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Un livre, une vape : “Avalanche Hôtel” de Niko Tackian (interview)

Mis à jour le 20/11/2023 à 22h34
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Niko Tackian est une voix majeure du polar français. Scénariste de la série Alex Hugo pour France 2, il écrit aussi des livres à succès, parmi lesquels la série mettant en scène Tomar Khan. Le dernier en date, “Avalanche Hôtel”, vient de sortir. L’auteur a répondu aux questions du Vaping Post à cette occasion. 

Niko Tackian (crédit photo : Stéphane Bouquet)

Le Vaping Post (VP) : Niko Tackian, merci de répondre aux questions du Vaping Post.
Vous venez de publier chez Calmann Levy « Avalanche Hôtel », un thriller one shot, alors, pour évacuer la question que se posent les fans angoissés, Tomar Khan reviendra dans un prochain livre ?

Niko Tackian (NT) : ABSOLUMENT. D’ailleurs, il est avec moi depuis septembre et pour encore presque six mois. Nous construisons ensemble sa troisième enquête et il est prévu qu’il continue à apparaitre au rythme d’un roman tous les deux ans. Tomar est tenace et ne lâche pas le morceau comme ça.

VP : Dans la première question, nous avons parlé de one shot. Je me demande si ce n’est pas un peu abusif… Tout en étant très différent, et sans déflorer l’intrigue, « Avalanche Hôtel » partage bon nombre de thèmes en commun avec « Quelque part avant l’enfer » et « La nuit n’est jamais complète ». Pourrait-on parler d’une « trilogie de la mémoire » ?

NT : C’est très joliment trouvé et formulé. Effectivement, la mémoire est un de mes thèmes de prédilection et touche énormément de secteurs de notre vie puisque c’est grâce à elle que nous nous construisons. Nous sommes fait de mémoire et d’oubli, et c’est ce laps de temps dans lequel nous sommes conscient de nos actions que nous appelons le présent. Mais le passé nous échappe comme des grains de sables coulant entres nos doigts, nous sommes incapables de le retenir car notre cerveau doit oublier pour laisser de nouveau souvenir s’inscrire. Ce n’est qu’un des aspects de la mémoire et je dois bien avouer que ça me fascine depuis toujours. Est-ce parce que je suis d’origine arménienne et que la « mémoire » du génocide est au cœur des préoccupations de mes ancêtres ? Sans doute un peu…

VP : D’ailleurs, vos livres, et « Avalanche Hôtel » ne fait pas exception à la règle, s’aventurent tous à la lisière du fantastique sans jamais franchir le pas, du moins ouvertement. C’est ce qui vous plaît, l’ambiance fantastique plutôt que le fantastique en lui-même ?

NT : Totalement. J’adore le fantastique, je suis un fan de Lovecraft, Poe, King et bien d’autres… mais j’ai décidé de rester de l’autre côté de la lisière du réel. Mon univers se situe souvent dans la zone grise, le no man’s land entre le réel et le fantastique… mais je finis toujours par résoudre mes récits dans la réalité objective. Pour quelle raison ? Car je trouve que notre vie, nos relations, nos fonctionnements, notre psychologie réelle sont déjà suffisamment incroyables pour devoir invoquer le genre fantastique en soutient.

VP : Ce qui frappe dans « Avalanche Hôtel », c’est le côté train d’enfer auquel le livre est mené. Peu de digressions, presque pas d’intrigues secondaires, vous restez collé à l’histoire, et, dans l’écriture, tout est pesé. Les descriptions sont efficaces et brèves, la partie introspective est brève, mais efficace, vous racontez cette histoire en 262 pages très précisément, là où d’autres n’auraient pas hésité à l’étirer sur 600. C’était une démarche délibérée ? Et cette écriture qui arrive à être concise sans être évasive, vous l’avez travaillée ou est-ce que le roman est sorti d’instinct ?

NT : J’écris tous mes romans d’instinct. En fait, je ressemble beaucoup à Joshua. Moi aussi je sens qu’il y a quelque chose qui se trame mais que je n’y ai pas totalement accès. Bien entendu j’ai d’abord une idée de l’histoire et je fais un petit plan car le « genre » nécessite un minimum de construction. Mais une fois partie dans l’écriture cela devient de l’archéologie mentale. Je mets à jour cet histoire jusque dans ses moindres détails et la tapisserie se révèle peu à peu. Mes romans sont courts car ils n’ont pas besoin de plus de pages pour exister et livrer leurs secrets. Ce n’est pas volontaire, c’est comme ça. Et puis je n’ai pas le talent de certains écrivains capables de rendre intéressant deux pages de descriptions, moi je ne suis qu’un ménestrel, je jette de la poussière d’étoile aux yeux de mon auditoire pour lui raconter une histoire. Pour ça je n’ai pas besoin de beaucoup de talent, mais de beaucoup de sincérité, et un bon sens de la mise en scène et du rythme.

