisé, et ceci l’exclut directement de la philosophie végane. Si les petites affections quotidiennes peuvent être traitées avec des médecines dites “douces” (le fameux adage “un rhume non soigné disparaît en 7 jours alors qu’un rhume bien soigné guérit en 7 jours”), une pathologie lourde nécessitant des soins médicaux pose au végan un vrai cas de conscience.
En revanche, pour s’empoisonner, pas de problème ! Les cigarettes véganes existent. Oui, il est possible de fumer végan. Et il y a du choix : pas moins de 9 marques sont certifiées véganes. Pas les plus connues, et nous ne les citeront pas ici, mais elles sont très faciles à trouver.
Le sevrage, par contre, est plus compliqué. Précisément pour les raisons évoquées au-dessus : l’expérimentation animale dans les laboratoires interdit l’accès des produits pharmaceutiques aux végans.
Reste la vape. Système de sevrage à risques réduits, la grande variété d’e-liquides disponibles et les normes de tests n’imposant pas d’expérimentation animale pour obtenir l’autorisation de mise sur le marché (AMM) devraient pouvoir permettre de proposer une offre végane. Est-ce déjà le cas ? Si oui, quelles garanties ? Et qu’attendre exactement de ces produits ?
Mais c’est quoi, un e-liquide végan ?
Pour commencer, il convient de se demander ce qu’est un e-liquide végan. À quelles normes doit-il se soumettre, qu’est-ce que les consommateurs sont en droit d’attendre ?
Nous avons d’abord posé la question à l’association Vegan Impact. Alexandra Blanc, sa fondatrice et présidente, s’est montrée à la fois réceptive et surprise par la question. “Les personnes qui ont adopté un mode de vie végan n’ont pas de problématique différente vis à vis du tabac”, explique-t-elle. Avant de poursuivre, “nombre d’entre eux souhaitent arrêter de fumer et la vape semble être une alternative intéressante. Pour qu’un e-liquide soit considéré comme vegan, il faut qu’à aucun moment, un produit animal ne soit utilisé dans sa composition ou son processus de fabrication”.
Alexandra nous oriente vers Expertise Végane Europe (EVE), plus connu sous le label EVE VEGAN, un organisme de contrôle et labellisation, qui s’occupe justement de garantir les produits végans. Hélène Modrzejewski, présidente d’EVE, accueille notre question avec autant d’intérêt.
Elle détaille pour nous les éléments qui seraient exigibles d’un e-liquide pour qu’il soit certifié végan. “Il faut qu’il n’y ait pas de produits d’origine animale dans sa conception” explique-telle “dans les ingrédients, bien entendu, mais aussi dans ce qu’on appelle les agents techniques de fabrication, c’est à dire des produits qui n’entrent pas directement dans le liquide fini, mais qui sont utilisés durant le processus de fabrication. Enfin, évidemment, aucun test ne doit être réalisé sur un animal.”
Quelle législation s’applique ? “Aucune, souligne Hélène Modrzejewski, il y a un vide juridique. Pour schématiser, nous sommes dans la même situation que le bio il y a 20 ans. Le label vegan est défendu et garanti par des associations, qui ne disposent pas, pour l’instant, d’un pouvoir d’ester en justice, par exemple. Il y a pour l’instant une mauvaise définition de ce qu’est un produit végan.”
Dès lors, comment avoir une garantie sérieuse ? “Des organismes existent. Il y en a plusieurs dans le monde et leur réputation est géographique. En Europe, il y a V-Label, Vegan Society, et nous, EVE.” Ce qui veut dire qu’il y a des organismes moins sérieux ? “Il y a différents niveaux d’exigence, disons. Prenez par exemple PETA, qui est sans doute l’association la plus connue, il suffit d’envoyer un dossier et un chèque pour avoir son label.”
