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Robert West commente le mot de l’année “Vape”

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Robert West ici à l'E-cigarette Summit de Londres en novembre 2014.

Robert West ici à l’E-cigarette Summit de Londres en novembre 2014.

Professeur de psychologie de la santé et directeur des études sur le tabac à l’University College London (UCL), Robert West s’exprime très régulièrement dans les médias sur le sujet de la cigarette électronique, notamment dans la très sérieuse revue scientifique Nicotine & Tobacco Research dont il fait partie du comité de rédaction.

Il s’exprime cette semaine sur le mot de l’année choisi par Oxford Dictionaries pour le terme « vape », et reprend à cette occasion l’avis de plusieurs experts sur la croissance du marché des cigarettes électroniques et sur le phénomène du vapotage.

Le vapotage ou la vape (selon la traduction française que l’on peut en faire) est le terme qui décrit l’utilisation d’une cigarette électronique (e-cigarette) ou vaporisateur personnel. Etant donné que les e-cigarettes impliquent l’inhalation de vapeur plutôt que de fumée, elles ne doivent pas être comparées aux cigarettes traditionnelles selon Robert West. La vapeur semble identique à la fumée de tabac si ce n’est qu’elle se dissipe plus rapidement et ne dégage qu’une faible odeur vu qu’elle est principalement composée de gouttelettes d’eau.

Histoire d’un succès

Les e-cigarettes ont commencé à rencontrer du succès en 2010. Aujourd’hui, plus de deux millions de personnes au Royaume-Uni les utiliseraient et plus de 5 millions aux Etats-Unis. Leur vente est interdite dans de nombreux pays, y compris en Australie et au Canada, bien que des études aient montré que leur utilisation dans ces pays est assez répandue étant donné qu’on peut facilement s’en en procurer sur internet.

La cigarette électronique est un dispositif dans lequel un atomiseur chauffe, à l’aide d’une batterie, un « e-liquide » composé généralement de propylène glycol, de nicotine et d’arômes. Elle est conçue en vue d’offrir des effets similaires à une cigarette de tabac mais avec des risques beaucoup moins élevés, aussi bien pour celui qui l’utilise que pour son entourage, et est également beaucoup moins chère. En raison du fait qu’elle n’implique pas la combustion de tabac, la concentration de substances toxiques contenues dans la vapeur est minime par rapport à la concentration de toxines contenues dans une cigarette traditionnelle. Les risques précis liés à son utilisation ne sont pas encore connus mais sur la base des composants contenus dans la vapeur, ces risques seraient de l’ordre de 1 à 5% par rapport à la cigarette de tabac.

Une popularité encore mal évaluée

La plupart des pays ne possèdent pas de données relatives à l’utilisation des cigarettes électroniques dans la population. Les données les plus complètes sont de loin celles qui proviennent du Royaume-Uni où le Smoking Toolkit Study (STS) collecte chaque mois des données sur l’utilisation d’échantillons représentatifs de la population britannique adulte, ce qui permet ainsi d’avoir un suivi précis des statistiques. Cette étude a été lancée en 2007 afin de garder une trace des principaux indicateurs de performance liés au tabac et à la cessation tabagique. De son côté, Action on Smoking and Health (ASH) mène également chaque année des enquêtes nationales auprès des fumeurs adultes et des jeunes fumeurs. Des enquêtes à grande échelle sont également effectuées aux Etats-Unis et dans d’autres pays, notamment en France avec les rapports de l’OFDT.

Les données rassemblées montrent que la plupart des personnes utilisent les cigarettes électroniques dans un effort pour préserver leur santé, soit en arrêtant tout simplement de fumer, soit en réduisant leur consommation de tabac. Malgré les affirmations trompeuses lancées par un certain nombre d’opposants aux e-cigarettes, leur utilisation faite aujourd’hui par des non-fumeurs et des anciens fumeurs qui ont arrêté depuis longtemps est extrêmement rare au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Au Royaume-Uni, leur prévalence chez les non-fumeurs et les anciens fumeurs qui ont arrêté depuis longtemps est identique à l’utilisation de produits autorisés qui contiennent de la nicotine comme les patchs de nicotine, les gommes à mâcher ou les pastilles à sucer.

Plus de plaisir, moins de nicotine

Les e-cigarettes sont disponibles sous différentes formes. Au Royaume-Uni, les plus utilisées sont aujourd’hui les « cigalikes » car elles sont similaires aux cigarettes traditionnelles et sont souvent munies d’un embout qui s’illumine lorsque l’utilisateur tire une bouffée. On retrouve ensuite les dispositifs qui sont composés d’un réservoir rechargeable et qui rencontrent de plus en plus de succès. Il existe également d’autres types plus sophistiqués comme les « MODs », hautement personnalisables et souvent choisis par les passionnés.

