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Cigaverte : interview de Stéphane d’Elia

Mis à jour le 26/04/2018 à 16h02

Vapoteur depuis 2009 et fondateur du réseau Cigaverte et de la marque haut de gamme Titanide, Stéphane d’Elia est devenu un acteur majeur de l’économie de la vape en France et des boutiques physiques. Aujourd’hui, Cigaverte réalise un chiffre d’affaires de 15 millions d’euros et emploie 80 salariés.

PGVG magazine : Racontez-nous votre parcours dans la vape avant Cigaverte.

Stéphane d’Elia, fondateur de Cigaverte et de Titanide

Stéphane d'Elia, Cigaverte

Stéphane d’Elia, fondateur des boutiques Cigaverte et de la marque Titanide

Stéphane d’Elia : À l’origine, j’étais un fumeur notoire qui a tenté l’arrêt du tabac à l’aide de toutes les techniques possibles, sans résultat. En 2009, mon épouse a passé une commande de kits d’e-cigarettes sur un site à l’étranger. Malgré mon scepticisme, nous avons pu arrêter la “tueuseˮ très facilement et surtout en gardant le plaisir de fumer. Pour moi, ç’a été une révolution inattendue qui a éveillé énormément d’intérêt et de curiosité. À cette époque, il était impossible de trouver des informations pertinentes sur la vape, hormis dans le premier forum spécialisé français sur le Web. Je passais, alors, plusieurs heures chaque jour sur le forum E-cigarette. Je voulais découvrir tout l’univers de la vape : la technique, le matériel, les e-liquides, etc. L’entraide et les échanges entre les utilisateurs étaient aussi une vraie mine d’informations avant l’ouverture des premières boutiques physiques. Les vapoteurs commençaient à former une vraie communauté rassemblée lors des premiers Vapodays et Vapéros en France, auxquels j’ai eu la chance de participer.

Boutique Cigaverte

L’intérieur d’une boutique Cigaverte, ici dans la ville d’Annonay.

PGVG : Comment est née l’idée de Cigaverte ?

d’E. : Je n’avais plus qu’une idée en tête : partager mon expérience avec tous les fumeurs de mon entourage. Vu les ravages du tabagisme, faire profiter de cette alternative au plus grand nombre de fumeurs était indispensable ! À l’origine, j’ai mis en place un parrainage avec Matthias Brunelière de Fumerpropre, qui gérait un des seuls magasins spécialisés en France, pour équiper mes proches en e-cigarettes. À force d’aider des fumeurs à devenir vapoteurs, l’idée d’en faire mon métier s’est imposée comme une évidence. En 2010, je me suis lancé. J’ai passé ma première commande de matériel en Chine et d’e-liquides à Alfaliquid en auto-entrepreneur. J’ai alors établi un partenariat avec des cafés de Saint-Étienne, où j’assurais avec ma femme des permanences pour faire découvrir l’e-cigarette. Puis nous avons déposé la marque Cigaverte et mis en ligne le site Cigaverte.com. En attendant l’ouverture de notre première boutique physique, nous avons également effectué des ventes en comité d’entreprise et à domicile.

PGVG : Qu’est-ce qui différencie Cigaverte des autres réseaux ?

d’E. : Cigaverte est historiquement la première franchise de boutiques spécialisées en France. Notre politique n’a jamais été d’ouvrir le plus grand nombre de magasins mais plutôt d’établir des lieux de convivialité où les vapoteurs peuvent partager leur expérience autour d’un café. Nous avons toujours été très sélectifs sur le choix de nos partenaires afin de créer un réseau de boutiques de qualité gérées par des passionnés, offrant une large gamme de produits pour vapoteurs débutants ou expérimentés. Étant consciente du potentiel extraordinaire de la vape dans la lutte contre le tabagisme, Cigaverte a participé à diverses études scientifiques. Nous considérons qu’être professionnel dans la vape va au-delà d’un simple business, c’est être militant de santé publique.

“En 2016, le réseau Cigaverte a réalisé un chiffre d’affaires de plus de 15 millions d’eurosˮStéphane d'Elia

PGVG : Aujourd’hui, où en est le réseau ?

d’E. : En 2016, nous avons limité le nombre d’ouvertures afin de nous structurer davantage et d’appréhender au mieux la transposition de la TPD. Nous exploitons sept magasins en nom propre et les autres sont des franchisés indépendants. Ils sont répartis sur toute la France avec une implantation forte dans la région Rhône-Alpes-Auvergne, deux boutiques en Nouvelle-Calédonie mais aussi en dehors des frontières : en Afrique, au Togo et en Côte d’Ivoire. Le cap des 40 boutiques sera franchi cette année. De nombreux projets sont en cours en France comme en Europe. En 2016, le réseau Cigaverte a réalisé un chiffre d’affaires de plus de 15 millions d’euros avec 80 collaborateurs.

