Un récent rapport parlementaire encourage le gouvernement à réduire ses financements à destination de l’OMS si celle-ci continue de lutter contre le vapotage.
Ce qu’il faut retenir du rapport parlementaire :
- Les auteurs préconisent à la délégation britannique de chercher des alliances avec d’autres délégations afin de défendre la stratégie de réduction des risques auprès de l’OMS lors de la prochaine réunion de la CCLAT.
- Le Royaume-Uni pourrait réduire le montant des financements qu’il alloue à l’OMS si celle-ci continue de lutter contre le vapotage.
- Le rapport note que l’OMS semble chercher les preuves qui l’arrangent afin de justifier sa politique anti-vape, au lieu de baser sa politique sur les preuves existantes.
- La forme actuelle de la CCLAT pourrait ne plus être en adéquation avec l’époque actuelle.
- Plusieurs fuites laissent penser que l’OMS devrait bientôt demander à ce que la vape soit considérée comme le tabac.
- L’OMS semble avoir oublié que la réduction des risques fait partie des principes fondateurs de la CCLAT.
- L’organisme de santé aurait menacé à plusieurs reprises différentes associations de défense de la vape. Il chercherait à éloigner toute entité dont les idées ne sont pas en accord avec les siennes.
Des parlementaires s’expriment sur la vape et l’OMS
S’il y a bien deux entités dans le monde dont les points de vue divergent diamétralement concernant la cigarette électronique, ce sont bien le Royaume-Uni et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). D’un côté, nous avons un pays qui, depuis plusieurs années, a choisi de faire du vaporisateur personnel, un outil majeur dans sa lutte contre le tabagisme, prônant la logique de réduction des risques. De l’autre, un organisme qui souhaiterait que les fumeurs arrêtent de fumer du jour au lendemain, et cessent toute consommation de nicotine, que celle-ci soit risquée, moins risquée, voire sans risque.
En 2014, le Royaume-Uni créait l’All-Party Parliamentary Group (APPG) pour la vape, un groupe parlementaire dont l’objectif est « d’explorer la réponse parlementaire et réglementaire la plus appropriée à l’e-cigarette et sensibiliser les décideurs politiques à l’e-cigarette et aux questions de politique publique qui s’y rapportent ». Il y a quelques jours, ce groupe a publié un nouveau rapport, fruit d’une enquête lancée au début de l’année dernière suite aux dernières prises de position antivape exprimées par l’OMS en janvier 2020.
Au cours de son enquête, le groupe parlementaire a organisé deux sessions de témoignages destinées à étudier les points suivants :
- La transparence et la responsabilité de la COP9 et la manière dont l’ordre du jour est établi ; et si les pays sont (ou ne sont pas) consultés de manière appropriée dans le travail inter-sessionnel.
- Si la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) est toujours adaptée à son objectif.
« L’APPG voulait évaluer si la position actuelle de l’OMS sur le vapotage était conforme à ses principes directeurs et si la CCLAT restait adaptée à un paysage en évolution où les nouvelles technologies ont permis de nouvelles stratégies de réduction des risques », précise Mark Pawsey, fondateur du groupe parlementaire.
5 points étudiés
En plus des points étudiés lors des témoignages recueillis, l’enquête parlementaire s’est également articulée autour de 5 autres axes :
1 – Quel problème ces politiques et positions sont-elles censées résoudre ?
Le vapotage a été préconisé par Public Health England comme un facteur contribuant de manière significative au sevrage tabagique au Royaume-Uni. En tant que tel, quelle est la justification politique de l’intervention de l’OMS, et comment se compare-t-elle et diffère-t-elle de la politique actuelle du gouvernement britannique ?
Comment le gouvernement britannique s’assure-t-il que son expérience nationale et les preuves à ce sujet qu’il récolte au quotidien sont reflétées dans les discussions au sein de l’OMS et avec d’autres organismes de réglementation ?
Des discussions sont-elles en cours au sein de l’OMS et/ou de la CCLAT sur la contribution du vapotage au sevrage tabagique et à la réduction des risques ?
2 – Dans quelle mesure la Conférence des Parties 9 (COP9) de la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT) justifiera-t-elle les mesures qu’elle propose ?
Quelle visibilité auront des pays comme le Royaume-Uni dans les rapports de la COP9 sur le vapotage ? Comment la délégation britannique à la COP9 de la CCLAT s’assure-t-elle que la totalité des preuves scientifiques disponibles et l’expérience des États-nations sont prises en compte ?
3 – Transparence et consultation
Quels sont les conseils et les preuves que reçoit le secrétariat de la COP9 de la CCLAT de l’OMS et comment cela conduit-il à ses positions politiques ? Quels sont les critères de l’OMS et de ses organes consultatifs (TobReg et TobLabNet) pour inviter les pays à fournir des informations et/ou à être consultés sur des sujets pertinents ?
4 – Explorer la menace de conséquences involontaires des propositions de la Conférence des Parties à la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT)
Le titre se suffit à lui-même.
