Une audition qui a permis à l’association de défendre la cigarette électronique suite à des propos tenus par l’industrie du tabac lors de sa rencontre avec les sénateurs.

Big Tobacco parle de vape

Entre les mois de février et avril, la Commission des affaires sociales du Sénat, dans le cadre de sa mission d’évaluation et de contrôle de la Sécurité sociale (Meccs), a organisé plusieurs auditions au sujet de la fiscalité comportementale. Ce terme désigne toutes les taxes et impositions visant à influencer le comportement des consommateurs afin de les détourner de pratiques jugées nocives. Dans le cadre de cette mission, la Meccs a auditionné des représentants de l’industrie de l’alcool, des boissons sucrées, de l’alimentation grasse ou sucrée, mais également de l’industrie du tabac, dont la Confédération des buralistes.

Le mardi 27 février, lors de l’audition des représentants de l’industrie du tabac (vidéo), un sujet qui n’était pourtant pas directement concerné par l’audition, a été mis sur la table : le vapotage. Après avoir répété à plusieurs reprises que la politique antitabac française, se basant uniquement sur l’augmentation du prix des cigarettes, ne fonctionnait pas, les cigarettiers ont proposé diverses solutions pour en améliorer les bénéfices. Pour ce faire, ils n’ont pas hésité à parler de la cigarette électronique et des autres produits à risque réduit comme le tabac chauffé ou les sachets de nicotine.

Taxation et monopole du marché aux buralistes

À ce sujet, Big Tobacco a soulevé plusieurs pistes de réflexion comme offrir aux buralistes, « des professionnels de la nicotine (…) préposés de l’État », l’exclusivité de la vente des produits du vapotage, la mise en place de différentes mesures pour s’assurer que leur vente ne se fait qu’auprès de personnes majeures, notamment grâce à des systèmes de reconnaissances faciales (comme c’est par exemple le cas aux Pays-Bas, N.D.L.R.), ou encore la mise en place de taxes.

Concernant ce dernier point, Stéphanie Martel, présente lors de l’audition en tant que représentante de Philip Morris France (PMI), a décrit la fiscalité actuelle des produits alternatifs (cigarette électronique, tabac chauffé, etc.), comme étant incohérente. « Le tabac chauffé est quatre fois plus taxé en France que la moyenne européenne, tandis que la cigarette électronique n’est pas soumise à droit d’accise, alors qu’elle l’est dans 19 États européens ». Il conviendrait donc d’adapter « un niveau de taxe modéré pour la cigarette électronique, qui n’est pas sans risque », et diminuer la taxation du tabac chauffé dont la nocivité est également réduite par rapport au tabac combustible. « Ainsi seulement pour nous la fiscalité gagnera en efficacité et jouera vraiment un rôle de taxe comportementale en encourageant les fumeurs à opter pour de meilleures solutions que la cigarette au lieu d’alimenter leur report vers le marché illicite ».

La problématique des arômes a également été soulevée, mais par les Sénateurs cette fois. Ces derniers ont mis en avant les couleurs et arômes attractifs de certains produits de la vape et le danger qu’ils représentent ainsi pour les plus jeunes. Et la réaction des cigarettiers ne s’est pas fait attendre : « Les produits du vapotage des personnes présentes ici autour de la table ne sont pas concernés par ces sujets », a déclaré Cyril Lalo, représentant d’Imperial Brands. « Il y a eu depuis plus de dix ans en France des produits du vapotage avec des arômes assez variés, mais pas d’arômes liés à la confiserie, pas de packaging et de conditionnements qui étaient directement attractifs vis-à-vis des jeunes, si ce n’est depuis quelques années, beaucoup de produits qui viennent de Chine et des États-Unis et d’ailleurs ». Selon lui, ces produits « n’ont rien à faire sur le marché, clairement », et sont le fruit du refus du ministère de la Santé de travailler avec les cigarettiers pour mettre un cadre autour de ce sujet.

SOVAPE réagit

Comme l’indique l’association de défense de la cigarette électronique, SOVAPE, dans son communiqué de presse, légitimement, celle-ci a demandé à être auditionnée par la commission sénatoriale afin de présenter son point de vue au sujet du vapotage. Une demande qui a été acceptée et conduit à une audition qui s’est déroulée le 15 avril dernier.

Lors de cette audition (non-filmée), l’association a dû répondre à diverses questions posées par les rapporteurs de la commission. Des questions très précises dont la pertinence semble montrer que la problématique a été correctement appréhendée par le Sénat. SOVAPE a ainsi pu s’exprimer sur différents sujets :

  • Les facteurs conduisant à un maintien d’un niveau élevé du tabagisme en France;
  • expliquer et communiquer sur les principales études scientifiques relatives à l’efficacité du vapotage pour arrêter de fumer, l’effet passerelle, et les risques sanitaires liés à l’utilisation du vaporisateur personnel;
  • présenter le marché du vapotage en France, ses principaux enjeux, ses perspectives d’évolution, la part des différents acteurs liés à l’industrie du tabac, etc.;
  • s’exprimer sur les profits que pourrait faire l’industrie du tabac grâce au développement de la cigarette électronique et comment elle pourrait y parvenir;
  • donner son avis sur la législation actuelle concernant l’interdiction de la publicité, de la vente aux mineurs, ou encore de vapoter dans les lieux publics;
  • réagir à la limitation des arômes prévue par le Programme national de lutte contre le tabagisme (PNLT) ainsi que la mise en place du paquet neutre pour les produits de la vape;
  • donner son avis sur une potentielle taxation de la vape;
  • parler du respect de la loi quant à l’interdiction de vente aux mineurs des produits de la vape, dont le CNCT a déclaré qu’elle n’était pas respectée par les buralistes concernant les cigarettes;
  • donner son opinion concernant la potentielle mise en place d’un système de licences pour les vape shops,
  • et enfin s’exprimer quant à la possibilité de favoriser le recours au vapotage afin de lutter contre le tabagisme. À ce sujet, SOVAPE a été encouragé à présenter des exemples de politiques étrangères intéressantes, expliquer s’il vaut mieux limiter autant que possible le vapotage aux personnes voulant sortir du tabagisme ou s’il est préférable de faire en sorte que les nouveaux consommateurs vapotent au lieu de fumer, mais également donner des pistes concernant des actions concrètes que le gouvernement devrait mettre en place à ce sujet.

Comme à son habitude, SOVAPE a répondu précisément à chaque question qui lui était posée. Nathalie Dunand, Présidente de l’association ayant participé à l’audition, nous a indiqué avoir rencontré des rapporteurs « intéressés et à l’écoute ». La qualité et la pertinence des questions posées par les Sénateurs ont permis de « vraiment exprimer ce qu’on voulait exprimer ». Elle ajoute que malgré l’agenda très chargé des rapporteurs, il n’y a pas eu besoin de trop insister pour être reçu, laissant ainsi percevoir « une réelle curiosité sur le sujet ».

Le compte-rendu complet de l’audition est disponible ici.

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