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La vérité mise à nue – Entretien avec Michael Siegel

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Voici la version française d’un interview exclusif de Michael Siegel paru sur le site powersmoke.com. Cet éminent médecin de Boston qui défend depuis longtemps les méthodes de réduction des risques pour le fumeur, nous donne ici sa vision des choses et explique son point de vue sur l’évolution de la cigarette électronique aux États-Unis et dans le monde.

A propos de Michael Siegel

Michael Siegel (Ecole universitaire de santé publique de Boston)

Michael Siegel (Ecole universitaire de santé publique de Boston)

Michael Siegel est un médecin qui a complété sa résidence en Médecine préventive à l’Ecole de santé publique de Berkeley et qui a suivi une formation en épidémiologie pendant deux ans au Centre de contrôle et de prévention des maladies d’Atlanta avant de rejoindre Boston. Son principal domaine de recherche est le contrôle du tabac, avec une attention particulière sur les effets de la fumée passive sur la santé, l’exposition, les politiques, la publicité des cigarettes et les pratiques commerciales ainsi que leurs effets sur les jeunes, l’évaluation des politiques de contrôle du tabac et leurs impacts sur le comportement tabagique des jeunes et des adultes. Michael Siegel écrit régulièrement sur son blog http://tobaccoanalysis.blogspot.com.

Introduction : Trouver la meilleure cigarette électronique pourrait ne plus avoir d’importance si les gouvernements dans le monde légifèrent contre cette industrie. Le Professeur Michael Siegel, du Département des sciences de la santé communautaire à l’Ecole universitaire de santé publique de Boston, nous en dit plus sur ce débat crucial.

Les règlementations vont-elles développer ou affecter l’industrie mondiale de la cigarette électronique ?

Michael Siegel : Tout dépend de la nature de ces règlementations. Si les cigarettes électroniques sont règlementées en tant qu’alternative aux produits du tabac plutôt que comme médicaments et si elles sont traitées différemment des vrais produits du tabac, alors ces règlementations pourraient être une véritable aubaine pour ce marché. D’un autre côté, si les cigarettes électroniques sont règlementées en tant que médicaments ou si elles sont traitées au même niveau que les vrais produits du tabac, cela pourrait être une catastrophe pour l’industrie. Ainsi, tout dépendra de ce que les organismes de santé publique et les législateurs décideront, en tenant compte également des décisions de l’Union européenne et de la FDA auxquelles nous serons attentifs dans les prochaines semaines et mois à venir.

Quelles sont les preuves tangibles de l’efficacité du vapotage par rapport au tabac ?

Michael Siegel : Il y a littéralement des milliers de fumeurs qui ont arrêté de fumer grâce à l’utilisation des cigarettes électroniques. Nous savons cela suite à une combinaison de preuves, dont les témoignages des principaux intéressés, des études, des statistiques sur les ventes, des statistiques de groupes de consommateurs et plus récemment, des résultats d’essais cliniques. Nous ne connaissons pas encore exactement le pourcentage de fumeurs qui ont réussi à arrêter de fumer grâce aux cigarettes électroniques mais nous savons que l’utilisation de ces produits est au moins aussi efficace que les thérapies de remplacement de la nicotine.

Quels droits les vapoteurs sont-ils en marge de demander (comme par exemple la liste des ingrédients) ?

Michael Siegel : Il faut qu’il y ait des normes communes suivies par toutes les compagnies. Avec plus de 250 marques sur le marché, les consommateurs doivent savoir que peu importe la marque qu’ils achètent, il existe un certain nombre de normes qui ont été suivies, aussi bien dans la fabrication du dispositif que dans la préparation du liquide. Par exemple, les niveaux de nicotine listés doivent être exacts, les batteries doivent être sûres, sans risque de surcharge et d’explosion et ils ne devraient pas y avoir de pièces métalliques desserrées. Voilà les points que la FDA devra aborder, je l’espère, dans ses propositions de règlementation.

Quelle étape faciliterait la transition vers une communauté de vapoteurs plus globale ?

Michael Siegel : La principale étape qui faciliterait la commercialisation des cigarettes électroniques serait que les organismes de règlementation autorisent explicitement les compagnies à dire la vérité sur l’utilisation qu’on entend faire de ces produits : à savoir, qu’ils sont prévus pour arrêter de fumer.

A l’inverse de tous les autres produits de consommation disponibles sur le marché, les cigarettes électroniques sont les seules pour lesquelles les compagnies ne peuvent toujours pas dire quelle est leur utilité en raison des craintes liées au fait que si ces compagnies affirment qu’elles permettent d’arrêter de fumer, leur produit tombera sous la loi fédérale sur l’alimentation, les médicaments et les cosmétiques (FDCA) aux Etats-Unis ou des lois identiques au niveau international.

Mon souhait est que dans sa règlementation, la FDA stipule clairement que ces produits soient bien prévus pour arrêter de fumer, mais que cette affirmation, si elle est utilisée par le vendeurs, ne soit pas considérée comme une prétention à des fins thérapeutiques (médicaments).

