Selon certaines organisations de lutte anti-tabac américaines l’industrie du tabac introduirait des arômes dans ses cigarettes électroniques afin de piéger les jeunes. Pour illustrer ses propos une association cite des saveurs qui sont paradoxalement produites par des concurrents directs de cette industrie.

L’industrie du tabac ne propose en fait que très peu de saveurs dans ses cigarettes électroniques

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L’offre d’arômes est un facteur différenciant pour les acteurs de la vape indépendants

Aux États-Unis, il est courant de constater que les opposants de la vape dénoncent une stratégie de l’industrie du tabac qui viserait à entraîner une nouvelle génération de consommateurs dans le tabagisme. Pour attirer ainsi les plus jeunes vers le chemin de l’addiction, les cigarettiers développeraient des saveurs pour cigarette électronique particulièrement attractives pour les “enfants”. La théorie voudrait que les jeunes qui vapotent aujourd’hui se tournent demain vers le tabac fumé.

Cette crainte d’un “effet passerelle” est notamment défendue par le Public Health Law Center, une organisation nationale américaine à but non lucratif. Elle aide les politiques, les professionnels de santé et divers acteurs à utiliser l’arsenal législatif pour améliorer la santé publique.

Dans l’édition “Eté 2015” d’une revue qu’elle publie périodiquement, cette association dénonce en l’occurrence les saveurs “pastèque”, “maïs soufflé”, “colas”, “glace au chocolat”, ou encore “limonade rose”. L’organisme s’interroge alors : “Qui peut dire que ces arômes […] ne sont pas conçus pour plaire principalement aux jeunes ?

Le professeur Michael Siegel de l’université de Boston qui a recensé les arômes proposés par l’industrie du tabac dans ses e-cigarettes, constate qu’elle ne produit en fait aucune des saveurs mentionnées par l’association. L’absence d’un distingo entre vape indépendante et industrie du tabac suggère en outre que l’organisme pourrait tout simplement se tromper de cible. L’industrie de la vape indépendante n’a en effet aucun intérêt à ce que ses clients se remettent à fumer, bien au contraire.

Le fait important que souligne une énième fois Siegel réside dans cette théorie de la passerelle vers le tabagisme, qui jusqu’à présent a toujours été démentie par les différentes enquêtes, et qui constitue toujours l’une des craintes principales de ces leaders d’opinions. Si en effet les jeunes expérimentent la cigarette électronique, seuls ceux qui fument déjà l’utilisent régulièrement.

Pourquoi l’industrie du tabac se contente-t-elle de ne proposer que très peu de saveurs ?

Cette situation pourrait en premier lieu s’expliquer par un environnement administratif peu favorable à l’innovation. En effet si les cadres réglementaires américains et européens sont sur le point de prendre des formes précises, la multiplication des tests et des notifications à effectuer sur les produits mis sur le marché vont rendre les procédures administratives de plus en plus coûteuses. Plus un catalogue sera restreint, plus facile et moins chère sera alors sa commercialisation.

Une seconde raison pour laquelle les grandes firmes ne se lanceraient pas dans une offre très variée côté saveurs pourrait également prendre son sens dans l’incertitude scientifique qui prédomine encore le marché. Les arômes qui constituent aujourd’hui l’une des grandes interrogations scientifiques du secteur sont en effet aujourd’hui sujets à des problématiques techniques qui demandent une certaine prudence. Plus le e-liquide est riche, c’est à dire utilisant de multiples arômes, plus sa nature devient complexe. Réduire alors sa recette à quelques ingrédients bien maîtrisés pourrait constituer une assurance technique que le fabricant pourrait ainsi suivre dans son développement. Certaines sociétés indépendantes ont déjà pris par exemple cette voie dans la commercialisation de leurs e-liquides.

Une stratégie purement politique pourrait également être à l’origine de ce choix. Si le législateur observe le secteur avec beaucoup de crainte, proposer des produits peu attractifs dans leurs saveurs pourrait être le moyen de ne pas sur-inquiéter les administrations. Ce fût par exemple le cas de la société NJOY impliquée dans le premier procès en 2009 face à la FDA qui a pendant longtemps vanter son sérieux et sa responsabilité face à la problématique de la vape chez les mineurs. En limitant ses saveurs à du tabac ou de la menthe, difficile de se faire accuser de vouloir séduire les jeunes. Ce n’est qu’en 2014 que la firme s’est lancée dans le e-liquide complexe.

Un choix limité d’arômes pourrait enfin n’être qu’un trait culturel d’une industrie modelée sur des offres devenues presque binaires. Entre la légère ou la forte, la mentholée ou la normale, l’offre se doit peut être de refléter un discours commercial déjà bien connu et qui prévaut depuis des dizaines d’années sur les étales des buralistes. Le consommateur est en terrain connu et le processus d’achat reste ainsi facilité puisque faisant appel aux mêmes codes de dénomination.

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