VP : [SPOILER ALERT] La fin du livre… Nous n’allons pas la dévoiler, mais disons qu’elle est optimiste. Le héros semble en paix avec lui-même, libéré, prêt à vivre pleinement sa vie. Sauf erreur de ma part, c’est la première fois dans un de vos livres qu’un personnage rencontre une fin si heureuse. C’était un souhait de votre part dès le départ, ou cette fin s’est imposée durant l’écriture ?

NT : Mais c’est vrai ! et j’en étais étonné moi-même ! Une amie m’a dit après avoir lue le livre qu’elle me trouvait apaisé dans cette écriture. Et bien il faut croire que j’étais moins angoissé en écrivant Avalanche Hôtel qu’en rentrant dans la peau de Tomar Khan. C’est vrai que c’est également un roman très ludique avec un côté jeu de piste que j’adore. Cette fin s’est imposée oui, comme toujours dans mes romans, je ne choisis pas tout !

VP : « Avalanche Hôtel » est un hommage à Stephen King, vous le dites à deux reprises dans le livre (en cours de roman et dans les remerciements). Si il est quasi unanimement considéré comme le boss de la littérature de genre, qui d’autres appréciez vous ?

NT : Pour tout dire je suis un pur produit du « genre ». Science fiction, Fantasy, Fantastique, Anticipation, Horreur… j’ai connu mes plus grands plaisirs littéraires dans ces univers pillés par l’audio-visuel mais connus par si peu de lecteurs. Lovecraft, Poe, Dan Simons, Asimov, Zelazny, Herbert, Tolkien et mon premier maitre PK DICK. Autant d’auteurs estampillés Geek … des visionnaires qui m’ont largement influencés adolescents et même adulte. Après il y a eu les classiques comme Giono, Maupassant, Kerouac, London… le polar j’y suis venu sur le tard. Et puis bien sur KING, dont je vénère le talent de conteur populaire. Un modèle pour moi par sa simplicité et sa générosité dans l’écriture.

VP : Le Vaping Post traite essentiellement de vapotage. Vous êtes sensibilisé sur ce sujet et sur celui de l’arrêt du tabac ? Quel est votre opinion sur la vape ?

NT : Je n’ai jamais fumé 🙂
Par contre j’ai forcément côtoyé des fumeurs et des vapoteurs. Je pense que le tabac est une addiction bien difficile à endiguer et qui, malheureusement, ne se satisfait pas d’une utilisation partielle. J’aime beaucoup les appareils de Vape, ça donne un côté Cyberpunk décalé à des gens qui n’ont pourtant rien à voir avec cet univers et il faut bien avouer que ça permet de vivre dans un monde où l’on est pas agressé par la fumée des autres. Après je ne sais rien de plus sur la vape, je dois l’admettre.

VP : Bon, le livre vient à peine de sortir, mais quels sont vos projets pour le futur ?

NT : J’en ai pas mal. Je continue d’écrire la série Alex Hugo pour France 2, j’ai donc un roman en cours pour 2020 et plusieurs projets de série. Et puis je vais faire énormément de salons cette année donc beaucoup me déplacer. Bref pas le temps de s’ennuyer.

Avalanche Hôtel
Janvier 1980. Joshua Auberson est agent de sécurité à  l’Avalanche Hôtel, sublime palace des Alpes suisses. Il  enquête sur la disparition d’une jeune cliente avec un  sentiment d’étrangeté. Quelque chose cloche autour de lui, il en est sûr. Le barman, un géant taciturne, lui demande de le  suivre dans la montagne, en pleine tempête de neige. Joshua  a si froid qu’il perd connaissance…
… et revient à lui dans une chambre d’hôpital. Il a été pris dans une avalanche, il est resté deux jours dans le coma. Nous ne sommes pas en 1980 mais en 2018. Joshua n’est pas agent de sécurité, il est flic, et l’Avalanche Hôtel n’est plus qu’une carcasse vide depuis bien longtemps. Tout cela n’était qu’un rêve dû au coma.
Mais…

“Avalanche Hôtel” de Niko Tackian, éditions Calmann-Lévy, sorti le 2 janvier, 270 pages, 18.50 Euros.