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Tout savoir sur les sels de nicotine

Mis à jour le 27/12/2023 à 20h01
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Les sels de nicotine sont un sujet à la fois marginal et majeur, ce paradoxe vient du fait qu’ils feront parler beaucoup plus de personnes qu’ils n’en concernent. Ici, nous tentons de faire la synthèse sur le sujet, ses effets et ses risques éventuels. Point complet de l’état des connaissances sur la “salted nicotine”.

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Bien choisir son taux de nicotine est primordial pour réussir à se sevrer du tabac avec la cigarette électronique. Nous vous proposons une version électronique d’un questionnaire scientifiquement validé pour connaître les taux de nicotine utilisés par des fumeurs ayant le même profil que vous, et qui ont réussi à arrêter la cigarette grâce au vaping.

Je passe le test

Sels de nicotine

Il y a nicotine et nicotine

Les sels de nicotine sont assez mal nommés : ils apparaissent en effet non pas sous forme de cristaux, mais sous forme de liquide. L’appellation “sels” vient tout simplement du fait qu’il s’agit d’un alcaloïde, c’est-à-dire d’une molécule à base azotée qui, dans sa forme aboutie, forme des sels amers. C’est du moins ce que nous explique la chimie, puisqu’en pratique, une telle forme est inutile et ne connaît donc pas d’application de masse.

Pour présenter les choses simplement : les sels de nicotine sont la forme de nicotine la plus proche de celle qu’on trouve à l’état naturel. La nicotine utilisée dans les e-liquides pour la vape est une nicotine purifiée, parfois appelée free-base. Il s’agit d’une nicotine traitée en deux temps. Elle subit tout d’abord un traitement chimique calibré pour une extraction à haut rendement, afin d’extraire le maximum d’un plante. Ensuite, une épuration.

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Je fais le test

En effet, la nicotine extraite est, dans la majorité des cas, la même que celle utilisée dans les bases insecticides. Fortement concentrée en produits d’extraction, elle doit donc être purifiée pour être rendue apte à l’inhalation humaine. C’est ce qu’on appelle la nicotine de qualité pharmaceutique, à savoir celle proposant le plus petit degré possible d’éléments extérieurs.

Boires et déboires de la nicotine

Si ces processus successifs ont pour mérite de proposer une nicotine d’une grande pureté et totalement sûre pour la consommation sous forme de vapotage, ils dénaturent le produit, ce qui a plusieurs effets. La nicotine devient plus instable et se dégrade. Si cela ne change pas sa nature – il n’y a par exemple aucun risque de métamorphose en un composé toxique –, ce processus affecte ses effets. Plus la nicotine est ancienne et mal stockée, moins elle sera efficace sur les récepteurs du cerveau.

La nicotine extraite par la combustion d’une cigarette est plus proche de sa forme originale que la nicotine purifiée contenue dans les e-cigarettes.

C’est un réel problème, parce que la nicotine purifiée utilisée aujourd’hui dans la vape est beaucoup moins efficace qu’à l’état naturel. On a tendance à résumer cette efficacité comparée avec la règle des deux 10 : il faut 10 minutes de vapotage pour obtenir le même effet qu’avec 10 secondes de tabac, du point de vue de la stricte satisfaction des récepteurs dédiés dans le cerveau.

La nicotine extraite par la combustion d’une cigarette est plus proche de sa forme originale que la nicotine purifiée contenue dans les e-cigarettes. Bien entendu, le problème de santé que pose le tabac ne se situe pas au niveau de la nicotine, mais des substances chimiques induites par la combustion que le fumeur inhale en même temps.

Une seule solution, donc, pour les personnes en sevrage tabagique : augmenter la dose de nicotine contenue dans l’e-liquide. Se pose alors un autre problème, qui est celui de l’irritation des voies respiratoires, particulièrement la gorge, par la nicotine purifiée. Quoique non dangereuse en elle-même, cette irritation peut causer toux et douleurs qui rendront l’expérience désagréable.