La majorité des utilisateurs d’e-cigarettes absorbent probablement moins de nicotine avec ces dispositifs que les fumeurs de cigarettes de tabac mais les vapoteurs expérimentés qui utilisent les dispositifs à réservoir ou les mods peuvent absorber au moins tout autant de nicotine de leur produit que les fumeurs des cigarettes traditionnelles.

Lorsqu’elles sont utilisées pour arrêter de fumer, les e-cigarettes semblent améliorer les chances de succès d’environ 50% en moyenne, soit tout autant que les produits autorisés contenant de la nicotine. La principale différence semble être que ces produits sont beaucoup plus populaires et semblent être efficaces lorsque les fumeurs les utilisent sans le soutien d’un professionnel de la santé.

A l’heure actuelle, les preuves continuent de montrer que l’utilisation de varénicline ou d’un produit autorisé contenant de la nicotine à l’aide du soutien d’un spécialiste du comportement offre les meilleurs chances de cessation pour les fumeurs qui sont prêts à utiliser ce soutien et lorsqu’un tel soutien est disponible.

Lorsqu’elles sont utilisées en vue de réduire la consommation de tabac, l’utilisation quotidienne d’e-cigarettes semble être associée à une baisse modeste en moyenne du nombre de cigarettes de tabac consommées. Il a été noté que l’utilisation de produits autorisés contenant de la nicotine lors d’une tentative pour réduire la consommation de cigarettes de tabac est associée à une probabilité accrue de cessation tabagique ultérieure. Ceci n’a pas encore été démontré pour les e-cigarettes bien que des fumeurs qui utilisent quotidiennement les e-cigarettes essaient plus régulièrement d’arrêter de fumer des cigarettes de tabac que ceux qui n’ont pas une double utilisation (e-cigarette et cigarette de tabac).

Pas de passerelle vers le tabac

Malgré les affirmations d’un certain nombre d’opposants à la cigarette électronique, cette dernière ne sert pas de « passerelle » vers le tabac pour les adolescents ou de moyen pour normaliser à nouveau la cigarette. Le nombre de fumeurs adultes et de jeunes fumeurs a continué de régresser de manière stable alors que l’utilisation d’e-cigarettes a augmenté. Au Royaume-Uni, le taux de cessation tabagique chez les adultes est relativement plus élevé qu’il ne l’était avant que les e-cigarettes ne deviennent populaires. L’utilisation de cigarettes électroniques dans des espaces publics fermés n’a pas conduit à une hausse quelconque du taux de tabagisme dans ces espaces au Royaume-Uni où il existe un très grand respect de la législation antitabac.

Un certain nombre de publicités sur les e-cigarettes tentent de valoriser le vapotage et dans certains pays, d’estomper en quelque sorte toute frontière entre le tabagisme et le vapotage. Cette démarche a suscité des craintes sur le fait que le vapotage pourrait attirer les non-fumeurs, raison pour laquelle certains pays comme le Royaume-Uni ont décidé de réglementer ce secteur pour empêcher cela.

Propagandes contre la cigarette électronique

Le vapotage est à la base d’une certaine controverse. Un certain nombre de personnes très médiatisées dans les services de santé se sont lancées dans ce qui semble être une campagne de propagande contre les cigarettes électroniques, créant une impression dans la conscience publique qu’elles sont plus nocives qu’elles ne le sont en réalité et qu’elles minent les efforts de lutte antitabac lorsque les preuves n’appuient pas cette thèse. Il est légitime de se montrer inquiet par ce qui pourrait se passer à l’avenir si les fabricants de cigarettes dominent le marché de la cigarette électronique et bénéficient de certaines incitations pour maximiser les ventes de tabac, mais une bonne partie de la propagande anti-cigarettes électroniques semble être motivée plus par une étique puritaine que par une évaluation impartiale des preuves.

Exploiter au maximum l’opportunité qu’offrent les e-cigarettes en matière de santé publique, tout en minimisant les menaces potentielles, requiert de rassembler des données valides, d’utiliser ces informations en vue de construire une stratégie réglementaire appropriée et de surveiller étroitement la situation afin d’ajuster cette stratégie si besoin est.

Le Royaume-Uni semble montrer la voie avec une approche conçue pour encourager les fumeurs à utiliser la cigarette électronique pour arrêter de fumer sans nuire à l’utilisation de méthodes de cessation potentiellement plus efficaces et en empêchant les e-cigarettes de devenir une passerelle vers le tabac. Le Smoking Toolkit Study, les enquêtes menées par Action on Smoking and Health et d’autres recherches continueront d’offrir des informations essentielles et nécessaires au façonnement cette stratégie.


Traduit en partie d’après l’article original “Vaping and the data on e-cigarettes” publié sur Oxford University Press.