Que doit faire une entreprise qui souhaiterait voir un produit certifié végan par EVE ou un autre organisme réputé, par exemple ? “Tout d’abord, il y a la constitution d’un dossier très précis. Ensuite, des audits, qui sont réguliers. La certification est acquise pour une durée déterminée et doit être renouvelée.” . Le dossier et les éléments constitutifs sont d’ailleurs téléchargeables sur le site de l’association (Cf les liens en bas de l’article).
Mais une entreprise est-elle obligée d’être entièrement végane ? “Pas du tout, rassure Hélène Modrzejewski, la certification se fait au produit. Une entreprise peut fabriquer des produits végans et non végans, si les normes sont respectées, il n’y a pas l’obligation que la totalité de l’activité de l’entreprise soit certifiée végane.”
Le véganisme dans la fabrication d’un e-liquide, l’éclairage de VDLV
Chez VDLV, le sujet du véganisme est étudié de près. Jacques Cinquin, responsable Qualité, a accepté de répondre à nos questions.
Tout d’abord, est-ce que, aujourd’hui, vape et véganisme représentent un sujet réel, ou est-ce que c’est anecdotique ?
“Ce n’est certainement pas anecdotique. Sur les réseaux sociaux par exemple, c’est une question récurrente. Nous proposons également sur notre site internet une rubrique FAQ sur de nombreux sujets liés à la vape. Une page est consacrée à cette question, c’est l’une des plus consultées par nos internautes. Notre standard téléphonique pour le SAV et l’information consommateur répond en moyenne à une question par semaine sur ce sujet. Très souvent des personnes nous demandent si nos liquides sont végans, ou quel liquide choisir pour une consommation végane.”
Et par quels moyens pouvez-vous le certifier ?
“Pour chaque arôme que nous utilisons, nous avons un descriptif technique très précis qui se trouve notamment dans les FT (fiches techniques) de ces produits. La plupart font maintenant apparaître la qualité hallal ou casher du liquide, et de plus en plus on voit apparaître la mention végane. Si l’information n’est pas disponible, nous déconseillons alors la consommation de ce produit aux personnes véganes.”
Mais en quoi un arôme ne pourrait-il pas être végane ?
“Même si le produit en lui-même ne contient pas de substances animales, elles ont pu être utilisées pendant le processus d’extraction de l’arôme notamment pour les arômes naturels. Par exemple, certaines méthodes d’extraction pour des arômes floraux comme la violette ou la fleur d’oranger impliquent l’utilisation de couches graisseuses pour fixer l’arômes sur un support. C’est la technique de l’enfleurage, bien connue des parfumeurs. La qualité végane de l’arôme dépend alors aussi du fait que ces graisses soient ou non d’origine animale”.
Et que les composants des e-liquides ne soient pas non plus testés sur les animaux. Une question plus complexe qu’il ne paraît.
“Pour ce qui est des arômes, ou des e-liquides finis, il n’y a pas à notre connaissance de tests en laboratoires sur les animaux. Dans le cas du propylène glycol, de la glycérine végétale ou de la nicotine, ce sont des produits qui sont connus depuis des dizaines d’années, bien avant l’invention du vapotage. Ces produits ont notamment été utilisés par les industries pharmaceutique, cosmétique ou encore agroalimentaire. Il est donc probable qu’à l’époque de leur mise sur le marché, ils ont fait l’objet de tests sur des êtres vivants. Pour la nicotine, on en est sûr, puisqu’il y a un seuil de létalité qui a été défini, ce qui implique une expérimentation humaine et animale. Mais ça remonte à plusieurs décennies. La recherche scientifique dans ce domaine remonte à très loin puisque l’on sait par exemple que dès 1880, des expériences ont été menées afin d’étudier les effets de la nicotine sur l’Homme.”
