La cigarette électronique au Portugal
Un quart de fumeurs
Les données récentes manquent au sujet du taux de prévalence tabagique au Portugal. Les dernières remontent à l’année 2019 et faisaient état d’un nombre de fumeurs d’environ 25,4 %. Un chiffre qui augmente légèrement chaque année puisqu’il était de 25 % en 2010.
Des taxes en plus de la TPD
Comme tous les pays faisant partie de l’Union européenne, le Portugal réglemente la cigarette électronique en vertu de la TPD. Le vapotage est ainsi interdit dans les lieux où il n’est pas autorisé de fumer.
Le Portugal a tout de même fait le choix d’aller plus loin en instaurant une taxe de 30 centimes d’euros par millilitre d’e-liquide. Ce taux est parmi les plus hauts d’Europe.
Nos derniers articles sur le Portugal
Consultez ci-dessous tous les articles de notre rédaction au sujet du vaping au Portugal.
Le Portugal : une situation contrastée en matière de lutte contre le tabagisme
Le Portugal présente un tableau complexe dans le domaine de la lutte contre le tabagisme. Alors que le pays affiche une volonté politique de réduire la consommation de tabac avec l’objectif ambitieux d’une génération sans tabac d’ici 2040, les résultats actuels demeurent modestes et la stratégie adoptée vis-à-vis de la cigarette électronique soulève des interrogations.
Une stagnation préoccupante du taux de tabagisme
Les chiffres du tabagisme au Portugal révèlent une évolution particulièrement lente. En 2022, environ 20,9% de la population portugaise consommait du tabac, avec une disparité marquée entre les hommes (27,1%) et les femmes (15,5%). Ce qui frappe le plus, c’est la faible diminution observée sur près de deux décennies : la prévalence était déjà de 20,9% en 2005-2006, est passée à 20% en 2014, puis à 19% en 2019.
Cette quasi-stagnation contraste fortement avec les résultats obtenus dans d’autres pays européens. Alors que le Royaume-Uni, la Suède ou le Canada ont vu leurs taux de tabagisme chuter de près de moitié entre 2000 et 2020, le Portugal peine à faire reculer significativement la consommation de tabac. Cette situation place le pays dans une position délicate au sein de l’Union européenne, où la moyenne du taux de fumeurs s’établit à 24%.
Malgré ces chiffres décevants, le Portugal a néanmoins enregistré une baisse de 45% de la consommation de cigarettes par habitant depuis 2002, témoignant d’une certaine évolution des comportements. En 2022, on estimait qu’environ 1,9 million de personnes âgées de 15 ans et plus utilisaient des produits du tabac dans le pays.
Un objectif ambitieux : une génération sans tabac d’ici 2040
Face à cette situation, le gouvernement portugais a fixé un objectif ambitieux : parvenir à une génération sans tabac d’ici 2040. Pour y parvenir, plusieurs mesures législatives ont été adoptées ou sont en cours de déploiement.
La loi sur le tabac, entrée en vigueur en 2007, a instauré les premières interdictions de fumer dans certains lieux publics fermés. Cette législation a été renforcée en 2015 avec des restrictions plus strictes dans les restaurants et les bars. Plus récemment, en 2023, le gouvernement a proposé de nouvelles mesures visant à interdire la vente de cigarettes dans les distributeurs automatiques à proximité des établissements scolaires d’ici 2025, ainsi que l’interdiction de fumer dans les espaces extérieurs situés à proximité des bâtiments publics tels que les écoles et les hôpitaux.
Cependant, ces mesures sont jugées insuffisantes par de nombreux observateurs. Le maintien des distributeurs automatiques dans les aéroports et les gares, ainsi que la possibilité pour certains établissements de conserver des espaces fumeurs jusqu’en 2030, témoignent d’une approche jugée trop timide par rapport à l’ambition affichée.
Une taxation parmi les plus élevées d’Europe
Le Portugal a fait le choix d’une politique fiscale stricte envers les produits du tabac et, de manière plus controversée, envers la cigarette électronique. En 2024, le prix d’un paquet de cigarettes au Portugal se situe autour de 4,60 euros, un montant qui reste relativement modeste comparé à d’autres pays européens, bien que les autorités aient progressivement augmenté les taxes ces dernières années.
