Les conclusions du premier Tobacco Transformation Index sont claires : malgré les engagements de nombreux cigarettiers en faveur de la réduction des risques, très peu agissent, et toujours de manière très timide.

Les cigarettes ont encore de beaux jours devant elles

Le tabagisme est responsable de près de 8 millions de décès chaque année dans le monde. En tête des produits les plus mortels vendus à travers notre planète, les cigarettes, fabriquées par l’industrie du tabac, que plus d’un milliard de personnes consomment quotidiennement.

Si de nombreux produits destinés à aider les fumeurs à s’éloigner du tabagisme existent, le plus grand bouleversement dans ce domaine au cours des dernières décennies fut incontestablement l’arrivée de la cigarette électronique.

Permettant, pour la première fois, de conserver le geste de fumer tout en réduisant grandement les risques inhérents à cette pratique, ce nouvel outil de sevrage tabagique a permis à plusieurs millions de personnes à travers le monde, de cesser leur consommation de cigarettes. Une vaste réduction du nombre de fumeurs qui s’est directement faite ressentir sur les ventes de l’industrie du tabac.

Afin de tenter de conserver leur business, les cigarettiers se sont lancés sur ce nouveau marché, prônant une logique de réduction des risques, qu’ils avaient pourtant toujours tu, voire même contestée jusqu’alors. Parmi les fabricants de cigarettes les plus actifs dans ce domaine, Philip Morris International (PMI), fabricant des tueuses Marlboro, marque la plus vendue sur Terre.

Le mois dernier, PMI faisait part de la création du Tobacco Transformation Index (TTI), nouvel outil destiné à accélérer la transformation mondiale de l’industrie du tabac et surveiller ses différents acteurs. Aujourd’hui, marque le jour de sa première publication.

Des progrès en matière de réduction des risques très limités

Malgré les nombreux discours de certains cigarettiers, prétextant s’engager dans le domaine de la réduction des risques, l’information première révélée par ce rapport semble justement être les faibles progrès réalisés dans ce domaine.

Le rapport note par exemple qu’entre les années 2017 et 2019, les 15 entreprises évaluées n’ont enregistré qu’une « baisse marginale » de leurs ventes de cigarettes, passant de 4,9 à 4,8 milliards.

La foundation for a smoke-free world (financée par PMI) note ainsi qu’à ce rythme, il faudra des décennies pour éliminer le tabagisme, ce qui signifie que « beaucoup plus de fumeurs mourront » et que la société continuera à supporter « les conséquences sanitaires et économiques désastreuses d’une consommation de tabac à haut risque ».

Les produits à risque réduit encore très minoritaires

Concernant les produits à risques réduits (vaporisateur personnel et tabac chauffé), le TTI indique qu’ils ne représentaient que 3 % en valeur et 2 % en volume de l’ensemble des ventes liées à la nicotine pour les entreprises évaluées.

Toutefois, seules 6 entreprises ont reconnu leur rôle dans la réduction des risques liés au tabagisme, et ont pris des engagements dans cette voie.

Un engagement qui semble encore bien loin d’être suffisant puisque pour ces 6 entreprises pourtant engagées, entre 30 et 55 % de leur budget marketing restent encore consacrés aux produits à hauts risques (cigarettes, cigares etc).

Pour les auteurs du rapport, ces chiffres montrent qu’en dépit de leurs engagements, ces entreprises ont encore beaucoup à faire pour « traduire leurs stratégies de réduction des risques en résultats significatifs ».

Certains gouvernements n’ont que faire de la protection de la santé publique

Enfin, concernant les 9 entreprises n’ayant pas reconnu leur volonté de s’engager dans une logique de réduction des risques liés au tabagisme, le document note qu’elles ne sont pas cotées en bourse, contrairement aux 6 premières.

Une différence faisant qu’elles n’ont pas les mêmes impératifs pour « attirer ou retenir les investisseurs », ou encore répondre « aux pressions extérieures » liées à leur activité.

Sur ces 9 entreprises, 5 possèdent d’ailleurs un certain degré de propriété public, laissant de fait penser que certains gouvernements continuent de plus s’intéresser à l’argent rapporté par ces sociétés, qu’à la protection de la santé publique.

Des disparités subsistent entre les pays

Un autre point relevé par le rapport concerne le fait que les entreprises engagées dans la réduction des risques semblent concentrer leurs efforts sur des pays à revenus moyens ou élevés, où le tabagisme est déjà en baisse.

Par exemple, Philip Morris International (qui possède l’IQOS), Japan Tobacco International (qui propose Logic et Ploom), ou encore British American Tobacco (qui vend Vype et Vuse), proposent leurs produits dans 15 des pays les plus riches surveillés par l’indice, et dans seulement 3 des plus pauvres.

Pour le rapport, cette différence de traitement pourrait laisser penser que l’industrie du tabac est « simplement opportuniste » ou n’est pas « vraiment engagée » dans la lutte contre le tabagisme.

Le rapport conclue ainsi :

 

  • Plusieurs entreprises ont exprimé leur engagement en faveur de la réduction des risques mais cette approche concernant les produits à hauts risques reste vague.
  • Les engagements des entreprises en matière de réduction des risques sont soutenus par des objectifs limités.
  • Peu d’entreprises fournissent des détails adéquats sur l’engagement des parties prenantes en ce qui concerne la réduction des risques liés au tabagisme.
  • Les cigarettes restent la catégorie de produits dominante.
  • Les ventes de produits à risques réduits sont inférieures à celles des produits à hauts risques, en particulier dans les pays à faibles et moyens revenus.
  • Certaines entreprises pourtant publiquement engagées sapent leurs efforts en continuant d’acquérir des entreprises (par le biais de fusions) dans le domaine des produits à hauts risques.
  • Les entreprises consacrent encore une part importante de leur budget pour les produits à hauts risques.

 

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