Les sels de nicotine à la rescousse

Les sels de nicotine, de par leur proximité avec la nicotine naturelle, sont plus stables que la nicotine purifiée. C’est leur premier avantage : ils sont plus résistants et donc plus indulgents sur la qualité de leur entreposage.

Leur particularité est d’être surtout plus doux à vapoter. Les sels de nicotine ne sont pas aussi irritants que la nicotine purifiée. Cela en fait l’outil idéal pour celles et ceux, souvent primo vapoteurs, qui ont besoin d’un fort dosage de nicotine mais chez qui cela provoque des quintes de toux.

Les sels de nicotine, de par leur proximité avec la nicotine naturelle, sont plus stables que la nicotine purifiée.

Ainsi, un membre de la rédaction a fait tester un e-liquide à base de sels de nicotine à un proche, qui a besoin d’un liquide fortement dosé, mais qui tousse dès 6 mg/ml de nicotine purifiée. Avec des sels de nicotine à 20 mg, aucun souci. Le vapoteur a pu prendre sa dose sans en subir de conséquences.

D’autres nous ont confié avoir testé, aux États-Unis, où la législation est infiniment plus souple sur les dosages, des liquides aux sels de nicotine dosés aux alentours de 50 mg/ml. Là encore, aucun souci d’irritation ou de toux. En revanche, les pauvres testeurs peu habitués à une telle dose ont eu la tête qui tournait.

Le liquide à base de sels de nicotine est-il la solution miracle pour les primo accédants ? Peut-être, pour certains dont les muqueuses ne supportent pas la nicotine. Non, pour celles et ceux chez qui le “throat hit” (hit de gorge) est important. On sait depuis quelques années maintenant que cette contraction de la gorge lors du passage de la nicotine est essentielle dans le processus de sevrage de certaines personnes. Ceux-là ne trouveront pas leur compte avec les sels de nicotine.

Les disponibles, et ceux qui arrivent

L’élan a été donné par une société américaine, Pax Labs Inc., qui commercialise Juul, un système de vaporisateur complet, incluant une batterie et des cartouches scellées utilisant les sels de nicotine. L’entreprise promettait de faciliter la transition de la cigarette tabacologique à la vape.

Les leaders dans le domaine de la nicotine sont à chercher dans l’industrie du tabac, qui étudie depuis des dizaines d’années toutes les formes et propriétés de la nicotine.

Notons que Juul n’a pas été pionnier sur les sels de nicotine. Encore une fois, les leaders en ce domaine sont à chercher dans l’industrie du tabac, qui étudie depuis des dizaines d’années toutes les formes et propriétés de la nicotine. Le produit pionnier est Steem, issu du rachat par Philip Morris d’un brevet datant de 2011. Mais le buzz commercial est à porter au crédit de Pax Labs Inc. C’est donc, encore une fois, la vape qui est venue changer le jeu.

Le succès commercial de Juul a été très important, et de nombreuses sociétés se sont ruées dans le créneau des sels de nicotine, en lançant soit des produits propriétaires, soit en se cantonnant à la simple création de nicotine pour e-liquide.

Vers une généralisation des e-liquides au sels de nicotine ?

Néanmoins, il ne faut pas s’attendre à une généralisation des sels de nicotine dans les prochaines années : tout le monde semble s’accorder sur le fait qu’il s’agit d’un marché de niche, qui peut, certes, atteindre une taille conséquente et lucrative, mais qui ne concernera pas la majorité des vapoteurs.

Tout d’abord, parce que le hit est quasi absent des liquides à base de sels de nicotine. Pas totalement absent, mais très atténué, pour les liquides dans les normes européennes limitées à 20 mg/ml. Or, comme nous le signalions plus haut, de nombreux spécialistes du sevrage au cours des dernières années ont réalisé, avec le vapotage, l’importance que le hit de gorge avait chez certains fumeurs pour pouvoir passer à un produit de substitution.

L’usage des sels de nicotine sera à proscrire pour tous ceux qui utilisent un matériel puissant.

Le mécanisme est sans doute purement psychologique, mais peu importe : ça marche. Ceux-là ne seront, donc, pas concernés par les sels de nicotine, qui ne leur apporteront pas de satisfaction de ce côté-là.