En tout cas, PG, VG et nicotine ne recourent pas à des constituants animaux
“Le PG et la VG sont issus de l’industrie chimique et pétrolière. Quant à la nicotine, il n’y a pas de raisons d’employer des produits animaliers. En tout cas, chez VDLV, nous en sommes certains, puisque nous fabriquons notre propre nicotine. Nous avons le contrôle de toute la chaîne, de la sélection de la graine de tabac, à la mise en culture en champs jusqu’à l’extraction de la nicotine pure.”
Un dernier mot sur l’expérimentation animale. Des études sont menées sur la vape par des laboratoires indépendants, et certaines impliquent des expériences sur des animaux ou des cellules animales. Néanmoins, ces études sont le fait de chercheurs et n’entrent pas en ligne de compte pour la fabrication et la commercialisation des e-liquides.
Avant Garde E Liquid, un fabricant végan
La marque anglaise Avant Garde E Liquid (AVG) annonce la couleur en gros sur ses très jolis flacons : un logo indique qu’ils sont végans. Nous avons voulu en savoir plus et avons interviewé Violet, qui travaille chez AVG et a aimablement répondu à nos questions.
Les liquides d’Avant Garde sont étiquetés “Vegan”, ce qui signifie qu’ils sont compatibles avec le végétalien. Pourquoi avez-vous commencé ce processus ? S’agit-il d’une initiative, êtes-vous au courant du sujet ou y avait-il une demande des consommateurs ?
“Les fondateurs d’Avant Garde sont végétaliens, c’était l’une des principales raisons pour lesquelles ils ont commencé Avant Garde. Ils recherchaient pour leur consommation des liquides de qualité, mais ils ne trouvaient que des liquides décevants avec le label végan.”
Qu’est-ce que cela signifie concrètement, un e-liquide végétalien ? Extraction, fabrication ?
“Cela signifie que tous les composants de l’e-liquide sont végétaliens, c’est-à-dire qu’ils ne contiennent aucun produit animal, ni aucun dérivé animal.”
Quelles garanties pouvez-vous donner au consommateur que le produit est vraiment végétalien ?
“Tous nos produits sont testés par un laboratoire britannique conformément à la TPD. Sur demande, nous sommes à votre disposition pour vous fournir les rapports correspondants. Nous pouvons certifier à nos clients qu’aucun de nos e-liquides ne contient d’ingrédient animal.”
A votre avis, le mode de vie végan restera-t-il un marché limité ou un marché qui va se développer dans les années à venir ?
“Tout le monde est maintenant plus conscient de ce qu’ils mettent dans leur corps et ils veulent mener un style de vie propre et éthique. Avec l’expansion rapide de l’industrie végétalienne au Royaume-Uni, nous sommes confiants dans le fait que l’industrie de la vape végane va suivre vite.”
Conclusion
Être végan, c’est avant tout renoncer aux solutions de facilité au nom de conviction fortes.
Et si le mouvement végan apporte des solutions sur différentes problématiques de la vie quotidienne, des problèmes restent encore à résoudre. Le sevrage tabagique en est un, et la vape peut être la solution la plus efficace.
Moyen de sevrage à risques réduits dont l’efficacité est démontrée, l’e-cigarette a aussi l’avantage de bénéficier d’une législation suffisamment contraignante pour offrir des garanties au consommateur sans se voir imposer un certain nombre de tests incluant l’expérimentation animale. La taille relativement modeste des entreprises, comparées aux géants agro-industriels, leur offrent plus de souplesse et de capacité d’adaptation.
Les solutions existent, et même si elles ne sont pas aisées à mettre en œuvre, elles ne sont pas insurmontables. Le marché végan est une réalité, et si personne ne peut prédire quelle sera son étendue, on peut certifier qu’il est solide : les difficultés rencontrées pour se conformer à cette philosophie sont suffisamment élevées pour tenir à l’écart les dilettantes et les effets de mode, ne gardant que celles et ceux qui ont des convictions profondes.
La balle est donc dans le camp des fabricants d’e-liquides aujourd’hui. Charge à eux de proposer une offre crédible et qualitative, pour que la vape soit accessible au plus de fumeurs possibles.
