Dans un précédent article, nous avions souligné que l’étude XERFI semblait avoir sous-estimé ses prévisions sur le marché de la vape. Impression partagée par l’organisme, qui vient, dans un communiqué de presse, de publier de nouvelles données, actualisées et instructives.
Un marché sorti de l’adolescence
Une réactualisation nécessaire, puisque, comme l’annonce l’institut spécialisé en recherches et études économiques, leur précédente étude, publiée en juillet 2017, l’avait-sous évaluée. L’institut souligne que la hausse du paquet de cigarettes, les innovations et la TPD n’avaient pas été prises en compte à ce moment-la.
Même si nous avions été un peu trop enthousiastes, notre évaluation du marché de la vape était plus proche du chiffre actualisé du Xerfi que l’évaluation précédente… du Xerfi. Lorsqu’on regarde les prévisions de croissance, nos chiffres étaient juste en avance d’un an.
De bonnes prévisions de croissance
Les prévisions de croissance du Xerfi pour les trois années à venir sont plutôt optimistes. L’institut met en valeur divers points qui, selon eux, bénéficieront énormément à la vape.
Le désir des fumeurs de trouver des substituts nicotiniques, tout d’abord. Pour le Xerfi, la quête de moyens de sevrages « bruts » cédera le pas aux substituts nicotiniques et à la réduction des risques. Les méthodes qui permettent de remplacer une addiction par une consommation moins nocive de nicotine, ou de gérer son taux de nicotine pour permettre un sevrage en douceur seront plébiscitées.
La hausse des prix : si le Xerfi relève que la hausse du prix du tabac a déjà beaucoup aidé à la consolidation et à la progression du marché de la vape, ce mouvement n’est pas encore en phase d’arrêt. Le prix va continuer d’augmenter, atteignant le seuil tolérable pour de plus en plus de fumeurs.
Les innovations seront de mises. Pour l’institut d’études économiques, un produit innovant, encore à inventer, boostera le marché comme Juul l’a fait aux USA. Le Xerfi voit bien ce produit provenir de l’industrie du tabac, partie à l’offensive avec l’aide des buralistes. C’est, selon nous, le point le plus contestable : il est purement spéculatif, et les liens entre l’industrie du tabac et les buralistes sont plus complexes. Il est par contre vrai que les politiques antitabac déployées vont pousser Big Tobacco dans ses retranchements.
L’offensive des buralistes en terme de vape : pour le Xerfi, le développement de la vape en bureaux de tabacs va contribuer à augmenter la visibilité du produit et inciter de nouveaux consommateurs. Ce qui est probablement vrai, mais avec beaucoup, beaucoup de nuances.
Des chiffres instructifs
Sur l’état actuel du marché de la vape, le Xerfi évalue le marché de la vape en 2018 en France à 820 million d’euros, un chiffre en hausse de 21 % par rapport à 2017, et qui se partage entre 60 % de liquide et 40 % de matériel. Ce chiffre fait du marché de la vape français le troisième au monde, derrière les USA et l’Angleterre, mais devant l’Allemagne. La Bündnis für Tabakfreien Genuss (BfTG), une association qui réunit les professionnels allemands du vapotage, situe le marché Allemand à… 400 millions d’euros en 2018, de quoi remettre des sujets en perspective.
Le secteur du matériel est dominé de la tête et des épaules par les chinois, Joytech, Kangertech et Eleaf formant le trio de tête des principales marques distribuées en France. Néanmoins, l’arrivée de Juul sur le marché français pourrait faire évoluer la donne. Vu les différences de marché entre les USA et l’Europe, surtout part rapport à la TPD et à la limitation du taux de nicotine, nous mettrons un gros bémol sur cette affirmation.
Pour le e-liquide… Cocorico ! Les marques française représentent, selon le Xerfi, plus de deux tiers des ventes. Les marques étrangères représentant au total un quart du marché. Les marques américaines (Halo, Five Pawns…), britannique (T-Juice, Dinner Lady…) ou malaisienne (Cloud Niners, The Medusa Juice…) sont les plus vendues parmi les liquides importés.
Enfin, les boutiques dominent encore le marché français. Les ouvertures annuelles dépassent le nombre de fermetures, la situation était à l’inverse en 2016. 55 % des produits sont vendus dans le réseau physique des shops spécialisés. Viennent ensuite internet, avec 25 % des ventes, et les buralistes ferment la marche avec 20 % de part de marché. Les autres biais de vante semblent à priori trop symboliques pour être significatifs.
L’étude du Xerfi est donc sans ambiguïté : la vape française va bien, et elle devrait se porter mieux encore dans les trois prochaines années à venir. Si son poids augmente, cela ne signifie pas que son visage restera le même : l’offensive des cigarettiers devrait s’intensifier, et l’arrivée de Juul reste la grande inconnue. Au final, ce sont des fumeurs d’aujourd’hui qui décideront de ce à quoi la vape de demain ressemblera.