Vous êtes ici : Vaping Post » Tabagisme » Big Tobacco : un futur sans fumée, mais des pratiques inchangées

Big Tobacco : un futur sans fumée, mais des pratiques inchangées

    Annonce
  • Calumette
  • le petit vapoteur
  • Pulp
  • Vaporesso
  • Innokin
  • Vincent
  • Voopoo

Philip Morris International et British American Tobacco promettent un avenir sans tabac ni fumée. Leurs sites regorgent de slogans et d’histoires de transformation. Mais derrière la façade, les faits rappellent une réalité tenace : leurs profits reposent toujours sur le commerce du tabac, y compris sous ses formes les plus contestées.

Un double discours soigneusement orchestré

Les cigarettiers British American Tobacco (BAT) et Philip Morris International (PMI) ont un point commun. Outre le fait qu’ils occupent tout deux une place sur le podium des plus grands fabricants de cigarettes, ils ont aussi, chacun, fondé une entité de lutte contre le tabagisme.

En 2017, PMI a financé la création de la Foundation for a Smoke-Free World (FSFW) (depuis rebaptisée Global Action to End Smoking), dont l’objectif serait de « s’engager à améliorer la santé mondiale en réduisant les décès et les maladies causés par le tabagisme, avec la mission caritative d’éliminer le tabagisme chez cette génération. »

De son côté, BAT a lancé Omni™ il y a tout juste un an. Un outil présenté comme « une initiative mondiale majeure visant à faire d’un monde sans fumée une réalité. »

La création de ces deux entités s’inscrit dans une tendance globale que l’on peut désormais observer chez plusieurs membres de Big Tobacco : celle de transitionner de leur activité d’origine, la vente de cigarettes, vers la vente de produits « sans fumée ». Entendez par là, tous les produits sans combustion contenant de la nicotine. Vaporisateurs personnels, sachets de nicotine, tabac chauffé, etc.

Capture d’écran du site officiel de Philip Morris International : 29 septembre 2025

Dans cette optique, Philip Morris n’hésite pas à relayer le tabagisme dans d’obscurs sous-menus de son site internet. La page d’accueil étant entièrement dédiée à sa transformation. Aujourd’hui, par exemple, les contenus mis en avant racontent tous la même histoire : ses progrès vers un futur sans fumée, sa transformation « définitive », dix ans de prétendus succès, et même l’idée d’un avenir sans tabac.

Même le PDG de l’entreprise communique à grands coups de phrases chocs comme : « Notre mission est claire : réduire le tabagisme en remplaçant les cigarettes par des alternatives moins nocives. Les cigarettes ont leur place dans les musées. »

La situation est assez similaire du côté de British American Tobacco. Le site met en avant des promesses de « monde sans fumée », des stratégies pour pousser les fumeurs vers des alternatives moins nocives et des déclarations sur la recherche scientifique censée accélérer la transition.

Kingsley Wheaton, directeur général de BAT, déclarait d’ailleurs, au lancement d’Omni™, que la réalité d’un monde sans fumée nécessitera davantage de dialogue et de solutions à l’échelle de la société, et se disait prêt à « diriger ce dialogue et à en faire partie », en concluant qu’il s’agissait d’une mission « trop importante pour ne pas l’entreprendre. »

D’un côté comme de l’autre, le message semble clair : le tabac c’est tabou, on en viendra à tous à bout. Et ceux qui le produisent sont prêts à nous y aider.

Capture d’écran du site officiel de British American Tobacco. 29 septembre 2025

Pourtant, dès qu’on gratte la surface des beaux discours, les enquêtes et affaires récentes racontent une tout autre histoire.

En 2021, par exemple, soit quatre ans après la création de la FSFW, une enquête de l’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), regroupement de journalistes d’enquête, révélait que PMI entretenait des liens étroits avec Apollinaire Compaoré, qui était son représentant au Burkina Faso. Un homme identifié comme contrebandier par l’ONU, notamment accusé de trafic de cigarettes, du financement de différents groupes armés, mais aussi d’entretenir des relations commerciales avec Chérif Ould Abidine, accusé de trafic de drogues à travers le Sahel et d’être lié à certaines organisations terroristes satellites d’Al-Qaïda.

En août 2023, grâce à un habile montage financier et plusieurs partenariats opaques, PMI a également acquis une participation majoritaire dans deux entreprises : United et Eastern, les seules sociétés autorisées à produire des cigarettes en Égypte, lui assurant une place confortable au sein du marché local.

Chez BAT, en 2024, le cigarettier faisait pression sur le gouvernement pakistanais pour obtenir l’autorisation d’exporter des kiddie packs vers le Soudan. Les kiddie packs, ou « paquets enfant », sont de petits paquets de dix cigarettes, depuis longtemps interdits dans la majorité des pays du monde pour leur propension à plaire aux jeunes et favoriser le tabagisme chez eux.

Des actions dont les objectifs semblent bien éloignés de ceux que les deux cigarettiers affichent avec Omni™ ou la Foundation for a Smoke-Free World.

Il y a quelques jours, Philip Morris International et British American Tobacco ont notifié le Bundeskartellamt, l’autorité fédérale allemande de la concurrence, de la création d’une coentreprise dont l’objectif sera de permettre à BAT de produire des cigarettes de tabac dans les usines de PMI en Pologne et au Portugal, et à PMI d’en fabriquer dans les installations de BAT en Pologne et en Croatie. « Alors que nous faisons de grands progrès vers notre objectif d’un avenir sans fumée, nous examinons continuellement des moyens d’optimiser notre paysage de production. », a expliqué Philip Morris.

Les commentaires sont fermés.