Une approche restrictive vis-à-vis de la cigarette électronique
C’est sans doute dans sa politique concernant la cigarette électronique que le Portugal se distingue le plus au sein de l’Union européenne. Le pays a adopté une approche particulièrement restrictive, considérant le vapotage comme équivalent au tabagisme traditionnel, contrairement à d’autres nations qui y voient un outil de réduction des risques.
Cette position s’est traduite par l’instauration, dès 2016, d’une taxe sur les e-liquides nicotinés initialement fixée à 60 centimes d’euro par millilitre, l’une des plus élevées d’Europe. Face aux critiques et à l’effondrement des ventes qui s’en est suivi, cette taxe a été réduite de moitié en 2017, passant à 30 centimes par millilitre. Malgré cette correction, la taxation reste parmi les plus élevées du continent.
En 2023 et 2024, le gouvernement a franchi un nouveau cap en proposant d’harmoniser complètement la fiscalité entre les produits du tabac et les cigarettes électroniques. Cette harmonisation vise non seulement les e-liquides nicotinés, mais également les produits sans nicotine, que les autorités portugaises considèrent comme une porte d’entrée potentielle vers le tabagisme. Selon les projets en discussion, la taxe pourrait atteindre 3 euros pour un flacon de 10 ml, rendant les e-liquides nicotinés plus chers que les cigarettes traditionnelles dans de nombreux cas.
Des restrictions d’usage alignées sur le tabac
Au-delà de la fiscalité, le Portugal a étendu au vapotage l’essentiel des interdictions applicables au tabagisme. Depuis 2017, il est interdit de vapoter dans les lieux publics fermés, les transports en commun, et à proximité des établissements scolaires et de santé. La nouvelle réglementation classe désormais explicitement les cigarettes électroniques dans la même catégorie que le tabac traditionnel, avec les mêmes restrictions d’usage et de commercialisation.
Les projets de loi récents prévoient également de restreindre drastiquement les points de vente autorisés. À terme, seuls les bureaux de tabac, les aéroports et les stations-service seraient autorisés à commercialiser des produits de vapotage. Les distributeurs automatiques, restaurants, salles de concert et festivals perdraient leur autorisation de vente.
Une adoption très faible de la cigarette électronique
Les conséquences de cette politique restrictive sont sans appel : le Portugal affiche l’un des taux d’utilisation de la cigarette électronique les plus faibles de l’Union européenne. Selon le baromètre européen de 2023, moins de 1% de la population portugaise consomme des cigarettes électroniques, alors que la moyenne européenne s’établit à 3% et que certains pays comme l’Estonie ou la Lettonie atteignent respectivement 9% et 8%.
Cette faible adoption est d’autant plus préoccupante qu’elle intervient dans un contexte où seulement 7% des Européens ayant déclaré avoir au moins essayé la cigarette électronique résidaient au Portugal en 2020, plaçant le pays parmi les derniers de l’Union européenne. De plus, seulement 6% des Portugais considèrent les cigarettes électroniques comme un outil d’aide au sevrage tabagique, contre 12% en moyenne dans l’UE.
Une voix discordante : l’association APORVAP
Face à cette situation, l’Association Portugaise des Cigarettes Électroniques (APORVAP) tente de faire entendre une voix différente. En 2022, l’association a soumis au Parlement une demande de réduction de la taxation, arguant que la politique actuelle va à l’encontre des objectifs de santé publique du pays.
Selon les données avancées par l’APORVAP, environ 80% des fumeurs portugais souhaiteraient passer à la cigarette électronique, mais le taux de réussite ne dépasserait pas 3%, principalement en raison du coût prohibitif des e-liquides nicotinés comparé aux cigarettes traditionnelles. L’association plaide pour une fiscalité rationnelle qui reflète la réduction des risques associée au vapotage par rapport au tabagisme.
L’APORVAP propose une réduction drastique de la taxe, de 3 euros à 0,10 euro par tranche de 10 ml d’e-liquide nicotiné, avec l’engagement d’investir au moins 50% de cette valeur dans la recherche scientifique nationale sur le sujet. Cette proposition est cependant restée sans réponse favorable de la part du gouvernement portugais.
