L’identité de fumeur serait maintenue lors de l’utilisation du tabac chauffé, tandis que les vapoteurs la perdraient.
L’identité, un facteur psychologique important
Comme tout un chacun le sait, arrêter de fumer n’est pas qu’une question d’efficacité des traitements. La psychologie joue également un rôle prépondérant dans la complexe équation de la réussite du sevrage tabagique. Il y a quelques jours, une équipe de chercheurs britanniques s’est penchée sur les différences psychologiques qui existent entre les vapoteurs et les utilisateurs de tabac chauffé. Les scientifiques ont souhaité étudier1 un facteur particulier : l’identité du fumeur, dont ladite identité est « la représentation mentale de soi d’un individu en plus des sentiments qui y sont attachés », comme le décrivait en 1989, Jonathan Cheek, professeur de psychologie. En 2013, Tombor et coll. concluait que le fait d’avoir une identité de fumeur ou de non-fumeur jouait un rôle important dans le maintien ou l’arrêt du tabagisme.
Puisque de nombreuses études ont déjà démontré l’efficacité de la cigarette électronique et du tabac chauffé pour arrêter de fumer, les scientifiques britanniques ont souhaité évaluer l’impact psychopharmacologique de l’utilisation de ces deux produits. En remplaçant le tabagisme par le vaping ou le tabac à chauffer, les anciens fumeurs conservent-ils de la même manière leur identité de fumeur ?
Méthodologie
Pour répondre à cette question, 136 participants ont été recrutés. Tous habitaient Londres et se sont rendus au laboratoire de l’University College London pour y être interrogés durant une heure. Parmi les participants, 45 étaient des fumeurs exclusifs, 46 des vapoteurs exclusifs, et 45 des utilisateurs de tabac chauffé exclusivement. Concernant ces deux derniers groupes, ils devaient utiliser exclusivement, et régulièrement, leurs produits respectifs depuis une durée de trois mois au minimum, sans avoir fumé au cours de ce laps de temps. Concernant les fumeurs, ils devaient consommer un minimum de cinq cigarettes par jour depuis au moins six mois, et ne pas utiliser régulièrement de produits de la vape ou du tabac chauffé.
Les membres des groupes finaux avaient une moyenne d’âge de 37,1 ans. Ils avaient commencé à fumer à l’âge de 18 ans et fumaient en moyenne 14 cigarettes par jour pendant une durée de 17 ans. Les utilisateurs des produits de la vape et de tabac chauffé avaient cessé de fumer il y a respectivement 32 et 18 mois en moyenne.
Les questions posées aux membres des différents groupes l’ont été sur une échelle de Likert allant de 1 (pas du tout d’accord) à 5 (tout à fait d’accord). Ces questions concernaient l’identité de fumeur, les symptômes de sevrage tabagique, les envies d’utiliser leur produit, l’intention d’arrêter son utilisation, ou encore la perception des e-cigarettes et des produits du tabac chauffé (uniquement pour les deux groupes concernés). Différentes questions spécifiques à chaque produit ont également été posées, tout comme d’autres interrogations plus générales.
Moins de risque de rechute avec le vapotage
Dans leurs conclusions, les chercheurs indiquent que les groupes des fumeurs et des utilisateurs de tabac chauffé avaient une identité du fumeur plus forte que le groupe des vapoteurs. « L’identité tabagique peut avoir un impact sur l’abstinence tabagique et le changement d’identité est considéré comme essentiel à l’abandon durable du tabac qui pourrait être résistant aux signaux environnementaux de tabagisme, expliquent-ils. Le fait de conserver une image de soi en tant que fumeur malgré l’abandon du tabac peut être un facteur explicatif de la rechute du tabagisme ».
Pour les scientifiques, ces données indiquent qu’il existe un plus grand risque de rechute dans le tabagisme, ou de double utilisation (tabac à chauffer en continuant de fumer) chez les utilisateurs de tabac chauffé que chez les vapoteurs.
De plus, le tabac chauffé serait perçu comme similaire au tabagisme en termes de dépendance, « ce qui peut signifier une utilisation prolongée du produit et une plus grande difficulté à s’arrêter par rapport aux cigarettes électroniques ».
Bien que cette étude comporte certaines limites, comme un échantillon de participants de taille réduite ou un faible nombre de questions destinées à analyser l’identité de fumeur, elle permet de mettre en lumière la potentielle moindre efficacité du tabac chauffé dans le cadre du sevrage tabagique par rapport au vapotage.
Rappelons également que si le tabac chauffé est moins nocif pour l’organisme que le tabagisme, ses méfaits sur le corps seraient supérieurs à ceux du vapotage.
1 Dimitra Kale, Jamie Brown, Lynne Dawkins, Maciej L. Goniewicz, Corinna Leppin, Harry Tattan-Birch, Lion Shahab, Comparing identity, attitudes, and indicators of effectiveness in people who smoke, vape or use heated tobacco products: a cross-sectional study, Addictive Behaviors,2023,107933, ISSN 0306-4603, https://doi.org/10.1016/j.addbeh.2023.107933.
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