Une récente étude révèle que les habitants et travailleurs se trouvant à proximité d’un magasin de vape seraient sujets à une très forte exposition aux particules fines provenant de la vapeur des cigarettes électroniques. Une analyse vivement contestée par un spécialiste en physique.
Vapotage passif secondaire
Selon une récente étude [1] publiée dans la revue Tobacco Control, les habitants et travailleurs dont le logement ou l’entreprise se situe à proximité d’une boutique de vape seraient en danger. La faute au “vapotage passif secondaire”, comprenez par là, le dépôt de particules fines inhérentes à la vapeur de cigarette électronique, sur les tissus de leur lieu de vie ou de travail.
Une analyse vivement contestée par le Dr. Roberto Sussman, chercheur en physique à la National University of Mexico (UNAM), et directeur de l’association à but non lucratif Pro-Vapeo Mexico, représentant les utilisateurs mexicains de cigarettes électroniques.
En effet, pour le scientifique, 3 points se révèlent particulièrement gênants concernant cette étude.
Les particules fines provenant de la vapeur et de la fumée sont différentes
Le premier point que conteste le spécialiste en physique est le suivant.
Alors que l’étude explique que “des quantités importantes de propanediol-1,2, de glycérine, de nicotine et de particules de PM2.5 étaient présentes à l’intérieur (ndlr : de la pièce étudiée) après 2 heures de vape” et qu’une “étude sur la qualité de l’air intérieur a montré qu’une grande pièce avec des utilisateurs actifs de cigarettes électroniques contenait des PM2,5 à des concentrations plus élevées que dans les cafés hookahs et les bars qui permettent de fumer la cigarette”, le docteur Roberto Sussman rappelle que les “PM2,5” (particules de diamètre inférieur à 2,5 microns) prétendument présentes dans l’aérosol d’e-cigarette, sont en réalité le fruit de “mécanismes de combustion, par exemple dans la pollution de l’air ou la fumée de tabac”.
Ainsi, si l’étude qu’il conteste fait bel et bien part d’une préoccupation similaire concernant la vape, elle est, pour lui, “totalement injustifié”, puisque les “particules” dans les aérosols expirés de cigarettes électroniques sont des gouttelettes liquides, et non des particules proprement dites, même si le nombre et le diamètre de ces dernières sont du même ordre de grandeur que dans la fumée de tabac ambiante.
Il fait ainsi une distinction claire entre les “particules” des aérosols de la vape et celles présentes dans la fumée de cigarettes, puisque celles de la vape se présentent sous la forme de gouttelettes liquides, et sont donc “chimiquement distinctes” de celles de la fumée de tabac. Une distinction a priori oubliée des chercheurs.
Le temps d’exposition à ces “particules” est irréaliste
Le second point que le scientifique conteste concerne cette fois le fait que l’étude mentionne “la possibilité d’une exposition potentielle à des substances toxiques par ingestion ou par contact dermique avec ECEAR (résidus d’aérosols expirés de cigarettes électroniques) déposés sur des serviettes en coton, des essuie-tout et des filtres à air”.
Alors que l’analyse explique par exemple qu’après “35 jours sur le terrain, une serviette en coton a recueilli 4,571 microgrammes de nicotine”. Si un tout-petit “se nourrissait de 0,3 m2 de cette serviette, il serait exposé à 81,26 mg de nicotine”.
Cependant, suite à un calcul (relativement compliqué mais disponible ci-dessous) du scientifique, il s’avère qu’afin d’atteindre une telle proportion de nicotine, il faudrait que le “tout-petit” mette à la bouche 2700 cm² de la fameuse serviette en coton, et ce pendant 35 jours d’affilés.
Pour le docteur ayant revu les calculs des scientifiques qui ont conduit l’étude, même en imaginant qu’un bébé machouillerait 1g de ce tissu, et ce pendant une heure par jour (ce qui est une estimation déjà largement exagérée), il serait exposé à 5,41 ng de nicotine chaque jour, soit 189,35 ng pour 35 jours, un chiffre bien loin des 81 250 ng suggérés.
Des résultats auxquels il ajoute le fait que les tissus présents dans une habitation ne sont pas “statiques” puisque souvent déplacés par leurs propriétaires. Des déplacements entraînant donc, de fait, une exposition plus ou moins grande aux aérosols, selon l’endroit où ils se trouvent.
La quantité de nicotine relâchée par un vapoteur dépend-elle vraiment de la taille du “nuage” qu’il produit ?
Enfin, le troisième point contesté par le docteur est le suivant.
Alors que l’étude explique que “l’ampleur de l’expiration de nicotine dépend de la propension de l’utilisateur à produire des nuages d’aérosol”, le chercheur en physique explique que s’il est vrai “qu’un grand nuage contient plus de masse d’aérosol, et donc plus de nicotine”, la production d’un gros “cloud” exige aussi “une inhalation plus profonde, ce qui produirait probablement des dépôts de nicotine plus importants dans le système respiratoire”.
Des conclusions considérées comme “non fondées”
Ainsi, pour le docteur Roberto Sussman, “les résultats et les mesures réelles présentés dans ce rapport provenaient d’expositions à des tissus et des filtres statiques, et non d’expositions réalistes à des personnes réelles. Les règlements recommandés par les auteurs sont donc excessifs et non fondés”.
[1] Khachatoorian, Careen, et al. “Electronic Cigarette Chemicals Transfer from a Vape Shop to a Nearby Business in a Multiple-Tenant Retail Building.” Tobacco Control, BMJ Publishing Group Ltd, 27 Aug. 2018, http://dx.doi.org/10.1136/tobaccocontrol-2018-054316
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