L’usage des sels de nicotine sera également à proscrire pour tous ceux qui utilisent un matériel puissant, le surdosage pouvant rapidement être atteint sans le signal d’alarme en gorge. Les matériels puissants ayant tendance à se développer sur le marché, cela prive les sels de nicotine d’un marché important.

Et puis, il y a l’argument des arguments, le prix. Les sels de nicotine coûtent plus cher à produire que la nicotine purifiée classique, et donc, reviennent plus cher à l’achat. Certes, l’efficacité du produit compense une partie de ce surcoût, mais cette dépense supplémentaire se ressentira tout de même.

La production de masse permettra certainement de baisser ces coûts de revient, mais pas d’amener les sels de nicotine au niveau tarifaire de la nicotine purifiée classique. Même si la différence, au final, est minime, un vapoteur qui n’a pas de besoins spécifiques que les sels de nicotine peuvent satisfaire, orientera certainement son choix vers un liquide sur base plus classique.

Qu’en pensent les spécialistes ?

L’avis de Jacques Le Houezec, tabacologue.

Tout d’abord, un liquide à vaper à base de sels de nicotine ça n’est guère différent d’un liquide à base de nicotine base (que les anglo-saxons appellent “freebase nicotine”). La nicotine liquide est une base faible (au sens chimique du terme) avec un pH alcalin. Les sels de nicotine (à l’origine sous forme cristallisée) dilués dans le mélange PG/VG vont donner un liquide plus acide. Mais la nicotine reste de la nicotine ! Elle sera absorbée de façon similaire au niveau des poumons.

Pourquoi utiliser des sels de nicotine ? Simplement parce que la vapeur obtenue avec un liquide aux sels de nicotine va produire moins d’irritation dans la gorge (le fameux “hit”). Le fumeur, comme le vapoteur, sait doser la nicotine qu’il absorbe (phénomène de titration). Cela permettra au fumeur, vapoteur débutant, d’être moins irrité et donc d’inhaler plus aisément une vapeur bien dosée en nicotine afin de combler plus facilement son besoin.

Cette innovation permettra sans doute aux gros fumeurs (pour qui la limite des 20 mg/ml est insuffisante), ou à ceux qui ont les voies respiratoires très irritées, de supporter un plus fort dosage et donc de pouvoir plus facilement arrêter de fumer.

Les spécialistes de la nicotine que nous avons interrogés ont, d’une manière générale, la même attitude : un intérêt réel pour le produit atténué par une certaine circonspection.

Les sels de nicotine présentent un potentiel certain dans la réduction de consommation.

Par exemple, le docteur Konstantinos Farsalinos, qui souligne que “les sels de nicotine présentent un potentiel certain dans la réduction de consommation. Un vapoteur aura besoin d’en absorber moins pour atteindre son niveau de satisfaction, avec un hit en gorge plus doux. Ils ont un potentiel incroyable pour la délivrance rapide de nicotine.”

Mais le spécialiste modère son enthousiasme : “Je serai heureux de tester ces produits s’ils sont fabriqués par l’industrie du tabac, parce que je sais qu’ils auront fait des recherches intensives dessus, recherches que ne mènent pas forcément les petites sociétés indépendantes qui commencent à en fabriquer.”

Surprenant ? Pas vraiment quand le docteur Farsalinos explique que “le problème vient des acides qui sont utilisés pour l’extraction de ces sels de nicotine. Certains sont impropres à la consommation humaine, et quelques-uns d’entre eux peuvent même attaquer les tanks en métal. Les petites compagnies vont-elles les tester contre la corrosion ? Je parierais que non.”

Konstantinos Farsalinos ne ferme pas la porte, mais, dit-il, “je ne testerai pas les produits de compagnies indépendantes tant qu’elles n’auront pas publié des tests de laboratoires agréés.”

