Les e-liquides seront-ils taxés un jour en France ? A certains endroits, ils le sont déjà, avec une logique un peu curieuse. Ainsi, sur l’île de la Réunion, une taxe de 48,5 % est appliquée sur les liquides non nicotinés.

Joli nom et laide taxe

Sur l’île de la Réunion, le prix des e-liquides sans nicotine va soudainement grimper : une taxe régionale va s’y appliquer, d’un montant de 48,5 % si le liquide ne contient pas de nicotine. En revanche, pour les liquides nicotinés, la taxe ne sera “que” de 6,5 %  (4 % et 2,5 % de taxe locale et régionale additionnés). Il s’agit d’une tradition joliment baptisée « octroi de mer ».

« L’octroi de mer est une imposition spécifique dans les départements d’Outre-mer de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de Mayotte et de La Réunion : les opérations soumises à l’octroi de mer sont les importations de biens et les livraisons de biens, faites à titre onéreux, par des personnes qui y exercent des activités de production » explique sur son site la Direction des Affaires Juridiques (DAJ) du Ministère de l’économie et des finances.

Cette taxe est très ancienne, on en retrouve la trace depuis 1670 dans les archives des douanes, ce qui en fait la plus ancienne mesure fiscale de France. Elle était censée protéger l’économie locale des importations moins chères, et le fruit de sa collecte est reversé aux administrations locales. L’octroi de mer est appliqué à tout ce qui vient de l’extérieur, quelle qu’en soit la provenance.

Oui, techniquement, il y a bien une taxe d’importation sur un produit importé (ou exporté) de la France Métropolitaine à l’île de la Réunion, qui est un département français.

Logiques biaisées

Malheureusement, cette taxe contribue à l’augmentation locale des prix, et a un impact négatif sur « la cherté de la vie » selon un rapport de la Cour des Comptes daté de mars 2024. Malgré les demandes de la Commission Européenne, qui juge qu’il s’agit d’une entrave à la concurrence, la France rechigne à la supprimer, et a décidé de la prolonger jusqu’en 2027.

Les raisons à cela sont simples : en Martinique, pour laquelle on dispose des chiffres les plus récents, la perception de l’octroi de mer représente 48 % des entrées fiscales des villes de moins de 10000 habitants, et 37 % des plus grandes. Une coupe sévère au budget que l’État devrait compenser.

Le montant de l’octroi de mer est fixé régionalement ou par la représentation unique des collectivités, ce qui introduit des disparités parfois étranges. Le fait que la taxe soit largement moins élevée sur les liquides nicotinés que les non-nicotinés vient du fait que la nicotine est considérée comme un produit de consommation courante.

En métropole, l’octroi de mer a été supprimé en 1943. Nul doute que, sil elle avait été maintenue, à des taux aussi élevés, le visage de la vape française serait bien différent.

Sources 

Merci à Yannick pour ses informations. 

Notice des douanes sur l’octroi de mer

Notice des douanes sur l’octroi de mer à la Réunion

Lettre de la Direction des Affaires Juridiques

Rapport de la Cour des comptes

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