PGVG : Votre offre d’e-liquides est assez restreinte et exclusivement française, pourquoi ce choix et sur quels critères faites-vous votre sélection ?

d’E. : Notre principal critère de sélection des liquides est leur innocuité. Nous sommes soucieux de proposer à nos clients une vape de qualité, donc nous ne référençons que des produits respectant les normes et la législation en vigueur. Néanmoins, la valeur gustative demeure bien entendu fondamentale. Nous privilégions les liquides français, mais nous avons toujours proposé des liquides anglais et américains. D’ailleurs, la gamme Cigaverte est élaborée en France à partir des fameux arômes anglais de chez Decadent Vapours.

PGVG : Quelles sont les conditions à remplir pour faire partie de votre réseau de franchisés ?

d’E. : Il faut avant tout être un vapoteur convaincu désirant mettre à profit son expérience de manière professionnelle. Considérer la vape comme un vrai métier répondant à un problème majeur de santé publique. Les conditions pratiques pour devenir franchisé sont présentées lors d’un entretien.

PGVG : Parallèlement à Cigaverte, vous décidez de créer Titanide en 2011, comment en avez-vous eu l’idée ?

d’E. : Nous cherchions constamment du matériel de qualité afin de proposer à nos clients les meilleurs produits alors que le marché de la cigarette électronique était en pleine émergence. Or, les modèles que nous importions de Chine ne répondaient pas toujours aux attentes de certains clients intéressés par des produits de meilleure qualité et surtout plus durables. L’offre était également assez peu adaptée aux femmes, alors que près d’un vapoteur sur deux était une vapoteuse. En fait, j’avais vraiment envie de donner une dimension artistique à la vape, d’où l’idée de développer des produits élégants et haut de gamme avec des matériaux nobles. Comme j’habite à Saint-Étienne, il me paraissait évident de mettre à profit le savoir-faire historique en mécanique, fonderie et traitement des métaux.

“Un mod Titanide est conçu pour durer, et ça compte énormément pour nousˮStéphane d'Elia

PGVG : Quel est le concept de la marque ?

d’E. : Titanide veut promouvoir une certaine vision de la vape en fabriquant de A à Z des produits haut de gamme adaptés à tous les styles de vape. Nos mods et tanks sont conçus et fabriqués en France, taillés dans la masse, en combinant savoir-faire artisanal et usinage de pointe. Notre spécificité, c’est l’utilisation du titane qui s’est imposé comme le matériau idéal, aux propriétés uniques : il est léger et éternel. Titanide est devenue une marque respectée, entre le luxe et une vape typiquement made in France. Un mod Titanide est conçu pour durer, et ça compte énormément pour nous.

PGVG : Quel est le profil type d’un client de Titanide ?

d’E. : Identique au profil type d’un vapoteur : hétérogène ! Ça peut être aussi bien une esthète à la recherche d’un mod élégant et compact, qu’un jeune passionné, qui veut se faire plaisir avec un mod léger et conducteur pour envoyer de gros nuages. Nous avons aussi des collectionneurs qui recherchent la rareté et veulent profiter de nos possibilités de personnalisation. Une chose est sûre, tous nos clients sont fiers de vaper “made in France”.

“Cette année, plus de la moitié de nos ventes devraient être réalisées à l’étrangerˮStéphane d'Elia

PGVG : Quelle est la part d’export des ventes de Titanide ? Dans quels pays vendez-vous le plus ?

d’E. : Titanide est une marque qui s’exporte bien, et de plus en plus. Cette année, plus de la moitié de nos ventes devraient être réalisées à l’étranger. Nos principaux marchés hors Union européenne sont la Chine et les USA, mais des clients nous passent commande du monde entier. Cependant, notre premier marché reste la France.

PGVG : Quel est le volume de production moyen concernant les mods ?

d’E. : Titanide est une petite entreprise artisanale. Nous sommes infiniment loin des productions chinoises ou des grosses maisons américaines. Nos mods sont usinés en série de 250 à 1 000 exemplaires selon les modèles.

