Quelle est l’attitude des forces de l’ordre face au CBD en France ? En cas de contrôle par la police ou la gendarmerie, que risque un possesseur ou un consommateur de CBD ? Nous avons posé la question aux principaux intéressés.
“Le CBD ? c’est quoi ?”
C’est donc directement dans les commissariats et gendarmeries, que nous sommes allés poser la question aux agents de terrain.
Que se passerait-il si quelqu’un était contrôlé en possession de CBD légalement acheté dans un magasin ?
Vous avez demandé la police
Pour un policier de la BAC dans une grande ville bretonne, en cas de contrôle, il ne se passera rien. “Si l’individu possède du CBD dans un contenant fermé, avec une facture en bonne et due forme, on laisse courir, sauf si on a reçu des consignes spécifiques”, explique-t-il. En nuançant toutefois : “ça dépend quand même de la forme que ça a. S’il s’agit d’un cosmétique ou d’un liquide à vapoter, c’est plus facile pour nous de le reconnaître que si ça se présente sous la forme d’herbe dans un sachet en plastique. Même avec une étiquette collée dessus. Aujourd’hui, n’importe qui avec une imprimante peut donner un aspect pro à son produit. On décide en fonction du profil de l’individu. Si le contrôlé a un lourd passif dans les stupéfiants, ça jouera contre lui.”
Dans ce cas, l’attitude de la police change : “On confisque, et on peut soumettre le produit à analyse pour décider s’il y a lieu de verbaliser ou non. Il est toujours possible à la personne de contester, à elle de voir si ça vaut le coup d’engager une procédure pour une marchandise qui vaut à peu près une demi-heure d’honoraires d’avocat, sachant que ça lui prendra un peu plus de temps.”
En revanche, il ne faut pas pousser le bouchon trop loin. “On ne va pas embêter quelqu’un qui a acheté du CBD en boutique et qui rentre chez lui”, explique un brigadier de police qui fait partie d’un équipage en uniforme. “En revanche, celui qui sort de la boutique et qui se roule son petit spliff dans la rue, on interpelle et on confisque. C’est une tolérance, sur le CBD, il ne faut pas abuser non plus.”
La tactique du gendarme
Clairement, les policiers et gendarmes nous font comprendre que le CBD ne les intéresse pas, et qu’ils ne vont contrôler que par opportunité ou si des ordres spécifiques sont donnés. “Pendant ce temps-là, on ne peut pas faire autre chose de plus important”, soupire un gendarme.
Les gendarmes répondent peu ou prou la même chose que leurs collègues civils, avec leurs spécificités. “Nous sommes en zone rurale, la typologie des contrôles n’est pas la même chez nous”, explique un major. Mais concrètement, l’attitude des gendarmes vis-à-vis du CBD est la même que celle des policiers, avec toutefois un peu plus de rigueur toute militaire : “Si le contenant n’est pas scellé, ou que la facture ne semble pas conforme, on confisque, explique-t-il. Et surtout, on contrôle l’identité de l’individu. S’il a une fiche chez nous, alors au minimum on confisque pour analyse.”
Un gendarme cynophile prévient “les chiens ne font pas la différence entre du cannabis illégal et du CBD légal. L’odeur est suffisamment proche pour qu’un chien spécialisé dans la recherche de drogue marque l’arrêt. Madame tout-le-monde, qui a 70 ans et qui a été s’acheter un peu de CBD pour calmer son arthrite, sera contrôlée comme un dealer, ça peut lui faire drôle.”
Et si le CBD est ouvertement et franchement légalisé, mais que le cannabis reste interdit, comment feront-ils la différence lors des contrôles ? Policiers et gendarmes font la même réponse : “un labo finira par mettre au point un test rapide spécifique à ces produits, comme ceux des contrôles routiers.”
Sur la route
D’ailleurs, en parlant de contrôles routiers, si des tests de drogue sont réalisés, là encore, comment faire la différence ? “Les tests cherchent la molécule de THC, explique un brigadier-chef de gendarmerie. La plupart d’entre eux ne détectent pas la molécule de CBD, ce n’est pas ce qu’on recherche. Même chose si la personne contrôlée se voit soumettre à une prise de sang : on cherche du THC, pas du CBD.”
Attention toutefois : “Les tests sont assez précis, explique un policier de la BAC. Et si votre produit contient assez de THC, il va déclarer positif. Ça peut vous éviter des problèmes d’acheter un produit de la meilleure qualité possible, avec un taux très faible, voire nul si c’est possible, de THC.”
Après consommation de CBD, le THC présent dans le produit (dans la norme des 0,2 % maximum) met six à huit heures pour être indétectable lors de certains contrôles. “Les tests salivaires réagissent dans ce délai”, explique un gendarme, qui met toutefois en garde : “le problème des tests salivaires, c’est qu’il y a régulièrement des faux positifs, qui peuvent engendrer un test urinaire ou une prise de sang pour être sûr. Et là, on peut remonter à deux mois pour un test urinaire et trois mois pour une prise de sang. Là, vous serez positif au THC.”
Autre problème, “certains peuvent s’auto-tester avec des tests salivaires vendus dans le commerce pour voir s’ils peuvent prendre le volant, souligne le gendarme. Ces tests sont moins sensibles que les nôtres, vous pouvez être négatif avec un auto-test chez vous et être positif sur un contrôle plus tard.”
Le CBD n’est pas recherché en cas de contrôle routier. “Jusqu’au jour où…, commence un gendarme. Jusqu’au jour où des accidents graves seront provoqués par des conducteurs sous CBD. Là, le ton changera”, conclut-il.
Conclusion
Le CBD n’est manifestement pas un problème brûlant pour les gendarmes et policiers. Nous en avons même rencontré qui ne connaissaient même pas le produit. Pour l’instant, le marché reste assez petit pour que les situations de quiproquo restent rares, mais les forces de l’ordre sont unanimes : si le CBD était largement diffusé demain, alors il faudrait leur donner les moyens de faire la différence. Et dans tous les cas, la présence de THC, même en quantités minimes, risque de poser problème.
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