5 – Étudier la CCLAT
Dans quelle mesure l’OMS s’est-elle éloignée des objectifs fondamentaux énoncés dans la CCLAT, compte tenu de son engagement initial en faveur de la réduction des risques ?
La CCLAT est-elle toujours adaptée à son objectif dans sa forme actuelle, étant donné que les produits à risque réduit disponibles sur le marché sont désormais très répandus et ont considérablement évolué depuis 2003, date à laquelle la CCLAT a été adoptée ?
En élaborant le régime réglementaire pour les produits de la vape dans le cadre de la CCLAT, l’objectif de la Convention, énoncé à l’art. 3 de la CCLAT est instructif, car son objectif déclaré est de « protéger les générations présentes et futures des conséquences sanitaires, sociales, environnementales et économiques dévastatrices de la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée du tabac …. afin de réduire continuellement et substantiellement la prévalence du tabagisme et de l’exposition à la fumée du tabac ».
Si la CCLAT doit rester pertinente et répondre aux besoins contemporains, est-il nécessaire de faire preuve d’une plus grande souplesse et de réagir rapidement aux nouveaux développements des systèmes électroniques de distribution de nicotine afin d’éviter des approches réglementaires divergentes ?
Le pays pourrait réduire ses financements à l’OMS en cas d’attaque contre la vape
Entre les années 2016 et 2021, le rapport indique que le Royaume-Uni a apporté un soutien financier de 15 millions de livres sterling, destiné à la CLLAT de 2030. Plus récemment, le pays s’est également engagé à devenir le premier pays donateur à l’OMS avec une augmentation de son financement initial de 30 %, le portant ainsi à 340 millions de livres sterling au cours des quatre prochaines années.
Selon l’APPG, deux documents de l’OMS auraient fait l’objet d’une fuite récemment. Ceux-ci montreraient que l’organisme de santé étudie la possibilité de préconiser que les produits à risque réduit soient traités de la même manière que les cigarettes ou de les interdire purement et simplement.
Afin de lutter contre ces potentielles prises de position, les auteurs du rapport britannique rappellent à leur gouvernement que si jusqu’à présent, la délégation du pays était tenue d’adhérer à l’opinion consensuelle au sein de l’Union européenne, depuis le Brexit, elle est en mesure non seulement de tracer sa propre voie en termes de législation nationale sur le vapotage et les produits à risque réduit, mais aussi de prendre sa place sur la scène mondiale en tant que leader dans la réglementation pragmatique et efficace de la santé.
Le rapport préconise ainsi au Royaume-Uni « d’examiner ses options en ce qui concerne le financement futur de l’OMS », au cas où l’OMS défendrait une position sur le vapotage et les produits à risque réduit qui est contraire à la politique nationale du Royaume-Uni, lors de la prochaine réunion qui est prévue en novembre 2021.
Le document stipule également que la délégation britannique devrait « chercher à établir des relations solides » avec celles d’autres États membres qui partagent son approche scientifique et de réduction des dommages, en vue de former une coalition internationale pour réduire les dommages causés par les cigarettes combustibles. En plus de proposer la création d’un groupe de travail sur la réduction des risques.
La Convention-cadre pour la lutte antitabac n’est plus adaptée à son objectif
« L’objectif de la présente Convention et de ses protocoles est de protéger les générations présentes et futures des conséquences sanitaires, sociales, environnementales et économiques dévastatrices de la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée du tabac en offrant un cadre pour les mesures de lutte antitabac que les Parties doivent mettre en œuvre aux niveaux national, régional et international afin de réduire continuellement et sensiblement la prévalence du tabagisme et l’exposition à la fumée du tabac », stipule l’article 3 de la Convention-cadre pour la lutte antitabac.
Pour les auteurs, la forme actuelle de la CCLAT « laisse peu de place » au concept selon lequel certains produits du tabac sont moins nocifs que d’autres, ou que les produits à faible risque pourraient constituer une alternative efficace aux produits à plus haut risque.
Pourtant, comme le stipule la CCLAT elle-même, « la lutte antitabac’ désigne une gamme de stratégies de réduction de l’offre, de la demande et des dommages qui visent à améliorer la santé d’une population en éliminant ou en réduisant sa consommation de produits du tabac et son exposition à la fumée du tabac ».
Selon le rapport, elle se contredit ainsi elle-même en autorisant la réduction des risques comme une option potentielle pour permettre la lutte contre le tabagisme, tout en n’acceptant pas qu’elle existe réellement en tant que concept, et encore moins en tant qu’option réaliste qui est désormais disponible sur le marché.
Selon Clive Bates, directeur de Counterfactual et ancien directeur d’Action on Smoking and Health (ASH), l’OMS se concentrerait en fait sur la recherche de preuves pour justifier la politique qu’elle souhaite, plutôt que d’évaluer les preuves pour déterminer les politiques qui permettraient le mieux de réduire les risques.
De plus, les auteurs rappellent qu’en 1978, l’OMS a accepté le principe de Patient and Public Involvement (PPI).