FAQ
Nous avons souhaité répondre ici à toutes les questions que vous pourriez vous poser sur la cigarette électronique et le véganisme. Néanmoins, il est très probable que cette F.A.Q ne soit pas exhaustive. N’hésitez pas à nous transmettre vos questions, pour que nous puissions les intégrer ici, de telle manière que les réponses profitent à tous.
- Qu’est-ce qu’un e-liquide végan ? C’est un produit à vapoter qui ne contient aucun ingrédient d’origine animale et pour la fabrication duquel aucun produit d’origine animale n’a été utilisé.
- Quelles garanties peut-on avoir que l’e-liquide certifié végane l’est réellement ? En l’état actuel de la législation, aucune. Le label végan n’a pas d’existence officielle et aucune poursuite ne peut être intentée à une marque qui s’arrogerait à tort une certification. Certains organismes de confiance peuvent néanmoins, sur la base du volontariat du fabricant, certifier un produit après en avoir examiné les composants et procédés de fabrication.
- La vape végane offre-t-elle la même efficacité que la vape “classique” ? Il n’y a aucune différence d’efficacité entre les deux. Les composants susceptibles de contenir des produits d’origine animale, et donc à surveiller, sont les arômes. Le liquide de base et la nicotine n’ont aucun lien, à aucun stade de leur fabrication, avec les produits animaux (voir plus bas).
- Des essais sont-ils pratiqués sur les animaux en vape ? Non. Pour fabriquer un liquide, ou pour obtenir son autorisation de mise sur le marché, un e-liquide n’a aucun besoin d’être testé sur un animal. Des tests sur des animaux peuvent être réalisés par des chercheurs qui étudient la vape, mais leur objet est distinct et ils sont fait sans le consentement des fabricants de e-liquides, qui ne sauraient être tenus pour responsables de l’usage fait de leurs produits.
- Qu’en est-il du PG, de la VG et de la nicotine ? Le propylène glycol (PG), la glycérine végétale (VG) et la nicotine sont des produits qui existaient et étaient utilisés bien avant l’invention de la vape. Aucun produit d’origine animal ne les compose ni n’est impliqué dans le processus de fabrication. En revanche, on sait que la nicotine a fait l’objet de tests sur les animaux, dans les années 1880-1890, et que la vape a bénéficié, à son corps défendant, des résultats de ces tests. Il est important de noter que les cigarettiers végans en ont eux aussi profité. Chacun peut ensuite décider s’il existe un délai de prescription, considérant que l’époque et les problématiques n’étaient pas les même.
Liste d’e-liquides végans (certifiés ou non)
Nous invitons les fabricants disposant d’une offre végane à nous en informer afin que nous puissions mettre cette liste à jour régulièrement. Merci de préciser si vous disposez ou non de la reconnaissance d’un label.
Chez Vincent dans les Vapes : tous les liquides peuvent être vapotés par les végans, sauf “La Violette” et “La Fleur d’Oranger” de chez Vincent dans les Vapes, ainsi que le “Cassis frais” de la gamme Authentic CirKus. Aucun liquide n’est certifié, à cette heure, par un label végan.
Chez Avant Garde E liquid : toute la gamme AVG porte la mention Vegan. Le fabricant assure que l’ensemble de ses produits est vegan friendly. La marque ne dispose pas d’un label Vegan.
Remerciements
L’auteur remercie tout particulièrement pour leur aide :
Alexandra Blanc de Vegan Impact : veganimpact.com
Hélène Modrzejewski de EVE France : certification-vegan.org
Aurélie Lefevre et Jacques Cinquin de VDLV : www.vdlv.fr
Violet, Mark et l’équipe d’Avant Garde E liquid : avantgarde-eliquid.com
Ainsi que toutes celles et tous ceux qui ont répondu à nos questions sur les groupes et forums.