Et si la cigarette électronique entrait dans une phase de stagnation technologique, après les progrès réalisés ces dernières années, passant du « toujours mieux » au « toujours plus » et parfois au « toujours inutile » ?
Une insatisfaction programmée
Un vapoteur un peu geek, un peu collectionneur, un peu à l’affût de toute nouveauté, a forcément vécu ce moment : confortablement installé, avec le meilleur MOD du moment, le meilleur atomiseur du moment, le meilleur liquide du moment (selon lui) et le meilleur montage du moment (selon la mode), se demandant « quoi de mieux », ignorant encore que, quelques jours plus tard, Mod et atomiseur prenant la poussière, un fond de flacon de son ex-liquide préféré désormais déchu finissant de se perdre sur une étagère, il prononcerait les même mots pour un tout autre matériel.
Allez, on est entre nous, personne ne regarde, vous pouvez l’avouer. Moi même, j’ai vécu ces moments extatiques et éphémères de Graal vapotesque enfin atteint au moins une fois par semaine l’an passé. Jusqu’à me rendre compte que, récemment, je n’avais pas changé de Mod depuis trois mois, que mon atomiseur de prédilection restait le même depuis le même moment, à peu de choses près, et que cela faisait six mois que je ne vapais plus que sur du microcoil-coton.
Bref, plus aucune excitation du côté des nouveautés, ne vous énervez pas, j’y reviendrai. Les dernières sorties, pour le moment, semblent osciller entre le « toujours plus » et le gadget inutile.
Perfectionnements empiriques
Soyons clairs : je ne dis pas que le dernier atomiseur de chez Machin, modeur grec d’origine philippine qui fait réaliser ses plans en Allemagne par l’intermédiaire d’un producteur russe est mauvais. Il est même très bon, mais le principe de la chambre réduite en bas de l’ato avec une alimentation par effet Venturi n’est pas tout à fait foudroyant d’originalité. Peut être que cet ato fait mieux que le Kayfun, mais justement : c’est une amélioration, pas une nouveauté.
Pareillement pour les MODs. Le dernier en date à avoir apporté une innovation technologique, et même plusieurs, c’est le Pipeline Pro, dont nous avions déjà dit ici tout le bien que nous en pensions. La réplique arrive, avec des cartes qui sont capables de sortir du 30 watts là ou le Pipeline Pro n’en sort « que » 20.
Formidable, ces MODs seront certainement très bons, une fois essuyé les plâtres des versions 1 pour certains, mais sera-t-il utile de les acheter si vous possédez déjà un bon MOD ?
En somme, la question est : combien d’entre nous iront chercher leur sweet spot à 30 watts ?
Ceci n’est en rien une critique : c’est bien, c’est très bien même, que des fabricants continuent de plancher sur les moyens d’améliorer la vape. Mais les améliorations ne sont pas des nouveautés, et les futurs atomiseurs, ou MODs, devront vraiment apporter une amélioration nette du rendu et/ou du confort d’utilisation pour s’imposer. Ce qui rend ridicule certaines courses à la puissance : oui, un jour, un type arrivera à sortir un MOD capable de monter à 100 watts en courant lissé sans faire exploser son client. Sauf que le liquide n’aura, à cette valeur, plus beaucoup de goût.
En un mot, à moins d’une considérable révolution technologique, comme la vape au laser, ou une non moins considérable amélioration d’un produit existant grâce à une idée ingénieuse, comme un dripper capable de contenir 5 ml de liquide sans risque de fuite (votre prix sera le mien), on se tourne vers une amélioration de l’existant avec un sacré objectif de qualité pour faire la différence.
Hé, dites : ce serait pas une bonne nouvelle, ça, finalement ?
Perfectionnements empirés
Mais il y a d’autres moyens la vape d’améliorer, du moins le pensent certains. Oui, comme Yoda je parle rien que d’y penser.
