Vous êtes ici : Vaping Post » Etudes sur la cigarette électronique » Plus de risques de BPCO chez les utilisateurs de cigarettes électroniques ?

Plus de risques de BPCO chez les utilisateurs de cigarettes électroniques ?

    Annonce
  • Calumette
  • le petit vapoteur
  • Pulp
  • Vaporesso
  • Innokin
  • Vincent
  • Voopoo

Une récente étude américaine avance que le vapotage pourrait doubler le risque de BPCO. Relayée sans nuance par le CNCT, cette conclusion mérite pourtant d’être examinée de plus près.

Une étude relayée sans recul critique

Il y a quelques heures, Génération sans tabac a rapporté les résultats d’une nouvelle étude américaine. Titrant, « Une étude américaine révèle que le vapotage double le risque de maladies pulmonaires graves, même sans antécédents de tabagisme », la plateforme d’information lancée par le CNCT (Comité national contre le tabagisme) indique que « les preuves de la nocivité des produits de vapotage s’accumulent au fil des recherches scientifiques ». Mais que dit réellement l’étude dont parle cet article ?

Pour commencer, il semble important de noter que Génération sans tabac se contente de répéter les conclusions de la recherche sans l’avoir décortiquée au préalable. Probablement, car seul l’extrait (abstract) est disponible et qu’il faut débourser la somme de 53 € pour avoir accès à l’intégralité de l’étude.

Un risque accru uniquement pour la BPCO chez les vapoteurs

Dans les faits, cette recherche a utilisé une base de données américaine diversifiée. Au total, ses auteurs ont obtenu un échantillon final de 184 772 personnes. Parmi elles, 81,8 % étaient non-fumeurs et non vapoteurs, 13,6 % étaient fumeurs exclusifs, 3,3 % étaient doubles utilisateurs (fumeurs et vapoteurs), et 1,3 % étaient des vapoteurs exclusifs.

Pour chacun des groupes, les chercheurs ont analysé l’incidence de cinq maladies : l’hypertension, le diabète de type 2, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), l’insuffisance cardiaque, et enfin l’athérosclérose (l’accumulation de plaque dans les artères, qui les rétrécit ou les bouche).

Après avoir analysé les données à leur disposition, les scientifiques américains ont conclu :

  • Pour le groupe de vapoteurs exclusifs : 129 % de risque en plus d’avoir une BPCO par rapport au groupe des non-fumeurs. Et aucune différence significative pour les quatre autres maladies observées.
  • Pour le groupe des fumeurs exclusifs : 575 % de risque en plus d’avoir une BPCO, 20 % de plus d’avoir de l’hypertension, 66 % de plus d’avoir de l’athérosclérose, 50 % de risque en plus de souffrir d’insuffisance cardiaque, et 18 % en plus d’avoir un diabète de type 2.
  • Pour le groupe des vapofumeurs : 691 % de risque en plus de souffrir d’une BPCO, 21 % en plus pour l’hypertension, 118 % en plus pour l’athérosclérose, 76 % en plus pour l’insuffisance cardiaque. Et un risque supplémentaire non significatif pour le diabète de type 2.

En résumé :

Maladie Non-utilisateurs
(référence)
Vapoteurs exclusifs Fumeurs exclusifs Double usage
(vape + tabac)
BPCO +129 % (significatif) +575 % (significatif) +691 % (significatif)
Hypertension +1 % (non significatif) +20 % (significatif) +21 % (significatif)
Diabète de type 2 −12 % (non significatif) +18 % (significatif) +12 % (non significatif)
Insuffisance cardiaque −18 % (non significatif) +50 % (significatif) +76 % (significatif)
Athérosclérose +5 % (non significatif) +66 % (significatif) +118 % (significatif)

 
Le vapotage n’augmenterait donc pas les risques de souffrir des maladies étudiées, sauf dans le cas de la BPCO pour laquelle il les multiplierait par plus de deux.

Les questions que pose cette étude

Avant de souligner les limites de cette étude, il convient de mettre en lumière la bonne volonté dont ont fait preuve les scientifiques, puisqu’ils indiquent avoir exclu les ex-fumeurs du groupe des vapoteurs exclusifs. Autrement dit, théoriquement, le risque accru de BPCO pour les vapoteurs ne devrait pas provenir de leur passé tabagique. Et pourtant, malgré le soin apporté sur ce point, de nombreuses limites existent pour cette recherche.