Le vapotage est-il une alternative saine ou une alternative lucrative pour les compagnies, voire les deux ?

Michael Siegel : Je ne dirais pas que vapoter est « sain » mais il s’agit sans nul doute d’une alternative plus sûre aux cigarettes conventionnelles. Il est vrai que les grands fabricants de tabac ont acheté ou développé des cigarettes électroniques mais les gens doivent comprendre que ces produits se sont développés et ne sont pas un leurre créé par les grands groupes cigarettiers pour rendre difficile la vie des fumeurs qui souhaitent arrêter de fumer.

Au lieu de cela, ils ont développé, dans une tentative de bonne foi pour offrir une alternative aux fumeurs qui sont préoccupés par leur santé et qui pourtant ne sont pas parvenus à arrêter de fumer en utilisant les méthodes disponibles. Les fabricants de tabac se sont pliés à cette loi pour l’unique raison qu’ils ont senti la bonne opération à l’autre bout de l’équation du tabac. Mais je ne vois aucune preuve que les fabricants de tabac ne sont pas sérieux dans leur volonté de commercialiser ces produits en tant que produit contribuant au sevrage tabagique.

Le vapotage sera-t-il un jour vraiment sain ?

Michael Siegel : Il est théoriquement possible qu’une formule sûre et qui produit assez d’effets pour satisfaire les fumeurs soit trouvée. Si un tel produit ne délivrait pas de nicotine, alors oui, il pourrait être un véritable produit « sain ». Cependant, je doute qu’une telle technologie soit disponible dans un futur proche. Quoi qu’il en soit, je crois vraiment que des recherches pour des formules alternatives en valent la peine.

L’interdiction de vapoter dans les lieux publics est-elle raisonnable ou efficace ?

Michael Siegel : A l’heure actuelle, il n’y a aucune preuve que la vapeur passive pose un risque de santé publique. Pour cette raison, je ne soutiens pas l’interdiction de vapoter dans les lieux publics. Je suis d’avis que pour interdire un comportement en public comme fumer ou vapoter, d’aucuns doivent fournir des preuves que ce comportement est réellement dangereux pour autrui. Avec le tabac, nous disposons de preuves accablantes. Avec le vapotage, nous n’avons à l’heure actuelle aucune preuve.

Quelles est la motivation derrière les mensonges et les attaques contre les e-cigarettes ?

Michael Siegel : Selon moi, il y a deux motivations principales. Premièrement, il existe une position idéologique très forte parmi de nombreuses personnes dans le mouvement de lutte contre le tabac que l’acte de fumer est mauvais. Même le geste est mal perçu. Par conséquent, même si les vapoteurs réduisent considérablement les risques qu’ils courent et sauvent peut être leur vie, les groupes anti-tabac les regardent avec mépris car leur gestuelle est identique à celle de fumer.

La seconde motivation est l’argent. Il y a des liens très étroits entre de nombreux groupes de lutte anti-tabac qui s’opposent aux cigarettes électroniques et aux groupes pharmaceutiques qui fabriquent des produits concurrentiels. Il y a ici un conflit d’intérêt qui est souvent caché dans les affirmations publiques tenues par ces groupes anti-tabac.

Existe-t-il un complot contre les cigarettes électroniques et d’autres alternatives plus sûres au tabac et si oui, qui est derrière et pourquoi ?

Michael Siegel : Je ne crois pas qu’il y ait un complot mais simplement qu’il s’agit du résultat d’une forte idéologie combinée aux liens financiers des groupes pharmaceutiques. Ces facteurs s’unissent pour générer une farouche opposition aux cigarettes électroniques, malgré les preuves scientifiques qui montrent que ces produits offrent d’énormes avantages en matière de santé publique.

Le problème des gouvernements avec les cigarettes électroniques est-il lié à la peur de l’inconnue ?

Michael Siegel : La peur de l’inconnue a certainement un rôle à jouer mais cela est illogique. Pourquoi préférer que les gens utilisent des cigarettes conventionnelles, dont les risques ont été prouvés, plutôt que des cigarettes électroniques, qui sont bien plus sûres mais pour lesquelles les risques précis n’ont pas été exprimés ? Ces groupes préfèrent-ils réellement que les gens fument car nous savons au moins à quel point les cigarettes sont nocives plutôt que de vapoter, car bien que plus sûres, nous ne connaissons pas les risques exactes de l’utilisation de cigarettes électroniques ? C’est ridicule.

Où voyez-vous les cigarettes électroniques à l’avenir ?

Michael Siegel : Tout dépendra de la manière dont ces produits seront règlementés. Avec la « mauvaise » approche, les règlementations pourraient littéralement détruire l’industrie ou du moins, poser un sérieux obstacle sur son chemin. Avec la « bonne approche », je crois sincèrement que les cigarettes électroniques pourraient transformer l’épidémie de tabac d’une manière encore jamais vue. Espérons que la FDA, l’UE et d’autres organismes de santé publique ainsi que les législateurs prendront la bonne décision.