Suite à l’augmentation du nombre de jeunes qui vapotent dans le pays, et les nombreux problèmes de santé rencontrés par certains utilisateurs de vaporisateurs personnels, hier, Donald Trump a fait part de sa volonté de voir la plupart des arômes interdits dans la vape.

Une mesure excessive ?

L’histoire de la vape aux Etats-Unis est compliquée. Débarqué dans la vie des Américains il y a maintenant plusieurs années, le vaporisateur personnel a été sans conteste, l’une des révolutions majeures qu’a connues le pays lors de ces dernières années. Si l’on en croit un rapport du CDC publié fin 2018, le nombre de fumeurs aux USA aurait chuté en 2017 jusqu’à atteindre 14 %, soit le taux le plus bas de son histoire.

Si cette réduction du nombre de consommateurs de tabac fumé est une excellente nouvelle, elle s’est accompagnée d’une hausse du nombre d’utilisateurs de vaporisateur personnel chez les jeunes, et tout particulièrement chez les élèves et mineurs du pays. Une augmentation que bon nombre d’associations et médias ont imputée à Juul, leader de la vente de pods dans le pays.

Bien que ces chiffres soient contestés, la FDA estimait en septembre 2018 que près de 5 millions de jeunes vapotaient aux Etats-Unis.

La vape accusée de provoquer une maladie pulmonaire

Depuis cette augmentation du nombre de jeunes qui vapotent, les Etats-Unis sont partagés concernant l’efficacité de la cigarette électronique.

Si certains mettent en avant que le nombre de fumeurs n’a jamais été aussi bas dans le pays, d’autres préfèrent se focaliser sur le nombre de jeunes qui se sont procurés un vaporisateur personnel. Un combat entre deux points de vue qui dure maintenant depuis de nombreux mois.

Et comme si tout cela n’était pas assez, plusieurs vapoteurs sont récemment tombés malades dans le pays, tous atteint de problèmes de santé similaires ayant conduit jusqu’au décès de 6 d’entre eux.

Concernant cette affaire, si l’enquête avance doucement et que la FDA semble se diriger de plus en plus vers le fait de reconnaître que le souci n’est pas la vape, mais un produit frauduleux que les malades ont vapoté, ce nouveau fait-divers n’a en rien arrangé l’image du vapotage aux Etats-Unis.

La PMTA, dernière chance pour les vapoteurs

Des jeunes qui vapotent, des morts « dus au vapotage », il n’en fallait pas plus au Président américain pour se saisir de l’affaire.

Ainsi, lors d’une réunion dans le bureau ovale ayant eu lieu hier soir, Donald Trump aurait « reconnu qu’il y avait un problème » et indiqué qu’il « ne peut pas laisser tomber les gens malades » ni les enfants être « si affectés ».

Ainsi, selon Alex M. Azar, Secrétaire à la Santé et aux Services sociaux du pays, la FDA devrait élaborer dans les semaines à venir, « un plan pour retirer du marché les e-cigarettes aromatisées », à l’exclusion des arômes tabac.

Les fabricants auront cependant l’occasion de faire revenir leurs produits sur le marché, à condition que ces derniers soient acceptés par la FDA, par le biais d’une PMTA. Toutefois, lesdits produits ne pourront pas être vendus de nouveau avant d’avoir été approuvés.

Une interdiction d’ores et déjà appliquée dans l’Etat du Michigan, ou encore dans la ville de San Francisco.

Par le passé, de nombreuses études ont mis en lumière l’importance des arômes dans le cadre du sevrage tabagique.

En juillet 2018, une recherche indiquait par exemple que sur les 20 836 vapoteurs participant à l’étude, 82,9 % déclaraient acheter régulièrement des produits de la vape aromatisés. Plus important encore, cette même recherche révélait qu’entre 2011 et 2016, le nombre de vapoteurs qui démarraient la cigarette électronique à l’aide d’un e-liquide aromatisé était passé de 17,8 % à plus de 33 %.

Difficile de dire ce que deviendront ces vapoteurs lorsque les arômes auront complètement disparu. Choisiront-ils de continuer la vape malgré leur absence ? Ou décideront-ils de retourner à la cigarette combustible, puisque les saveurs qui les attiraient tant jusqu’à présent, n’existeront plus ?

Autre point qui mérite d’être soulevé. Les différents vapoteurs connaissant actuellement des problèmes de santé semblent s’être tous procurés des produits au marché noir. Le fait d’interdire les arômes dans la vape ne représente-t-il pas une chance de voir un marché noir se développer dans ce secteur ? Un marché noir qui n’aura, comme dans le cadre des produits au THC, aucun règlement ni contrôle sanitaire…

Vers une explosion du marché noir ?

Quoi qu’il en soit, certains fabricants ont d’ores et déjà clairement annoncé qu’ils continueraient de vendre leurs produits de façon illicite, si ces derniers venaient à être interdits.

C’est par exemple le cas de Kim Shilling Manor, de la marque Moose Jooce Vape Shops, qui possède divers magasins de vape dans l’Etat du Michigan.

Interrogée par un journaliste du VapingPost USA, Kim a très clairement indiqué qu’elle n’aurait « aucun scrupule à passer par le marché noir ». Pour la dirigeante, sa « responsabilité » envers les gens qu’elle a aidés à arrêter de fumer grâce au vapotage, fait qu’elle ne peut ainsi « pas les laisser en plan ».

Mais si cette intention est louable, elle soulève elle aussi plusieurs problèmes. Ainsi, comme le note Michael McGrady, certaines personnes mal intentionnées pourraient profiter de cette activité souterraine du fabricant, pour vendre des produits contrefaits, de mauvaise qualité, voire dangereux, en prétextant qu’ils ont été fabriqués par la marque.

La prohibition est-elle de retour ?

Souvenez-vous. A la fin de la première guerre mondiale, les Etats-Unis découvrent la société de consommation. Alors que la croissance du pays explose, l’industrie se développe à vitesse grand V et, voyant l’économie du pays grandement s’améliorer, l’immigration commence à se faire massive sur le territoire.

Parmi les nouveaux venus aux USA, des Ecossais et des Irlandais, qui amènent avec eux, leurs connaissances en matière de distillation et de fabrication d’alcool. Les boissons alcoolisées envahissent alors tout le territoire.

Découvrant les effets de la boisson sur le comportement des hommes, plusieurs mouvements politiques (conservateur notamment), s’organisent et parviennent à faire interdire l’alcool dans 32 Etats. Une interdiction, qui porte aujourd’hui le nom de prohibition, et qui dure de 1919 à 1933, période durant laquelle un vaste marché parallèle se met en place, dirigé par de nouvelles mafias.

Un marché noir qui rendra d’ailleurs célèbre divers gangsters de l’époque, tels qu’Al Capone, qui bâtissent grâce à lui, des fortunes colossales.

Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à dire que la prohibition était une mauvaise idée et que les décideurs de l’époque avaient surréagis face aux problèmes causés par la consommation d’alcool.

Mais n’est-ce pas exactement ce que le gouvernement Trump est sur le point de faire avec la cigarette électronique ?

Des problèmes de santé connus par quelques centaines d’Américains, et une hausse de la consommation de produits nicotinés par les jeunes, sont-elles des raisons suffisantes pour interdire entièrement la vente d’un produit ?

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