Un débat sur les bases scientifiques
La position du Portugal soulève des questions quant aux fondements scientifiques de sa politique. Alors que de nombreuses études internationales, notamment celles menées au Royaume-Uni par Public Health England et le Royal College of Physicians, établissent que les cigarettes électroniques sont significativement moins nocives que le tabac fumé, les autorités portugaises maintiennent une approche d’assimilation complète entre vapotage et tabagisme.
Cette posture contraste avec les recommandations d’organismes de santé publique de plusieurs pays qui, tout en reconnaissant la nécessité de réguler le vapotage et de protéger les jeunes, considèrent la cigarette électronique comme un outil de réduction des risques pour les fumeurs adultes. Le débat public au Portugal porte d’ailleurs sur le manque de bases scientifiques concernant l’assimilation du vapotage au tabagisme.
Les défis à venir
Le Portugal se trouve à un carrefour. D’un côté, le pays affiche des objectifs ambitieux en matière de lutte contre le tabagisme avec sa vision d’une génération sans tabac d’ici 2040. De l’autre, les résultats actuels montrent une stagnation préoccupante du taux de fumeurs depuis près de deux décennies, malgré les mesures mises en place.
La question qui se pose est de savoir si la politique actuelle, caractérisée par une approche restrictive tant sur le tabac que sur ses alternatives potentiellement moins nocives, permettra d’atteindre les objectifs fixés. Les exemples d’autres pays européens, notamment le Royaume-Uni qui a connu une baisse spectaculaire de son taux de tabagisme en intégrant la cigarette électronique dans sa stratégie de santé publique, suggèrent qu’une approche différenciée pourrait produire de meilleurs résultats.
Avec un taux de tabagisme qui n’a baissé que d’environ deux points en près de quinze ans, et une adoption quasi inexistante de la cigarette électronique en raison d’une fiscalité dissuasive, le Portugal devra peut-être reconsidérer sa stratégie s’il souhaite véritablement faire reculer le fléau du tabagisme. L’enjeu est de taille : selon les estimations, le coût économique du tabagisme pour le Portugal s’élève à plus de 3 milliards d’euros, incluant les dépenses de santé directes et les pertes de productivité liées aux maladies et aux décès prématurés.
Une situation qui appelle à la réflexion
Le cas portugais illustre la diversité des approches en Europe concernant la lutte contre le tabagisme et le positionnement vis-à-vis de la cigarette électronique. Alors que certains pays adoptent une politique de réduction des risques incluant le vapotage comme outil d’aide au sevrage, le Portugal fait le choix d’une approche d’équivalence entre cigarette électronique et tabac.
Dans un contexte où le pays peine à faire baisser significativement son taux de tabagisme, cette politique restrictive mérite d’être questionnée. La comparaison avec d’autres nations européennes qui ont intégré la cigarette électronique dans leur arsenal de lutte antitabac et obtenu des résultats probants pourrait offrir des pistes de réflexion pour le Portugal.
L’avenir dira si le Portugal maintiendra sa ligne actuelle ou s’il choisira, à l’instar d’autres pays, d’adopter une approche plus nuancée reconnaissant le potentiel de la cigarette électronique comme outil de réduction des risques pour les fumeurs adultes qui ne parviennent pas à arrêter autrement. Pour l’heure, avec moins de 1% de vapoteurs et un taux de tabagisme quasi stable, le chemin vers l’objectif 2040 apparaît encore long et incertain.
Sources
- Portugal: cigarette consumption prevalence by age and gender 2022 – Statista
- Consommation et perception des produits du tabac et de la nicotine dans l’UE – Génération Sans Tabac
- Le Portugal renforce timidement ses mesures contre le tabagisme – Génération Sans Tabac
- Portugal – Tobacco Atlas
- Baromètre européen tabagisme et vapotage en 2024 – Nicotine World
- Quels pays de l’UE ont les taux de tabagisme les plus élevés ? – Euronews
- Le Portugal réduit sa taxe anti-vape mais interdit son usage dans les lieux publics – Vapolitique
- Les nouvelles lois portugaises sur le tabac et leur impact sur les consommateurs – The Portugal News