Tout d’abord, la petite taille du groupe des vapoteurs exclusifs réduit d’office sa puissance statistique. Ensuite, comme les auteurs le soulignent, ils n’ont pas pris en compte la dose ou la fréquence du vapotage. Autrement dit, il n’est fait aucune distinction entre un vapoteur occasionnel et un utilisateur beaucoup plus intensif. Or, la dose cumulée est cruciale lorsqu’on souhaite estimer un effet dose/réponse. 

Ensuite, les chercheurs n’ont pas suivi l’évolution du comportement des participants durant l’étude, qui s’est déroulée pendant quatre ans. En d’autres termes, lorsque cette recherche a commencé, tous les participants ont été classés dans un groupe (vapoteur exclusif, fumeur exclusif, vapofumeur, non-utilisateur), et leur positionnement n’a jamais été remis en question. Pourtant, sur une durée de quatre ans, un fumeur peut avoir décidé de passer à la vape, un vapoteur peut avoir commencé (ou recommencé ?) à fumer. Et un double utilisateur peut, par exemple avoir largement réduit la fréquence de son tabagisme et augmenté celle de son vapotage, et vice versa. L’étude a donc traité tous les groupes comme s’ils étaient parfaitement stables sur toute la durée de l’étude, alors que de nombreux changements de comportements peuvent être intervenus lors de toutes ces années. 

Toujours au sujet des groupes, soulignons que chaque participant a été classé dans l’un d’eux après avoir simplement répondu à un questionnaire. Aucune forme de vérification n’a été mise en place. Il n’a donc jamais été vérifié qu’une personne qui indique vapoter sans jamais avoir fumé par le passé, n’a réellement jamais fumé. 

Enfin, cette étude étant observationnelle et transversale, elle ne permet tout simplement pas de prouver une quelconque causalité entre vapotage et apparition d’une quelconque maladie.

La BPCO, une maladie lente aux causes multiples

Intéressons-nous aussi, rapidement, à la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), seule maladie dont le vapotage augmenterait le risque.

La bronchopneumopathie chronique obstructive est une maladie respiratoire chronique. Elle provoque une inflammation des voies aériennes, notamment les bronches, et participe à la destruction progressive des poumons. Chaque année, plus de trois millions de décès sont attribués à cette maladie, ce qui en fait la troisième cause de mortalité dans le monde, après les maladies cardiovasculaires et les AVC. Selon l’INSERM, plus de 80 % des cas de BPCO sont attribuables au tabagisme. Mais d’autres facteurs peuvent également accroître les risques d’en souffrir, comme la pollution de l’air, l’exposition professionnelle à certaines poussières et substances chimiques, le tabagisme passif in utero, ou encore une fréquence élevée d’infections des voies respiratoires durant l’enfance.

Si les facteurs de risque de développer une BPCO sont multiples, tous ont pourtant quelque chose en commun : les symptômes de cette maladie apparaissent très tardivement. De manière générale, le premier symptôme est une toux qui se développe chez les fumeurs âgés de 40 à 60 ans. Puis survient une dyspnée chronique (sensation de respiration désagréable), généralement à partir de 50 ans.

Or, dans l’étude dont nous parlons aujourd’hui, l’âge moyen des vapoteurs exclusifs est de 29,2 ans. Et à cet âge, souffrir d’une bronchopneumopathie chronique obstructive est particulièrement rare sans avoir été exposé à une substance problématique, et de manière prolongée, durant le passé. Cette maladie ne se développe pas non plus en seulement trois ou quatre ans, mais en plusieurs décennies.  Autant d’éléments qui rendent très peu crédible l’idée que le vapotage seul serait responsable des cas de BPCO relevés dans cette étude.

De plus, avec plusieurs dizaines de millions de vapoteurs à travers le monde, si trois années de vapotage suffisaient à souffrir d’une quelconque maladie, de nombreuses alertes auraient été lancées depuis bien longtemps, près de 15 ans après l’apparition des premières cigarettes électroniques.


1 John Erhabor, Zhiqi Yao, Erfan Tasdighi, Emelia J Benjamin, Aruni Bhatnagar, Michael J Blaha, “E-cigarette Use and Incident Cardiometabolic Conditions in the All of Us Research Program”, Nicotine & Tobacco Research, 2025, https://doi.org/10.1093/ntr/ntaf067

Les dernières études sur la vape