La police, ce n’est pas uniquement des hommes en uniforme qui distribuent des PV sur les bords des routes nationales, ni un groupe de reggae déguisé en punks. C’est un ensemble de métiers, confrontés à une quantité incroyables d’histoires. Serge Reynaud nous en raconte quelques-unes dans « Sous les PV, la page !» sorti ce 29 janvier. Interview.
Vous avez demandé la police, ne quittez pas
Encore un livre sur la police ? Oui, mais là, pas de super flic qu’on ne voit qu’à la télé ou quand on a de très, très gros problèmes. C’est de la police de terrain dont nous parle Serge Reynaud, les femmes et hommes en uniforme qu’on croise dans la rue et qui veillent sur l’ordre public. Et pour cause : « Serge Reynaud est un pseudo, je suis ancien policier, à la retraite depuis 2020. Durant 38 ans, j’ai été, d’abord gendarme, puis policier en tenue dans diverses spécialités ».
![](https://fr.vapingpost.com/wp-content/uploads/2025/01/Serge-Reynaud-350x346.jpg)
Serge Reynaud
Retraite bien occupée, puisqu’il publie, sur sa page Facebook, ses (més)aventures dans la rénovation de sa maison. « Je suis cévenol depuis ma retraite. C’est une région que j’aime beaucoup, où j’allais régulièrement en vacances, et j’ai fini par y trouver la maison de mes rêves. Après consultation de moi par moi, à l’unanimité, j’ai décidé que je deviendrai cévenol, même si je suis né en Bretagne. Je rénove la maison, mais je suis un bricoleur déplorable et optimiste ».
Serge a déjà édité deux livres, il y a quelques années : « Chroniques de la main courante » et « Bonne nouvelle, c’est la police !». « C’est mon troisième livre en 14 ans. Le premier, je l’ai fait parce que mon but, c’était d’avoir un livre édité. Une fois atteint mon but, il me restait des histoires, alors j’ai fait le deuxième dans la foulée. Et puis après ça, il ne me restait plus d’histoires, et je ne voulais pas faire de la fiction. Alors, j’ai continué à vivre et à écrire ».
(Parenthèse « conflit d’intérêt », avant de poursuivre : votre serviteur interviewer est fan de Serge depuis que ce dernier tenait un blog, bien avant sa publication en volume, et nous avons même co-signé une histoire dans le premier livre de votre susnommé serviteur. Vous voilà prévenus).
Ce qui donne un troisième livre. « Une fois à la retraite, j’ai réuni tous mes textes, j’en ai rajoutés, j’en ai fait un manuscrit et j’ai trouvé un éditeur. J’en suis content, parce que la petite satisfaction d’ego du premier bouquin est passée, là c’est plus du plaisir ».
Mains en l’air, jetez ce marque-pages !
Mais du coup, on va y trouver quoi, dans ce livre ? « Il n’y aura aucune histoire reprise des précédents livres. Dans les premiers, beaucoup des histoires étaient arrivées à des collègues. Là, ce sont des choses qui me sont personnellement arrivées, à 90 %. J’ai intégré pas mal d’histoires vécues quand j’étais missionné par l’État français à l’étranger, en Afrique et en Bosnie, notamment ».
Ce qu’il faut signaler à propos de Serge, c’est qu’il écrit bien, et, quand il veut être drôle, met tout dans la cible. « Sur celui-ci, il y a une petite évolution de style. Et oui, l’humour est obligatoire, je ne vais pas renier Desproges, mais il y a des histoires plus mélancoliques. Une en particulier où je descends l’attitude d’un supérieur lors du suicide d’un collègue, avant de le réhabiliter deux histoires plus loin. Parce qu’il ne faut pas tirer de conclusions avant de connaître les faits, tous les faits et rien que les faits ».
Tout cela est très humain… « Il y a aussi des histoires de chiens. Policiers, évidemment. Parce que tout comme moi, les gens aiment bien les chiens. Mais je n’ai pas voulu faire un livre de blagounettes : il y a de l’humour, et il y a des histoires tristes ».
Et, précisons, ce n’est pas un livre de policier qui raconte avec autant de style qu’un rapport tapé à deux doigts, c’est le livre d’un amoureux de littérature qui a un vrai style. D’un écrivain, osons le mot. Qui, comme tout écrivain, a ses influences.
Portrait-robot de l’écrivain
« J’ai beaucoup d’influences, en premier lieu, mes souvenirs de plaisir de lecture des novellistes américains, en particulier dans le polar. Beaucoup d’auteurs de la collection Alfred Hitchcock présente, même s’il y a des choses parfois très bof, il y en a d’autres qui sont des pépites de style. C’est parfois comme Stephen King qui écrirait une histoire de moins de 20 pages ».
(Alors, parenthèse culture générale : les auteurs de la collection Alfred Hitchock Présente n’existent pas la plupart du temps, ce sont des pseudonymes. Mais sous ces noms bidons se cachent quelques grands écrivains de leur époque, qui se servaient de ce relatif anonymat pour écrire des histoires différentes de leur style habituel, ceci explique cela).
Dans l’écriture, Serge Reynaud est un adepte de la forme courte. « Dans mon livre, les chapitres, il y en a 100, font 1 à 8 pages. Ça évite de laisser du gras ».
Le titre est amusant. « Oui, il fait partie d’une sélection de titres que j’avais proposés à l’éditeur. Sous les PV, la page, parce que j’étais pas mauvais en procédure. Le livre est basé sur des faits, mais on efface tout et au-dessus, on écrit ».
Mais est-ce un livre didactique ? « Oui, quelqu’un qui lit le livre apprendra quelques choses sur la police, mais il y a très peu de notes en bas de pages. Je voulais que les gens comprennent la beauté et la difficulté de ce boulot. Il est basé sur la procédure, il y a peu d’histoires d’interpellation. Et ce n’est pas un livre pro-police, comme on dit chez les apiculteurs ».
Vous savez pourquoi je vous écris ?
« C’est un livre basé sur l’humain, pour que les gens comprennent nos déceptions, mais aussi pourquoi elles ne nous empêchent pas le lendemain de nous lever pour aller au boulot. Pour beaucoup, c’est une vocation. Certains ont trouvé leur voie dans la police-secours, d’autres dans la scientifique, ou en tant que maître-chien… Le service public, ça devrait être ça tout le temps, des gens avec des vocations ».
Et demain ? De la fiction peut-être ? « Je n’ai rien contre écrire de la fiction, j’ai plusieurs choses qui attendent dans mes fichiers. Je commence, je m’arrête, parfois je reprends, à un moment je trouve la voie qui conduit à de longues séances d’écriture où on oublie tout le reste. Mais je ne m’astreins à rien, l’écriture est un plaisir, il ne faut pas que ça devienne une corvée ».
Et la question Vaping Post, que pense Serge Reynaud de la vape ? « À titre personnel, je ne suis pas convaincu, je n’ai pas eu l’occasion de l’être, je suis un ex-fumeur qui a arrêté à l’ancienne. Par contre, dans les couloirs de commissariats, j’ai vu des gros costauds virils qui ont adopté la vape, et j’ai constaté que ça marchait. Du coup, dans les vestiaires, ça puait la cannelle et la framboise, mais moi ça m’allait, je préfère ça à la Marlboro froide ».
“Sous les PV, la page !” de Serge Reynaud, City éditions, 285 pages, 17,90 euros, dans toutes les bonnes librairies.