PGVG : Votre produit le plus luxueux est la box Panache DNA75, vendue 590 €. Combien d’exemplaires en avez-vous vendus ?

d’E. : Panache est un défi passionnant autant qu’une folie : c’est le premier box mod électro taillé dans un seul bloc de titane. Son design, évolutif grâce à quatre panneaux magnétiques, est une prouesse technique un peu risquée, magnifique, et qu’il faut maintenant assumer. Nous avons fait un premier batch de 350 pièces qui est presque entièrement vendu, il ne nous en reste plus qu’une dizaine avant de partir sur une nouvelle production. Nous proposons maintenant des panneaux accessoires pour Panache, soit gravés au laser, soit en fonderie d’art, en association avec un célèbre bijoutier.

“Ce qui compte, c’est le jugement final des vapoteurs. S’ils plébiscitent une box comme la Reuleaux, c’est qu’elle répond à un besoinˮStéphane d'Elia

PGVG : Quels projets avez-vous concernant Titanide ?

 

d’E. : Titanide est une des marques pionnières dans la vape, mais son marché a toujours été compliqué. Vendre des produits luxueux dans la vape n’est pas chose facile et nous avons envie que Titanide se démocratise et accompagne plus de vapoteurs avec du matériel plus abordable, tout en respectant nos valeurs historiques. Nous travaillons en ce moment même sur une box inspirée de la Panache avec des finitions haut de gamme, qui pourrait se vendre moins de 290 €. Nous n’abandonnerons jamais l’univers des mods méca et préparons un tube en 24 mm dont le programme est simple : performance, compacité et sécurité. Enfin, en collaboration avec la marque parisienne Fuu, nous venons de lancer deux e-liquides en 50 ml à booster pour fêter le lancement de notre nouveau logo et partager notre passion de la vape avec nos clients. Ils sont précis comme nos produits, gourmands et universels.

PGVG : Quel est le produit le plus cher que vous ayez vendu ?

d’E. : C’est un modèle en or massif à 160 000 €, qu’on a vendu il y a quelques années à un client du Golfe Persique. Il était bas sur le Thémis 18, mais on avait interdiction de communiquer dessus ou de prendre des photos du produit. Le client a souhaité rester anonyme.

PGVG : Quel regard portez-vous sur l’évolution du matériel ? Notamment la course à la puissance, qui semble être le seul argument de vente ?

d’E. : La course à la puissance est légitime : la vape est jeune, cherche ses limites et a besoin d’une locomotive pour l’entraîner. L’innovation vers plus de puissance nous a déjà amené les boxs, les coils innovants, les fibres techniques, le subohm : autant de progrès qui permettent aujourd’hui de vaper fort tout en appréciant les saveurs. Un matériel puissant peut aussi permettre de bénéficier d’une très grande autonomie s’il est utilisé raisonnablement et c’est ce que recherchent bien des vapoteurs. Chez Titanide, nous sommes passionnés de technique et on adore les innovations, même quand elles apparaissent un peu “too muchˮ. Ce qui compte, c’est le jugement final des vapoteurs. S’ils plébiscitent une box comme la Reuleaux, c’est qu’elle répond à un besoin : autonomie, facilité d’usage, souplesse d’utilisation, design valorisant, etc. C’est un peu comme les SUV : tout le monde en veut et pourtant très peu font du 4×4 avec. Par contre, il ne faut jamais oublier deux choses : la sécurité, doit rester la priorité numéro 1, et les vapoteurs plus silencieux, qui réclament des produits discrets et performants. Chez Titanide, nous ne les oublierons jamais.

“De nombreuses découvertes passionnantes sont encore à prévoir, notamment dans la technique de l’évaporation des liquidesˮStéphane d'Elia

PGVG : Selon vous, vers quoi devrait tendre la recherche et développement ?

S. d’E. : L’équilibre. Les facteurs sont les suivants : l’autonomie, la taille, le respect des saveurs et le design. C’est aux fabricants de matériel de conjuguer tout cela pour offrir le produit idéal, compact, endurant et élégant. Les accus sont un élément clef de l’équation et nous restons en veille perpétuelle pour bénéficier des innovations faites dans le secteur du stockage de l’électricité. Les chipsets des mods électro doivent continuer à progresser et permettre des vapes lisses, pêchues et sûres avec une délivrance constante de la puissance. Côté mods méca, c’est le contact sensoriel avec l’usager qui prime, la course et le toucher des switchs, l’ingéniosité des designs et même l’approche sonore. Malgré une évolution technologique fulgurante, de nombreuses découvertes passionnantes sont encore à prévoir, notamment dans la technique de l’évaporation des liquides. L’innovation doit placer le vapoteur au cœur des améliorations, il faut lui simplifier la vie, garantir sa sécurité et lui apporter un maximum de plaisir lors de l’usage de son matériel.


Interview publiée dans le numéro 19 de PGVG magazine