La Norvège a une nouvelle ministre de la santé dont la méthode est à tout le moins originale : considérant peut-être que le moral du patient prime sur tout, elle incite ses administrés à boire, fumer et manger de la bonne viande bien rouge. Qui a dit “on veut la même ?”.
Le nom de l’ortie
Sylvi Listhaug : si nous voulions céder à la facilité, nous vous aurions bien dit “retenez ce nom”, mais, comme tous les patronymes scandinaves, nous savons qu’il est difficile à retenir, pour nous autres, locuteurs gréco-romains. Tout aussi compliqué à retenir que Erna Solberg. Mais, vous demanderez-vous légitimement, qui sont ces personnes ?
Mme Solberg est la Première ministre norvégienne, et elle vient de nommer Sylvi Listhaug Ministre de la santé. D’accord, mais en quoi ces miscellanées politiques nordiques nous intéressent-elles ? Et bien, la fraîchement émoulue Ministre a un programme que l’on pourra qualifier d’original :
Voilà ce qu’a déclaré la Ministre de la santé à la radio norvégienne. Et, après l’émission, elle s’en est grillée une petite, avant de rentrer au Ministère, parce que Mme Listhaug, elle n’est pas du genre “faites ce que je dis mais pas ce que je fais”.
Et rien ne vaut un bon vieux coup de parler vrai, n’est-ce pas ?
Razzia de rabats-joie
Bien entendu, les réactions n’ont pas tardé à se faire entendre. Tiens, non, encore un lieu commun : des réactions ont bien été exprimées, mais elles ont été couvertes par les manifestations de joie de la foule en liesse. Ainsi que, sans doute, un certain nombre de revendications (“Et la drogue ?” “Et les limitations de vitesses ?” “Et tuer mon voisin qui me colle un ulcère ?” “Et incendier des églises en écoutant du black métal ?” parce qu’après tout, on est en Norvège).
La présidente de la Société norvégienne de lutte contre le cancer, Anne Lise Ryel, a ainsi fait remarquer que beaucoup de gens risquent de prendre ça à la lettre. Pour la double raison que c’est exactement ce qu’ils rêvent qu’on leur dise, et que ça provient d’une autorité.
On aurait du mal à imaginer, par exemple en France, Mme Buzyn dire une chose pareille. Du moins, j’ai du mal à l’imaginer. Pour tout vous dire, ça fait deux heures que j’essaie, je n’y arrive pas.
Pas un mot sur le SNUS, par contre, qui est en vente libre là bas, qui est plus consommé que la cigarette et dont l’explosion des ventes sur le marché a coïncidé avec une chute constatable du nombre de cancers du poumon. Pas un mot non plus sur la vape, objet d’une réglementation bizarre : les norvégiens ne peuvent pas acheter de produits nicotinés dans leur pays, mais ils peuvent en acquérir à l’étranger, à condition d’avoir un certificat médical certifiant qu’ils sont en sevrage tabagique.
C’est vrai, à la fin : il ne manquerait plus que les gens insistent pour vivre sainement. Où va le monde ?
Vers une nouvelle carrière
C’est curieux, quand même : je pensai la politique plus compliquée que ça, ce qui m’a tenu éloigné des urnes. Si j’avais su qu’il suffisait de dire aux gens de bouffer du beefsteak la clope au bec en buvant des alcools forts, j’aurai fait carrière. Toutes ces années à payer moi-même ma consommation quotidienne de Kahlua alors que j’aurais pu la facturer au contribuable, c’est déprimant.
Il est temps de conclure cet article. C’est un peu abrupt, certes. Mais ça ne vous est jamais arrivé, à vous, que quelqu’un vous dise quelque chose de tellement idiot que vous ne savez pas quoi répondre ? Ben voilà.