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Commission européenne : les cigarettiers trichent, la vape sera punie

Mis à jour le 19/04/2023 à 14h15
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Les commissaires européens sont fâchés tout rouge : l’industrie du tabac, expliquent-ils, met en place des mesures anti TPD qui ressemblent fort à de la triche. De surcroît, les dispositifs de tabac chauffé apportent une nouvelle problématique. Hélas, comme d’habitude, les Commissaires européens posent les bonnes questions et y apportent une réponse totalement imbécile.

 

Le mal

L’industrie du tabac a abordé la TPD comme un défi. 

Vytenis Andriukaitis, Commissaire européen chargé de la santé et de la sécurité alimentaire, l’affirme haut et fort, s’appuyant sur un rapport de la Commission Européenne rendu le 23 novembre : l’industrie du tabac a pris comme un défi la directive européenne de 2016, dite TPD, et a mis toute son énergie à trouver des solutions.

Les paquets par exemple sont rangés horizontalement pour ne pas laisser voir les messages d’avertissement. 

Par exemple, pour contourner la règle des 65 % de l’emballage qui doit être recouvert par des pictogrammes et messages d’avertissement, les paquets, dans de nombreux pays, sont désormais rangés horizontalement dans les rayons, pour laisser en évidence la tranche où seule la marque est visible. De plus, un cache-paquet est de plus en plus souvent offert gracieusement au client, qui permet de dissimuler les messages décourageant à fumer.

Suivez mes traces

La traçabilité des produits concernés par la TPD est surtout nocive à la vape. 

Autre contournement, la traçabilité. Celle-ci implique que chaque acteur de la chaîne, de la production à la distribution, doit obtenir une autorisation avant qu’un produit soit disponible sur le marché. Et tout les réactions sont unanimes : cette disposition ajoute un monceau de paperasse et de démarches complexe, particulièrement nuisible aux petits acteurs.

Par petits acteurs, entendez surtout la vape, qui est comprise dans la TPD sans distinguo. Parce que les cigarettiers, affirme la commission, non seulement ont les moyens de réaliser ces démarches, mais en plus, s’en dispensent allègrement, grâce au lobbyisme dans certains états réceptifs.

Le trafic de cigarettes bat son plein. 

Ceci, dans le but de ne pas freiner le trafic de cigarettes, qui représente une part non négligeable de leur chiffre d’affaires, en baisse dans les circuits « normaux ».

Un protocole avait été mis en place en 2012 par l’OMS sur le trafic de produits du tabac, sur lequel s’appuie la Commission. Le problème, c’est que tous les états-membres de l’UE ne l’ont pas ratifié, parmi lesquels des poids lourds comme l’Allemagne et l’Italie, par lesquels transitent nombre de cigarettes de contrebande.

Et le remède, selon la commission

Le tabac chauffé électroniquement pose un nouveau problème. 

La commission souligne enfin l’émergence des dispositifs de tabac chauffé électroniquement, qui apparaît contre un contournement supplémentaire, en affirmant l’innocuité, loin d’être démontrée, de ces dispositifs.

L’analyse de la Commission européenne, basée sur ses propres analyses menées dans les états membres, semble correcte, et nous ne pouvons qu’acquiescer. C’est sur le remède que le doute s’installe vraiment.

Pour répondre à cela, des mesures restrictives seront prises contre la vape. 

En effet, Vytenis Andriukaitis annonce que des mesures plus restrictives seront prises contre les appareils à tabac chauffé, avant de préciser sa pensée et d’expliquer que la cigarette électronique fera l’objet de mesures plus sévères, comme l’interdiction de publicité et de vente sur internet. Ce faisant, il fait d’une pierre deux coups : assimiler la vape et le tabac chauffé, qui est ce que les cigarettiers désirent sans doute le plus au monde, et éviter soigneusement de répondre aux autres problèmes, et donc de contrarier l’Allemagne.

La conclusion de tout ceci est finalement assez simple, et dans le plus pur style de la Commission européenne : l’industrie du tabac triche, il faut punir la vape.

Même s’il faut attendre de voir la concrétisation de ce projet, on peut affirmer sans trop prendre de risque deux choses : la Commission européenne n’a toujours rien compris à la vape, et les eurosceptiques ont de beaux jours devant eux.

L'analyse de Philippe Poirson :
Nos deux lectures ne sont pas totalement contradictoires. Mais je pense que V. Andriukaitis propose une sorte de deal à l’industrie du tabac en rebondissant sur ce qui se passe en Italie ces derniers jours : à savoir un amendement pour la mise sous monopole de la vape, c’est à dire la vente en bureau de tabac ou commerces agréés (mais les conditions d’autorisation ne sont pas encore fixées) et interdiction de vente en ligne, couplée à une super taxe (3,7€ pour 10 ml).

Dans l’interview Andriukaitis reprend pour ainsi dire ce projet italien à son compte pour l’UE. Derrière cette opération en Italie, il est assez clair que c’est Philip Morris, et les buralistes évidemment, aux manettes.

Donc ma lecture c’est que Andriukaitis dit aux cigarettiers, laissez nous implémenter le système de tracking, on l’utilisera pour interdire les ventes internet de vape indépendante et en conséquence vous livrer le marché du vapotage et tabac chauffé (qui pour lui sont de toute façon un peu les même “trucs électroniques”).

J’ai essayé d’expliquer ça hier dans mon article sur l’Italie. Ta manière d’exposer les choses fais moins intervenir des suppositions sur les intérêts en coulisses. Mais disons, que je crois que cet interview d’Andriukaitis est plus tactique qu’à visée informative pour le public.

Le lien vers le Billet de Philippe Poirson