Le Docteur Farsalinos avait déjà fait une intervention très remarquée au cours du salon Vapexpo. Son message était clair et s’adressait directement aux représentants de Joyetech, Kangertech et Dekang. Il reprend aujourd’hui ses propos dans un article publié sur son site. Leçon de morale du scientifique le plus connu dans le monde de la vape.

Le Docteur Farsalinos tente de secouer les industriels de l’ecig. Pour lui il est grand temps d’investir du temps et de l’argent dans la recherche scientifique.

Il est très fréquent que des vapoteurs s’en prennent à tout le monde suite à de mauvaises règlementations ou à des tentatives visant à limiter l’utilisation et le développement des cigarettes électroniques. Que ce soient des régulateurs, de grands groupes pharmaceutiques ou fabricants de cigarettes, des journalistes, des scientifiques ou certaines parties de l’industrie elle-même des e-cigarettes (par exemple la TVECA, Tobacco Vapor Electronic Cigerette Association) etc. Peut-être l’industrie de la cigarette électronique a raison dans certains cas mais exagère dans d’autres. Cependant, à mon avis, ce n’est pas la réalité. La règlementation européenne est désormais une réalité. Peut-être aurait-elle pu être plus efficace ; peut-être que l’UE ne pouvait pas faire mieux. La chose la plus importante est de regarder vers l’avant en se rendant compte des erreurs commises et empêcher qu’elles ne se reproduisent. Mais l’industrie de la cigarette électronique en est-elle la responsable ?

Jusqu’à aujourd’hui, la mentalité et l’approche de l’industrie de la cigarette électronique est totalement erronée, et je ne suis pas sûr que nous disposions d’assez de temps pour changer cela. -K. Farsalinos

Avant la DPT, il n’y avait pas d’industrie organisée de la cigarette électronique. Malgré le fait qu’il était inévitable que les régulateurs s’attaquent au problème de l’e-cigarette dans la DPT (dont la publication en décembre 2012 était connue de tous), l’industrie a été prise au dépourvu. Elle a tenté de s’organiser en l’espace de quelques semaines, de quelques mois. Elle a engagé des sociétés de relations publiques et des cabinets d’avocats qui ont eu un certain succès jusqu’à un certain point, si l’on appelle succès le fait que la cigarette électronique n’a pas été classée comme un produit pharmaceutique ou interdite tout en faisant fi des aspects négatifs de la réglementation (par exemple la limitation du taux de nicotine).

En réalité, l’avenir est plus important et crucial que le passé. La DPT n’est qu’une vague approche de certaines exigences nécessaires pour autoriser un produit à être mis sur le marché. Le réel impact de la règlementation découle des négociations qui viennent de débuter et qui préciseront les essais, les conditions et les exigences nécessaires. Mais que fait l’industrie à cet égard ?

Je suis le seul à avoir réalisé des essais cytotoxiques sur la vapeur de cigarettes électroniques. K- Farsalinos

L’industrie devrait être extrêmement active dans ce processus. Elle aurait dû commencer ce processus HIER. Contrairement aux problèmes d’ordre juridique, définir et mettre en place des protocoles d’essai est un processus extrêmement compliqué. Pense-t-elle qu’elle dispose des connaissances ou du personnel qualifié qui peut gérer ce problème ? Les sociétés de relations publiques et les avocats ne sont d’aucune aide dans ce cas. Définira-t-elle quels essais devraient être effectués pour chaque liquide, ce qui devrait être fait dans chaque atomiseur, quels protocoles suivre et pour quelles raisons ? En réalité, elle ne sait rien des essais sur les cigarettes électroniques. Les protocoles à but règlementaire devraient avoir des normes spécifiques. Ces normes devraient être réalisables, réalistes, précises et reproductives. Et actuellement, nous ne savons rien sur rien.

Par exemple, je suis le seul à avoir réalisé des essais cytotoxiques sur la vapeur de cigarettes électroniques. Les études ont été publiées dans des revues médicales évaluées par des pairs. Cependant, afin d’appliquer tout protocole à des fins règlementaires, vous devez prendre en compte une très longue liste de paramètres : stabilité des cellules, précision des résultats, la reproductibilité des résultats (qui est déjà un protocole compliqué à elle-seule et non pas à faire uniquement quelques répétitions), la régularité des résultats et la justesse du protocole à des fins d’essai.

Vous devriez commencer par planifier et programmer toute la procédure, définir quels essais et protocoles pourraient théoriquement être utilisés et tester chacun d’entre-deux à l’aide d’un protocole préétabli pour définir lequel sera choisi. Vous devriez commencer par définir un dispositif d’e-cigarettes normalisé qui sera utilisé comme un élément de comparaison pour chaque essai. Après avoir complété tous les essais, vous devriez préparer un rapport détaillé (et même une publication) avec les résultats et l’explication appropriée de la procédure et des raisons pour proposer le protocole X au lieu du protocole Y. Qui s’en chargera ? Les avocats ? Les sociétés de relations publiques ? Les businessmen ? Qui se chargera du financement ? Les vapoteurs ? (comme certains de l’industrie de l’e-cigarette l’avaient déjà proposé publiquement par le passé). Y’a-t-il des personnes qui ont les connaissances et l’expérience en termes de recherches sur les cigarettes électroniques impliquées dans ce processus ? Pas que je sache (nous sommes une poignée de scientifiques impliqués dans ces recherches, nous nous connaissons donc les uns les autres et nous restons en contact quotidiennement). Vous pourriez trouver de nombreux laboratoires prêts à faire ces essais mais s’ils n’ont aucune idée du produit en lui-même, ils ne sont que des scientifiques respectés incapables d’aider dans ce domaine (je dispose de nombreux exemples pour cela).

J’ai peur qu’il ne soit déjà trop tard. Tout ce processus prend beaucoup de temps et nécessite beaucoup de programmation et de fonds. En réalité, il existe un risque élevé que toute proposition inadéquate et mise en œuvre ultérieure tuera la cigarette électronique. Le manque de connaissance et d’essai et le manque de proposition basée sur des preuves est plus dangereux que la DPT elle-même. C’est l’industrie de la cigarette électronique qui est désormais l’ennemi numéro un de l’e-cigarette suite à son inactivité et à son manque de rapidité et de méthodologie.

J’espère que ceci ne sera pas perçu comme une attaque contre l’industrie mais comme un conseil. Du point de vue de la santé publique, il est primordial que des essais appropriés et réalistes soient effectués, qui garantissent la qualité du produit sans trop le restreindre. Jusqu’à aujourd’hui, la mentalité et l’approche de l’industrie de la cigarette électronique est totalement erronée, et je ne suis pas sûr que nous disposions d’assez de temps pour changer cela. Cependant, mieux vaut tard que jamais.

-Fin de propos de K. Farsalinos


Si vous êtes professionnel français et que cet article vous a fait réagir, rapprochez-vous sans plus attendre des associations FIVAPE ou SYNAPCE.


Propos traduits de l’anglais d’après l’article original : Is e-cigarette industry the biggest enemy of the e-cigarette today?

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