Aujourd’hui, grâce à Juul et Imperial Brands, nous allons revenir sur les origines d’une expression imagée, “c’est l’hôpital qui se moque de la charité”. Parce que deux acteurs de Big Tobacco qui se tirent dans les pattes entre eux, c’est assez jouissif pour ne pas en manquer une miette.
C’est à ça qu’on les reconnaît
Commençons cet article par une devinette, une fois n’est pas coutume : qui a accusé Juul de vendre des produits excessivement chargés en nicotine à une population spécifique de jeunes consommateurs ? La FDA ? Non, essayez encore. L’American Cancer Society ? Non plus. Bon, la bonne réponse, évidemment, vous l’avez, puisque nous vous l’avions spoilée : c’est Matthew Phillips, chef du développement d’Imperial Brands.
Et Mr Phillips y va de son petit couplet anti Juul : leurs pods sont surchargés en nicotine, ils créent une addiction, et ils visent les jeunes, et de toute façon, Juul ils sont méchants, et ils ont payé l’église pour qu’elle ne dise pas qu’en fait, le serpent n’avait pas tenté Eve avec une pomme, mais avec une Juul, etc. etc. Vous ferez le tri entre ce qu’il a dit et ma tendance à l’exagération.
Avec, du coup, toujours selon Mr Phillips, des conséquences catastrophiques : cela attiré la vigilance de la FDA sur la vape. Est-ce qu’on dirait qu’il est en train de se plaindre qu’on ne peut plus faire son petit business tranquille sans que les autorités de santé viennent y mettre le nez ? Je ne serais pas catégorique, mais ça y ressemble. Manifestement, la santé des jeunes et les autres problèmes que cela pourrait soulever ne sont pas son problème.
Le problème, c’est qu’on ne pousse pas des cris de vierge effarouchée quand on sort juste du tournage d’un gangbang sur Youporn. Ah, pardon, c’est un peu choquant ? Il se trouve qu’en français, il y a une expression pour cela “C’est l’hôpital qui se moque de la charité”.
Les casseroles de Imperial Brands
Une enquête du journal The Guardian, en 2018, dans 22 pays sur quatre continents, a montré que les géants du tabac s’arrangeaient pour exposer quotidiennement les jeunes à la cigarette, afin de recruter leurs futurs consommateurs.
Ainsi, cigarettes à l’unité à un tarif spécialement adapté à l’argent de poche côtoyaient bonbons et sucreries sur les étals d’échoppes toujours situées près d’écoles.
Les quatre compagnies accusés étaient Philip Morris International, British American Tobacco et Japan Tobacco International. Pardon, ça n’en fait que trois ? Ah, oui, désolé. Comment, ne me dites pas que la quatrième était… Pas Imperial Brands, quand même ? Mais si.
Plus gênant encore, une publicité pour Rizla, dans la rue et sur Facebook, en Angleterre, et montrant le papier dans un coffre-fort, jouant sur l’ambiguïté du terme “sûr”, pouvait être interprété par les jeunes comme une indication que le tabac ne représente pas de danger. Et qui est propriétaire de Rizla ?
Chose curieuse, quand il reproche à Juul de cibler les jeunes de façon agressive avec un produit addictif, Phillips ne fait à aucun moment allusion à ces histoires. On imagine que ces pratiques n’ont plus court chez eux, et que les Peter Stuyvesant, Gauloises, Gitanes, News et Fortuna ne contiennent pas d’ammoniaque pour accélérer l’addiction…
Nous ne sommes pas, au Vaping Post, de fervents défenseurs de Juul. Le fait que, lorsqu’on achète une Juul ou un paquet de Marlboro, l’argent finisse dans la même poche a tendance à refréner notre enthousiasme. Mais, quand on voit Impérial Brands se payer aussi ouvertement la tête du monde, il faut aussi savoir le dire.