Un rapport commandé par ACT-Alliance contre le tabac décortique les financements de Big Tobacco par les institutions financières françaises.

Le TFFP passé à la trappe ?

Comme tout secteur, l’industrie du tabac a besoin de financements extérieurs pour prospérer.

Il y a quelques jours, l’association antitabac française, ACT-Alliance contre le tabac, a publié les résultats d’un rapport commandé à l’organisme d’investigation Profundo. Alors qu’en 2018, dans le cadre de l’initiative Tobacco-Free Finance Pledge (TFFP), plus de 200 institutions financières mondiales s’étaient engagées à ne plus participer au financement de l’industrie du tabac, l’enquête avait pour objectif d’identifier les tendances de son financement avant et après le lancement du TFFP. Parmi les signataires de cet accord, plusieurs banques françaises parmi lesquelles le groupe BPCE (Banque Populaire et Caisse d’Épargne), le Crédit Agricole, BNP Paribas, AXA, le Crédit Mutuel, ou encore la Société Générale.

Méthodologie

Dans le cadre de ce rapport, Profundo s’est concentré sur les cinq plus gros cigarettiers (PMI, BAT, Imperial Brands, JTI, et China National Tobacco Corporation). Des entreprises tiers dont le rôle est décrit comme « clé » dans l’industrie du tabac en France ont également été incluses : LRT Industries (qui fabrique du tabac reconstitué utilisé dans les cigarettes), Republic Group (qui possède les Papeteries du Léman, fabricant historique en France du papier à cigarettes), Poeschl Tobacco (spécialisée dans la fabrication de produits du tabac et qui se décrit le 5e acteur du marché en France avec 1,6 % de part de marché) et Universal Corporation (dont la principale filière serait Universal Leaf Tobacco Company, qui « transforme une variété de tabac en feuilles et fournit des services de supply chain aux fabricants »).

Différents types de financements ont été retenus dans le rapport. Les prêts aux entreprises, les financements de projets, les émissions d’actions, les émissions d’obligations, la gestion actionnariale, et la gestion obligataire.

La période étudiée s’étalait de janvier 2018 à juin 2023 concernant les crédits accordés (prêts et souscriptions d’actions et d’obligations). Les investissements en obligations ont été recherchés trimestriellement de décembre 2017 au 30 septembre 2023.

Des financements qui perdurent mais diminuent

Depuis 2018, les institutions financières françaises auraient apporté pour 5,3 milliards de dollars aux entreprises citées dans le paragraphe précédent. Bien que ces investissements seraient en nette diminution au cours de la période étudiée, deux banques françaises continueraient à prêter de l’argent à des cigarettiers. La Société Générale et le Crédit Agricole auraient ainsi respectivement accordé 4,4 milliards et 957 millions de dollars de prêts entre 2018 et 2023.

Les prêts

La Société Générale serait notamment la seule à avoir financé British American Tobacco (BAT) et Philip Morris International (PMI), tandis que Japan Tobacco Inc. (JTI) aurait été financé par le Crédit Agricole (367 millions) et par la Société Générale (354 millions). Imperial Brands, quant à elle, aurait reçu des financements des deux institutions.

Comme le souligne Profundo dans son rapport, « ces deux banques sont pourtant signataires du Tobacco-Free Finance Pledge ». Pire encore, la Société Générale aurait publié une politique relative au financement du tabac en septembre 2023, tandis que le Crédit Agricole ne manquerait pas de rappeler sur son site internet, être signataire du TFFP.  Aucun financement n’aurait été repéré concernant les autres entreprises.

Les investissements

Du côté des actions et obligations, les institutions financières françaises totaliseraient 733 millions de dollars d’investissements dans les entreprises étudiées au mois de novembre 2023. Parmi les sociétés préférées par les banques, Philip Morris International à la première place (305 millions) , suivie de British American Tobacco (253 millions). Imperial Brands et Japan Tobacco comptabiliseraient quant à elles 77 millions et 51 millions de dollars d’investissements de banques françaises. Tout comme LRT Industries (46 millions) ou encore Universal Corporation (2 millions).

Le rapport souligne toutefois que malgré des financements qui perdureraient suite à la signature du Tobacco-Free Finance Pledge, la tendance resterait très largement à la baisse pour la plupart des institutions financières françaises. D’après les calculs réalisés par Profundo, seuls Groupama, APICIL Group, Pro BTP Finance, Twenty First Capital, Machina Capital et Gautier Investissement auraient augmenté leurs investissements dans l’industrie du tabac. Qu’il s’agisse du groupe BPCE, du Crédit Agricole, de BNP Paribas, AXA, le Crédit Mutuel, Rotschild, Capital Fund Management, Oddo BHF, Société Générale, MW Gestion et Cholet Dupont, tous seraient en train de désinvestir au fil du temps.

Une très nette diminution des investissements peut être observée au fil des dernières années.

Malgré le communiqué de presse d’ACT-Alliance contre le tabac qui fait part de son indignation, les banques françaises semblent être sur la bonne voie.

L’économie de la vape et du tabac

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