La Fédération Interprofessionnelle de la Vape (FIVAPE) française et l’Association Britannique des Professionnels Indépendants de la Vape (IBVTA) annonçaient le 16 juin dernier la création d’une association regroupant les acteurs européens indépendants de la vape : l’ECIV (European Coalition for Independent Vape).
Nous avons profité du Global Forum on Nicotine pour nous entretenir avec Rémi Parola et Richard Hyslop, deux des protagonistes de la nouvelle coalition ECIV annoncée par un communiqué de presse quelques heures avant le début des conférences à Varsovie.
VapingPost : Pourriez vous nous dire quelques mots de l’IBVTA ?
Richard Hyslop : “Depuis quelques temps déjà, nous étions un certain nombre de professionnels de la vape indépendante au Royaume-Uni à vouloir travailler ensemble. Nous avons initié IBVTA à cinq, inspirés par le modèle de la Fivape et avons fondé l’association au mois d’avril. Ses fondateurs, [NDLR : parmi lesquels Totally Wicked, T-Juice] sont réputés pour leur engagement et leur expérience importante dans ce secteur.”
VP : Comment la coalition ECIV a-t-elle vu le jour ?
Rémi Parola : “Nous nous connaissons depuis longtemps avec Richard, la Fivape avait soutenu Totally Wicked à la Cour européenne de justice, projet dans lequel Richard était très impliqué. Au cours d’un dîner nous avons réalisé que le Royaume-Uni et la France rassemblent à elles deux la moitié des vapoteurs européens.”
“Nous avons été vraiment séduit par la création de l’IBVTA une sorte d’hommage à notre fédération, puisqu’eux aussi sont indépendants de l’industrie du tabac et de la pharmacie, l’affichent et l’exigent de leurs membres. Nous partageons la même vision de la nécessité d’une reglementation spécifique et de ne pas assimiler la vape aux produits du tabac ou aux médicaments”.
“Nous ne pouvions pas nous associer avec une société, mais avec une fédération oui, alors nous nous sommes lancés pour former ensemble le noyau d’une coalition européenne”
Moins de 48 heures après l’annonce publique nous avons déjà des retours positifs de toute l’Europe.
“Nous avons eu l’impression parfois de prêcher un peu dans le désert à la Fivape, mais les résultats obtenus auprès des pouvoirs publics, de la normalisation, la présidence du CEN et de l’ISO dernièrement ont convaincu, notamment les fondateurs de l’IBVTA, de se réunir en association et d’afficher clairement leur indépendance.”
“Partager cette même vision c’est important pour nous, notamment vis à vis de stratégies qui veulent confondre les produits à nocivité réduite ou les nouveaux produits du tabac en les mettant dans un même panier que celui de la vape. A nous d’affirmer que c’est “strictly vape, vapor products” que nous n’avons aucun rapport avec la production ou de la distribution des produits du tabac ou de médicament.”
VP : Quels sont vos objectifs avec l’ECIV ?
RP : “Notre objectif est de construire une coalition la plus forte possible pour agir sur le plan européen, mais nous allons garder nos actions au niveau national et en réalité appartenir à une coalition européenne va nous aider dans nos pays respectifs.”
RH : Une petite entreprise a tout à gagner à participer à une coalition européenne. Les gouvernements ne veulent pas parler à une entreprise ou une personne en particulier mais ils sont prêts à recevoir une association de professionnels ou de particuliers. C’est la même chose au niveau européen, si je me présente comme une association anglaise, les eurodéputés britanniques voudront bien me recevoir, mais pas les français qui me diront que je n’ai pas à leur dire ce qu’ils ont à faire. Avec une association européenne nous avons accès à tous les eurodéputés de tous les pays et aussi à la commission.
VP : L’ECIV a-t-elle déjà des projets concrets ?
RP : “A titre d’exemple d’action concrète, la coalition va travailler dans les prochaines semaines sur les transpositions de la directive européenne. Nous allons regarder pour chaque point de la directive, quel pays en a fait la moins mauvaise transposition. L’idée est de faire au final un projet de transposition unique qui puisse nous permettre à chacun de faire des propositions dans nos pays respectifs.”
VP : N’est-il pas trop tard pour agir au niveau européen ?
RH : “Beaucoup de gens pensent que c’est trop tard, mais en réalité c’est loin d’être fini. Il y a eu une réunion du comité ENVI il y a deux mois environ avec le nouveau commissaire, et bien malgré si vous avez suivi, vous avez remarqué que malgré toute l’information disponible il affirme encore que la vape c’est mauvais, comme la majorité des eurodéputés.”
“Il faut continuer de faire avancer le débat, c’est un processus d’éducation des eurodéputés et de la commission qu’il faut engager. Parallèlement à ce travail de terrain, nous devons préparer un modèle de directive tout prêt qu’on pourra poser sur la table lorsque le débat s’ouvrira de nouveau. Pour l’instant, nous préparons le travail, nous posons les bases.”
RH : “On va pousser pour que la révision de la directive en ce qui concerne les produits de la vape se produise le plus vite possible, les transpositions varient beaucoup selon les pays et pour certains la situation est très difficile. Nous voulons montrer l’incohérence de la situation où un même texte permet d’arriver à des situations tout à fait différentes voire opposées.”
RP : “Nous voulons une réglementation responsable et proportionnée, pas la jungle. C’est incroyable qu’un même texte ait pu amener à autant de situations aussi différentes.”
VP : Comment l’ECIV va-t-elle contribuer à renforcer la vape indépendante ?
RP : “Rationaliser ! Si demain des scientifiques de sociétés localisées en France ou au Royaume-Uni et après-demain dans d’autres pays, peuvent mieux travailler ensemble en évitant de dupliquer les choses, je crois que ce sera décisif, pour la production et aussi pour la recherche scientifique.”
“Si nous continuons à travailler avec des universités, ce serait dommage que l’Université de Liverpool travaille sur les mêmes sujets que l’Université de Bordeaux sans le savoir. On peut créer une bonne coopération au niveau européen.”
“La science a besoin de financement aussi. C’est encore tôt, mais je pense qu’il y aura des initiatives pour financer ou créer des projets de recherche.”
“Si nous travaillons ensemble d’une façon collaborative, nous aurons un comité scientifique, un comité réglementaire. Nous n’aurons jamais les ressources de l’industrie du tabac, mais nous disposons de nombreuses compétences. Si chacun d’entre nous reste dans son coin, nous n’aurons pas de grands moyens mais en nous unissant et en collaborant nous les aurons.”
“Le challenge pour cette coalition, c’est d’expliquer à chaque société indépendante qu’elle a un intérêt très fort à participer à ce que nous faisons parce que c’est leur futur qui se joue. Si nous ne voulons pas d’un copier/coller de la réglementation sur le tabac ou sur les médicaments il faut que soyons les meilleurs dans l’expertise de nos produits.”
Une innovation qui nous dépasse mais que l’on cherche à maîtriser du mieux possible, qu’on porte et qu’on développe.
“Nous avons l’ambition d’être un secteur d’activité à part entière qui sera probablement différent des modèles qu’on a voulu nous imposer, que la directive européenne a voulu nous imposer, que la FDA cherche à imposer ou encore que l’OMS veut imposer. Nous portons une innovation qui nous dépasse mais que nous cherchons à maîtriser du mieux possible.”
“Proposer ces produits avec la diversité de choix, des matériels, des liquides, faire en sorte qu’ils soient sûrs, tout ça c’est notre responsabilité et si nous perdons cette bataille, ça aura un impact direct sur les usages et les choix des utilisateurs.”