Toujours soucieux d’aider leurs concitoyens, de se mettre au service de la communauté et de préserver la santé publique, les buralistes l’affirment fort et clair : en cas de légalisation du cannabis, ils sont là. Du fond du cœur, merci.
Les buralistes changent
Le plan de transformation des buralistes est l’œuvre de la vie des élus de la Confédération. Et c’est une bonne chose.
Pour résumer, le plan de transformation des buralistes est la réponse à « et maintenant, on fait quoi ? » que tous les professionnels de la vente de tabac se posent depuis que les gouvernements se sont enfin décidé à efficacement lutter contre le tabagisme.
Les esprits chagrins diront que le plan de transformation des buralistes est la réponse à « et maintenant, on fait quoi ? » que tous les professionnels de la vente de tabac se posent depuis que les fumeurs se sont rendus compte que personne ne faisait rien et ont décidé de prendre les choses en main en inventant la vape.
Nous disons que ce n’est pas le sujet. Globalement, les buralistes se demandent comment remplacer la vente monopolistique d’un produit extrêmement addictif ? La réponse est simple : par la vente monopolistique d’autres produits addictifs à fortes taxes ajoutées.
Ca plane pour moi
Ainsi, on apprend que les buralistes mènent des négociations acharnées avec la Française des jeux récemment privatisée. Qu’ils vont également faire monter en puissance leurs fonctions de préposés à l’administration. Encore un produit addictif : je connais peu de personnes qui aient réussi à se désintoxiquer des impôts et taxes.
Il faut dire que le gouvernement est l’allié des buralistes, et il a débloqué 80 millions d’euros pour aider les marchands de tabac à reprendre leur place honteusement volée par la vape, qu’ils avaient négligés par loyauté vis à vis des cigarettes. Et ce n’est pas moi qui le dit, mais Philippe Coy, président national de la Confédération des Buralistes, et Jacky Révillé, président de la branche Nouvelle Aquitaine de la même confédération, dans La Nouvelle République.
Voilà que les buralistes veulent investir un nouveau marché : le cannabis. Pardon, le « chanvre de bien-être ». La nuance est de taille : se rouler un pétard de shit est un acte illégal commis par un drogué tandis que se préparer une cigarette récréative à base de chanvre est le geste de détente d’un honorable citoyen. Les mots (et les taxes) changent, la molécule reste la même.
Il est vrai qu’il est important de confier la vente du cannabis récréatif (les buralistes ont peur d’utiliser ce mot, voyons, où est le problème?) aux vendeurs de tabac – jeux de hasard – comptes Nickels – timbres – bonbons – journaux – parfois alcool – billets SNCF, RATP – timbres fiscaux – etc. (on dirait une ouvreuse dans un cinéma des années 60) plutôt qu’à, disons, des spécialistes, comme les boutiques tenues par des passionnés et qui ne proposent que ça est tellement, tellement logique.
Il faut sauver le soldat Bubu
On me dira : il faut sauver les buralistes, ils sont en difficulté. Oui, certes.
Mais les boutiques de vêtements du centre-ville souffrent à cause de la concurrence des gigantesques enseignes de zones commerciales et d’internet, et si ils disparaissent, nous seront tous condamnés à devenir très riches si nous voulons nous habiller d’autre choses que de vêtements au rabais très peu durables et donc très polluants fabriqués par des enfants dans un pays du tiers-monde. Pourtant, personne ne fait rien.
Mais les librairies disparaissent les unes après les autres, en bute à la concurrence d’un géant sur internet en délicatesse avec le FISC, et si ils disparaissent, demain, ce sera un milliardaire américain qui décidera de ce qu’on pourra lire ou non. Pourtant, personne ne fait rien.
Les buralistes sont en difficulté, en bute à la vape, et si le métier de débitant de tabac disparaît, ce sera le signe que l’objectif de santé publique est atteint. Et pourtant, le gouvernement aligne 80 millions.
A en perdre la tête
On m’objectera que les buralistes ont historiquement un rôle de collecte d’impôts et taxes en partenariat avec l’Etat. Oui, certes.
Mais bon, dans un tout autre registre, les bouilleurs de cru avaient le monopole des alambics, qui se transmettaient de génération en génération au sein de même familles. Puis le gouvernement a dit “stop”, et la France a continué de tourner. Comme quoi, quand on veut, on peut.
Pourtant, je ne suis pas hostile aux buralistes. Ce sont des commerçants qui travaillent dur, et qui ont une réelle utilité sociale. Qu’ils cherchent à faire autre chose, varier leur activité et se préparer l’après-tabac est tout à fait respectable et tout à leur honneur.
Le monde a changé, l’ère des monopole est révolue. On ne change pas avec un logiciel obsolète.
Cet article d’opinion n’engage que le point de vue de son auteur et ne représente pas forcément l’avis de la rédaction.