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L’industrie du tabac peut-elle financer des chercheurs ?

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Les travaux de deux chercheurs ont été supprimés, car ils étaient financés par Big Tobacco. Mais est-ce une raison suffisante pour les rejeter ?

Merci pour votre travail, mais non merci

L’argent des cigarettiers doit-il toujours être rejeté ?

Un scientifique financé par l’industrie du tabac a-t-il forcément tort ? Voilà la question que soulève le récent article rédigé Sally Satel, psychiatre et chercheuse principale à l’American Enterprise Institute, un think tank dont une partie des financements viendrait des cigarettiers selon Source Watch. Dans le City Journal, elle raconte la manière dont certains de ses travaux ont été supprimés de la plateforme médicale Medscape, car ils avaient été financés par Big Tobacco.

Medscape est une plateforme d’information médicale américaine s’adressant aux professionnels de santé. Parmi les contenus qui y sont proposés, des vidéos réalisées par certains spécialistes, destinées à communiquer sur différents sujets auprès d’autres professionnels de santé. Il y a quelques mois, Sally Satel aurait été contactée par Medscape afin de réaliser des vidéos sur le thème de la réduction du risque tabagique. À une époque où de nombreux médecins américains continuent d’être mal informés sur la cigarette électronique, ce travail aurait pu participer à leur formation. Seulement voilà, lorsque les deux vidéos de 30 minutes ont été mises en ligne le 1er avril, une levée de boucliers a eu lieu de la part de différents professionnels de santé spécialisés dans la lutte contre le tabagisme. « Tollé alors que Philip Morris International finance des cours de sevrage tabagique sur Medscape » titrait par exemple, quelques jours plus tard, le British Medical Journal. Mais alors, que s’est-il passé ?

Argent sale ?

Le problème soulevé par les opposants à ces vidéos concernait leur financement. Celles-ci avaient en effet été payées par le cigarettier Philip Morris International (PMI). Selon Sally Satel, qui les avait préparées en collaboration avec Brad Rodu, spécialiste de la réduction du risque tabagique ayant lui-même été financé par Big Tobacco pendant près de dix ans, les deux chercheurs avaient pourtant « un contrôle total sur le contenu, en observant le pare-feu entre le bailleur de fonds et le corps professoral ». De son côté, Rodu expliquait que lorsqu’il était payé par l’industrie du tabac entre 1999 et 2018, « les accords conclus avec les universités garantissaient une totale indépendance pour publier les résultats sans en informer les sponsors, quel que soit l’impact des résultats sur eux ».

Mais ce que tous deux présentent comme des garde-fous n’a pas suffi. Quelques jours après leur publication, les travaux des deux spécialistes ont été supprimés de Medscape, qui s’est par la suite confondu en excuse et déclaré qu’après réflexion, « nous reconnaissons que l’utilisation de ce bailleur de fonds était une erreur de jugement qui n’était pas dans le caractère de Medscape Education et que cela a peut-être déçu nos membres ».

Pour Sally Satel, la stratégie des opposants est claire : blâmer le bailleur de fonds, susciter l’indignation, puis faire supprimer le contenu. Une situation qu’elle fustige, mettant en avant le fait que ses travaux étaient pourtant « truffés de faits ».

Éthique et vérité scientifique

« Le fiasco de Medscape reflète les efforts généralisés visant à mettre fin à toute recherche sur la réduction des méfaits du tabac. Les revues scientifiques, par exemple, refusent souvent de publier des chercheurs dont les travaux sont financés par les compagnies de tabac », fulmine-t-elle, avant d’ajouter que le refus de ces travaux « maintient les médecins dans l’ignorance », notamment car les recherches menées par l’industrie du tabac seraient parmi les meilleures puisqu’elle dispose « des ressources nécessaires pour soutenir des études plus ambitieuses que celles qui seraient approuvées par les agences gouvernementales ».

En 2022, un groupe de chercheurs indépendants reproduisait deux études réalisées par l’industrie du tabac, afin d’en vérifier les conclusions. D’après les scientifiques, toutes les deux s’étaient révélées vraies, démontrant de fait que le travail de Big Tobacco semblait fiable. Mais le passé sulfureux de l’industrie du tabac, qui pendant des années s’est joué de la vérité scientifique, continue d’attiser la méfiance du corps médical. La question reste donc ouverte : peut-on avoir confiance dans les travaux des cigarettiers, ou dans ceux qu’ils financent ? Le travail d’un chercheur financé par l’industrie du tabac doit-il forcément être mis de côté ?

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