Ainsi, je découvrais de mes yeux effarés un excellent article sur le nom moins excellent site sur Ma-Cigarette.fr, un peu d’auto-congratulation ne nuit pas, qui détaillait les caractéristiques d’une e-cigarette « connectée ». En gros, vous vapez, et grâce à une application, vous voyez sur votre Smartphone le niveau de la batterie et la quantité de nicotine absorbée. Théorique, le niveau, bien entendu. L’ensemble étant destiné à « coacher » le vapoteur désireux de se convaincre des bienfaits de son nouvel outil.
Si Ghyslain, dans son article, a déposé le beurre de son scepticisme, je tenais, pour achever la tartine, à y étaler la marmelade de mon hostilité.
Parce que outre les problèmes de précision de ce type de mesure, l’ensemble du système va à l’encontre même de l’idée de vapote.
Devenir vapoteur, ce n’est pas se guérir, puisque ce n’est pas un médicament, ce n’est pas se punir, puisque ce n’est pas non plus un épisode de Elementary, c’est remplacer une addiction dangereuse assimilée à un plaisir, la cigarette, par une addiction vraisemblablement infiniment moins dangereuse, le vapotage, et créatrice de véritable plaisir (vous avez goûté les liquides de Green Vapes ? Vingt dioux, que c’est bon!). On arrête la cigarette plus ou moins rapidement, sans se forcer, à son rythme, puis, certains diminuent aussi au fur et à mesure du temps leur taux de nicotine, et c’est cool, man. Si c’est trop fort, on diminue la tension ou le taux de nicotine, si c’est trop doux, on baisse la résistance ou on resserre l’air flow.
Mais jamais, jamais, à aucun moment, je n’ai connu de vapoteur qui calcule combien de nicotine il avait inhalé, en combien de bouffées, de quelle durée, ou quoi que ce soit d’autre de ce genre. Si la vape est efficace dans l’arrêt de la cigarette, c’est justement par son aspect anti statistique, dans ce côté doux, plaisant, naturel et à son rythme.
Parce que ça, ça ressemble furieusement à une mauvaise nouvelle.
On se calme et on vapote frais
Toute cette affaire sent le coup marketing, sans vouloir offenser ses créateurs.
Je sais, on m’objectera que la critique est facile, mais l’art est difficile, ce à quoi je répondrai que, oui, certainement, ses créateurs ont plus de talent que moi en la matière pour avoir développé ce système, mais que c’est triste, selon moi, d’avoir gâché ce talent au service de ce produit somme toute inutile.
Si aucun vapoteur d’expérience, je peux me tromper, mais je le vois ainsi, n’achètera ce produit, probablement parce qu’il s’en foutra et que ça n’améliorera pas son expérience de vape, des débutants qui perçoivent la e-cigarette comme un produit d’arrêt du tabac à l’instar de ce qui se vend en pharmacie, acquerrons certainement cet objet.
Une vapoteuse dans une main, leur smartphone dans l’autre, ils calculeront combien de bouffées brèves et insatisfaisantes ils pourront encore tirer pour tenir jusqu’à la fin du film, le soir, afin de ne pas dépasser le quota qu’ils se seront autorisés, comme les accros de la diététique calculent les calories de leur repas. On va voir arriver les anorexiques de la vapote.
Du coup, pour ces utilisateurs là, la vapoteuse sera assimilable à une contrainte et une punition. Tout le contraire de la « philosophie » de la vape, et probablement de ce qui contribue à sa réussite.
C’est dommage, parce que les créateurs de cette application ont la maîtrise technologique pour le faire, qu’ils auraient pu utiliser à autre chose, de vraiment utile et profitable. Je suis sûr que nos chers lecteurs et nos lectrices adorées vont les aider en laissant en commentaires plein d’excellentes idées pour de futurs produits.
Ce qui serait dangereux, en revanche, c’est que d’autres s’engouffrent dans la brèche, que tout le temps de cerveau disponible pour l’amélioration de la vape se consacre à la vacuité.