L’avis de Sébastien Roux, directeur de Crivape*.Nous ne sommes ni pour, ni contre l’usage des sels de nicotine dans les e-liquides pour cigarettes électroniques. Le code de la santé précise un peu les chose, et du côté Crivape nous n’avons à ce jour pas assez d’éléments factuels scientifiques (au delà du pH, de la CLP des différents acides utilisés, des normes XP AFNOR …) pour affirmer sans ambiguïté que c’est un produit génial sans risque et sans addiction qui permet d’accompagner certains fumeurs en échec. Nous avons mis en place une étude clinique (en cours) qui permettra d’ici la fin de l’année de produire les premières données sur l’assimilation de ce produit au regard de la connaissance que nous venons d’avoir sur la free nicotine.

(*Crivape – Centre de recherche et d’innovation pour la vape.)

Au pinacle ou aux gémonies ?

Le même son de cloche s’est fait entendre un peu partout, que l’on peut résumer ainsi : “C’est une excellente idée, on attend de voir si elle sera correctement réalisée”.

Il existe un certain nombre de zones d’ombre, et il est du droit des consommateurs d’exiger leur éclairage.

Comprenons-nous bien : il n’est pas question ici de donner une quelconque bénédiction ou au contraire de dresser un bûcher pour les sels de nicotine. Nous l’avons vu, le produit en lui-même peut apporter une solution pour certains vapoteurs qui ne trouvent pas satisfaction dans la nicotine purifiée traditionnelle et, si cela aide à les maintenir loin de la cigarette de tabac, c’est une bonne chose.

En revanche, il existe un certain nombre de zones d’ombre, et il est du droit des consommateurs d’exiger leur éclairage avant de se lancer dans la consommation du produit.

Première zone d’ombre, donc, les produits utilisés pour la fabrication. Produire des tests démontrant l’innocuité de son processus de fabrication devrait être une étape évidente pour chaque fabricant.

Effectivement, il existe de nombreux processus d’extraction des sels de nicotine. Et certains fabricants, lorsqu’ils mettent le leur au point, déposent un brevet pour le protéger ou gardent, dans tous les cas, leur recette bien cachée. C’est le cas, de Juul et de tous ceux qui arrivent.

Ce qui laisse, dans cette situation, deux hypothèses : soit les compagnies désireuses de fabriquer leurs e-liquides à base de sels de nicotine achèteront cette base à quelques producteurs institutionnels. C’est une possibilité, c’est ce qui se passe avec la nicotine purifiée. Soit chacun voudra produire ses propres sels de nicotine. Quand toutes les méthodes d’extraction saines seront déposées, alors il restera les méthodes d’extraction à base de produits dangereux. Certains seront peut-être tentés de franchir le Rubicon.

Deuxième zone d’ombre, l’information faite aux consommateurs. Il va s’avérer très vite important d’informer le consommateur sur le fait qu’il est en train de vaper des sels de nicotine et leur grammage. Parce qu’on imagine les dégâts sur un utilisateur distrait qui penserait vaper de la nicotine purifiée en 1,5 mg, au jugé, et qui absorberait un liquide en 20 mg de sels sur un dripper à 100 W… Rien de létal, mais un usager secoué.

D’autres questions vont certainement venir s’ajouter à cette liste. Peu importe, finalement : comme vous pourrez le juger d’après les déclarations des sociétés qui ont répondu à nos questions, leur maîtrise du processus est aujourd’hui totale. Ils n’auront donc aucune difficulté à apporter à l’utilisateur l’éclairage auquel il a légitimement le droit.

Vers une nicotine qui “arrache” ?

Les sels de nicotine atteindront alors pleinement le statut qui devrait être le leur, non pas un produit de révolution, mais un complément utile et efficace à l’arsenal de la vape pour le sevrage tabagique.

Finalement il faudrait peut-être aussi que les fabricants se mettent à produire de la nicotine à l’opposé : une nicotine au hit extrêmement fort pour justement calmer les vapoteurs à gros débit. Je vape toujours du 3 mg mais ça m’arrache la gorge, donc je vape moins. Sels de nicotine pour commencer, nicotine normale en milieu de sevrage, et nicotine forte en hit pour arrêter de vaper ou vaper moins.

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