Ce principe est considéré comme une norme d’excellence en matière de recherches sur les questions de santé puisqu’il implique que celles-ci tiennent compte des expériences menées dans la vie réelle, avec ou par des citoyens ordinaires. La prochaine réunion devrait ainsi être l’occasion de remettre au premier plan ce principe dont le Royaume-Uni est un parfait exemple.
L’OMS menace des associations du vapotage
Durant son enquête, l’APPG a été contacté par la New Nicotine Alliance (NNA), association de défense des utilisateurs de cigarettes électroniques au Royaume-Uni.
Celle-ci a indiqué au groupe parlementaire qu’en 2014, sa directrice a rédigé une lettre à destination de la directrice générale de l’OMS afin de lui demander de reconsidérer sa position sur le vapotage. En plus de n’avoir reçu aucune réponse, la NNA a par la suite été exclue de toutes les autres consultations de l’OMS. De plus, une « campagne d’intimidation » se poursuivrait encore à ce jour.
4 ans plus tard, en 2018, juste avant que ne se tienne une nouvelle réunion du COP8, l’International Network of Nicotine Consumer Organisations (INNCO), autre association uniquement composée de vapoteurs non rémunérés, a contacté l’OMS afin d’obtenir le statut d’observateur lors de la réunion prévue quelques semaines plus tard. En plus de ne pas avoir reçu cette autorisation, ils auraient été « activement diffamés » pour leur tentative d’engagement.
Pour les auteurs, ces agissements démontrent que l’approche adoptée par les alliés du Secrétariat de la Conférence des Parties de la CCLAT consiste de plus en plus à confondre l’engagement des consommateurs avec celui de l’industrie du tabac.
Une pensée confirmée par une récente recherche réalisée par l’OMS sur le lobbying de l’industrie du tabac qui en serait arrivée à la conclusion que celui-ci passerait par « des groupes de vapoteurs influents qui sont financièrement indépendants, mais dont le message est cohérent avec l’industrie du tabac ».
Là encore, pour le groupe parlementaire, cette stratégie est destinée à éteindre tout engagement potentiel de la part de tout membre du public qui a un point de vue différent de celui du Secrétariat de la COP de la CCLAT et de ceux qui l’influencent, comme Bloomberg Philanthropies.
Les recommandations du groupe parlementaire britannique
- Maintenir notre position nationale forte sur la réduction des méfaits du tabac. Si l’OMS ne veut pas adhérer à ce principe et continue à poursuivre une approche axée sur l’interdiction des produits à risques réduits, le Royaume-Uni devrait alors envisager de réduire considérablement son financement.
- Le Royaume-Uni a intégré avec succès le vapotage dans sa stratégie de réduction des risques pour la santé publique. Le Royaume-Uni devrait chercher à faire valoir cette position lors de la COP9 et encourager l’OMS à se laisser guider par les preuves.
- Aligner notre stratégie pour la COP9 sur notre position nationale et veiller à ce que la voix du Royaume-Uni soit entendue.
- La CCLAT doit être mise à jour afin de refléter l’opportunité positive pour la santé publique des produits à base de nicotine à faible risque qui ont été introduits depuis la finalisation du texte en 2003.
- Le Royaume-Uni doit rejeter toute décision de la CCLAT qui limiterait l’utilisation par les adultes du vaping et des systèmes d’administration de nicotine à risque réduit.
- La délégation britannique à la COP9 devrait mettre en avant le travail accompli au Royaume-Uni pour faire baisser les taux de tabagisme ainsi que le consensus d’opinions des organismes de santé publique et des ONG britanniques sur la sécurité et l’efficacité réelle du vapotage et d’autres produits à risques réduits dans le cadre du sevrage tabagique et des efforts de réduction des risques.
- La délégation britannique devrait faire référence à notre engagement ferme de veiller à ce que les produits à risques réduits ne soient pas confrontés à des problèmes liés à de prétendus « effets passerelle » et à l’adoption par les jeunes, et devrait mettre en évidence les résultats clairs que nous avons sur ce point.
- Le Royaume-Uni doit s’opposer à toute décision proposée par le Secrétariat de la CCLAT ou par une Partie qui inclurait les produits du vapotage dans le champ d’application des recommandations politiques sur les produits nouveaux et émergents, ou qui assimilerait les produits du vapotage aux produits du tabac combustibles.
- La délégation britannique à la COP9 doit proposer la création d’un groupe de travail de la COP sur la réduction des risques.
John Dunne, directeur de l’association de défense du vapotage UKVIA (UK Vaping Industry Association) a applaudi ce rapport et déclaré :
« Il est grand temps que l’industrie de la vape se dresse contre l’Organisation mondiale de la santé (…) Il est essentiel que le secteur du vaping et les anciens fumeurs devenus vapers parlent d’une seule voix pour faire pression sur l’OMS afin qu’elle change ses habitudes. En tant qu’organisme censé promouvoir la santé, assurer la sécurité du monde et servir les personnes vulnérables, l’OMS a la responsabilité morale de faire ce qu’il faut ».
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