Cette étude publiée par l’équipe de Konstantinos Farsalinos porte sur les effets aigus (juste après la consommation) de l’e-cigarette sur la fonction cardiaque, en comparaison des effets obtenus après avoir fumé une cigarette.
Fumer comporte un risque important pour le fonctionnement du cœur
Les effets du tabac fumé sur la fonction cardiaque viennent de l’inhalation des produits de combustion, en particulier le monoxyde de carbone (CO) et des gaz oxydants. Puisqu’il n’y a pas de combustion dans l’e-cigarette, mais vaporisation, ces produits dangereux ne sont pas présents dans la vapeur.
Ce risque dû au tabagisme est tellement important, qu’il se produit aussi lorsqu’une personne est exposée passivement (sans fumer elle-même) à la fumée de tabac. C’est une des raisons qui a motivé les interdictions de fumer dans les lieux publics, afin de protéger surtout les employés qui étaient exposés plusieurs heures par jour.
Une étude réalisée en parallèle chez des fumeurs et des vapeurs
Cette étude a recruté 36 fumeurs (âge moyen 36 ans) fumant au moins 15 cigarettes par jour depuis au moins 5 ans. La raison pour recruter des fumeurs relativement dépendants, est que la majorité des vapeurs sont des ex-fumeurs plutôt dépendants.
Les fumeurs devaient fumer une cigarette, et les mesures ont été prise avant et après consommation de cette cigarette. Parallèlement, 40 vapeurs (âge moyen 35 ans), ayant arrêté de fumer depuis au moins 1 mois, ont vapé pendant 7 minutes en utilisant une e-cigarette de seconde génération avec un liquide dosé à 11 mg/ml, et les mêmes mesures ont été prises avant et après la période de vape.
Le protocole de l’étude
Cette étude a été réalisée en enregistrant la fonction cardiaque par échographie. Les participants devaient être à jeun, ne pas avoir bu d’alcool ou de café, depuis 4h, de même ils ne devaient pas avoir fumé ou vapé depuis 4h. Tous les participants ont subi une échographie de contrôle avant de fumer ou de vaper. Les fumeurs étaient envoyés dans une pièce pour fumer une cigarette, puis après 5 minutes de repos ont subi une seconde échographie. De même, les vapeurs ont été envoyés dans une autre pièce (pour éviter l’exposition à la fumée passive) pour vaper librement pendant 7 minutes, puis après 5 minutes de repos ont subi une seconde échographie également.
La e-cigarette utilisée était une eGo-T (3,5 volts, 650 mAh) couplée à un cartomiseur eGo-C (1,1 ml) avec un liquide concentré à 11 mg/ml (USA mix de Nobacco, Grèce), dont les caractéristiques étaient : PG > 60%, linalool < 5%, nicotine < 10%, essence de tabac < 5%, et méthyle vanilline < 1%. Aucune impureté (nitrosamines, ou hydrocarbures polycycliques aromatiques) n’ont été détectés après analyse.
La fréquence cardiaque et la pression artérielle ont été mesurées pendant l’échographie. Des mesures standards de l’activité cardiaque (utilisées couramment pour le diagnostic de maladies cardiaques) ont été mesurées par échographie.
Ce que montre l’étude
Comme l’on pouvait s’y attendre, l’utilisation d’une e-cigarette chez les vapeurs n’a provoqué aucune malfonction de l’activité cardiaque alors que la consommation d’une cigarette chez les fumeurs a montré des effets aigus (à court-terme) sur la fonction cardiaque (en particulier sur la mesure de la pression artérielle diastolique, celle qui correspond au chiffre le plus petit quand vous prenez votre tension ; ex : 12/7 ou 13/8).
En gros, cela veut dire que la fumée de cigarette rend vos artères plus rigides et moins aptes à réagir au modifications de la fréquence cardiaque ou l’augmentation de la pression artérielle (nécessaire en cas d’effort par exemple), et que cela ne semble pas se produire lorsque que vous vapez.
Ce que ne montre pas l’étude : ses limitations
Tous d’abord les auteurs reconnaissent que cette étude a été réalisée sur un petit nombre de sujets, et qu’elle ne porte que sur les effets aigus (immédiats après consommation). Cette étude ne permet pas de montrer que l’e-cigarette est parfaitement sûre pour le système cardiovasculaire à long-terme. Cela nécessitera des études complémentaires lorsque l’on aura assez de recul avec des vapeurs qui vapent depuis plusieurs années.
L’étude n’a aussi montré que l’effet d’une séance de vape de 7 minutes, rien ne dit qu’une séance plus longue n’aurait pas d’effets, mais cette durée a été choisie pour coller au plus près de la consommation d’une cigarette, qui chez les fumeurs étudiés a pris 5 minutes.
De plus, il est clair (selon une autre étude de Farsalinos et coll.) que les e-cigarettes de nouvelle génération (en particuliers les mods) délivrent la nicotine de façon plus intense et plus rapide, ce que ne peuvent pas faire les e-cigarettes de seconde génération étudiées ici.
Enfin, ces résultats ne sont pas applicables à d’autres liquides qui pourraient contenir des impuretés, en particuliers lorsque la nicotine employée n’est pas de qualité pharmaceutique (pure à plus de 99%).
Conclusion
Cette étude, avec ses limites, monte que les effets aigus de la fumée de cigarette ne sont pas retrouvés après utilisation d’une e-cigarette. C’est la première étude sur les effets cardiovasculaires de l’e-cigarette chez les utilisateurs, et elle confirme les hypothèses selon lesquelles l’absence de produits de combustion fait que la e-cigarette peut être envisagée dans le cadre de la réduction du risque tabagique (arrêter de fumer, ou réduire sa consommation, mais pas nécessairement arrêter de consommer de la nicotine).
D’autres études seront bien sûr nécessaires pour disculper totalement l’e-cigarette de potentiels dangers sur la santé, même si l’on a peu de doutes qu’elle est considérablement moins dangereuse que le tabac, pour qui le doute n’est plus permis.
Conflits d’intérêts : Cette étude a été réalisée par l’équipe de K. Farsalinos sans aucun soutien financier. D’autres études par la suite ont été en partie financées par des entreprises d’e-cigarettes qui ont fourni des fonds indirectement à l’institution de K. Farsalinos (Centre de chirurgie cardiologique Onasis de Kallithea, Grèce).