La revue systématique présente de nombreuses limites et met surtout en lumière les problèmes des études actuelles.

Vapotage et santé respiratoire : des résultats globalement rassurants

La semaine dernière, les chercheurs du Center of Excellence for the Acceleration of Harm Reduction (CoEHAR) ont publié une nouvelle étude1 qui s’est intéressée aux effets de l’utilisation du vaporisateur personnel sur la santé respiratoire. Les scientifiques ont ainsi réalisé une revue ombrelle (umbrella review), c’est-à-dire une revue systématique qui synthétise les résultats d’autres revues systématiques. Pour leur travail, les scientifiques ont repéré 12 de ces revues. Après avoir utilisé un outil destiné à évaluer leur qualité, cinq seulement ont été retenues. Au total, les analyses retenues comptabilisaient 41 études primaires, principalement publiées après 2018, afin de s’assurer qu’elles ne prenaient en compte que des modèles « récents » de cigarettes électroniques.

Pour leur travail, les scientifiques du CoEHAR ont classé les utilisateurs d’e-cigarettes parmi trois groupes :

  • Les utilisateurs doubles : qui fument et vapotent en parallèle.
  • Les utilisateurs exclusifs : qui ont complètement remplacé le tabagisme par le vapotage.
  • Les vapoteurs qui n’ont jamais fumé auparavant.

Pour analyser la santé respiratoire des participants, quatre critères ont été étudiés : 

  • Les tests de spirométrie : le test de base pour mesurer la capacité respiratoire. Il s’agit de différentes mesures qui permettent de savoir si la capacité respiratoire d’une personne est altérée.
  • L’oscillométrie par impulsion : destiné à mesurer la résistance des voies respiratoires. Plus récent, ce procédé permet notamment de détecter d’éventuelles altérations des poumons, avant même que la spirométrie ne les détecte.
  • La saturation en oxygène et FeNO : le premier test mesure simplement la quantité d’oxygène dans le sang, et l’autre le niveau d’oxyde nitrique qui est un marqueur d’inflammation des poumons. Il est par exemple utilisé pour diagnostiquer l’asthme.
  • Les événements respiratoires graves : tout problème important qui pourrait survenir chez les vapoteurs, comme l’apparition d’une pneumonie ou d’une bronchite sévère, etc.

En pneumologie, ces tests sont capitaux pour détecter des signes d’altération des fonctions respiratoires, qui peuvent être le signe de différentes maladies liées au tabagisme. Et dans le cas de cette étude, au vapotage.

Des résultats à interpréter avec prudence

Comme il y a quelques semaines, cette nouvelle recherche réalisée par le Center of Excellence for the Acceleration of Harm Reduction présente de nombreuses limites, mais conclut à des résultats rassurants.

Concernant les tests de spirométrie et la saturation en oxygène ou oxyde nitrique, aucun changement significatif n’a été relevé dans les différents groupes. L’oscillométrie par impulsion n’a pas pu être étudiée correctement, car les chercheurs ont relevé un nombre d’études trop faible. Enfin, au sujet des événements respiratoires graves, là encore, rien à signaler.

Un miroir des failles actuelles de la recherche scientifique

Si cette revue offre des données rassurantes, il convient de noter qu’elle présente de nombreuses limites.

D’abord, la majorité des études comprises dans les revues systématiques étudiées ne comprenaient que des tests à court terme. Dans le cas des tests de spirométrie, par exemple, certaines mesures comme le FEV1, qui calcule le volume d’air expiré en une seconde, nécessitent plusieurs mois, voire années, sans tabac, pour détecter d’éventuels changements significatifs. Des changements respiratoires auraient donc pu, potentiellement, être repérés avec des études de plus longue durée. 

Plusieurs recherches avaient aussi utilisé des classements flous pour catégoriser leurs participants. Par exemple, beaucoup étaient inclus dans le groupe des vapoteurs à partir du moment où ils avaient utilisé une cigarette électronique « au moins une fois au cours des 30 derniers jours ». Naturellement, les effets du vapotage chez une personne qui ne vapote qu’une fois par mois, et une autre qui prend une bouffée toutes les trois minutes peuvent très fortement varier. Pourtant, toutes étaient classées dans le même groupe, celui des vapoteurs. Une approximation qui risque de diluer les résultats et ainsi masquer d’éventuelles différences liées à la fréquence d’utilisation d’une cigarette électronique.

Enfin, si les auteurs de cette revue ont synthétisé les résultats en séparant les vapoteurs en trois groupes distincts (vapofumeurs, vapoteurs avec un passé tabagique, et vapoteurs sans passé tabagique), ce n’était pas toujours le cas dans les études primaires incluses aux revues systématiques analysées. De quoi complexifier le classement des participants à travers chacun des groupes.

Finalement, si cette revue systématique offre des données d’apparence rassurante, ses résultats doivent être considérés avec précaution. Son principal atout réside surtout dans le fait qu’elle permet de refléter les lacunes de la recherche scientifique actuelle au sujet du vaporisateur personnel. Entre failles méthodologiques, absence de procédés standardisés ou encore biais dans le traitement des données, il faudra probablement encore de nombreuses années avant que les scientifiques s’accordent sur une manière de faire qui permettra, à l’avenir, de réaliser des revues ombrelles à la fiabilité avérée.


1 La Rosa GRM, Polosa R, O’Leary R. Patterns of Use of e-Cigarettes and Their Respiratory Effects: A Critical Umbrella Review. Tobacco Use Insights. 2025;18. doi:10.1177/1179173X251325421

 

Cette étude et ses trois auteurs ont reçu, directement ou indirectement, des fonds de la part de la Foundation for a Global Action to End Smoking, anciennement appelée Foundation for Smoke-Free World, organisation financée par le cigarettier Philip Morris International.

 

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