La plupart des secteurs économiquement viables suivent tous plus ou moins les mêmes schémas. Les cartes de fidélité, les sites de petites annonces, d’offres discount ou encore de fins de série sont autant d’outils que le marché de la cigarette électronique pourra utiliser pour se développer. Transposition d’une recette gagnante ou véritable innovation marketing, nous nous sommes penchés sur un type d’exploitation commerciale assez particulière : celle des comparateurs de prix pour cigarettes électroniques.
Comparaison des prix pour un kit eRoll de la marque Joyetech
Avant d’aborder le sujet de manière critique et subjective, voici le résultat d’une recherche effectuée le jeudi 1er mai 2014 à 15h45 pour l’achat d’un kit eRoll de la marque Joyetech.
- AltertLBC annonce 36,29 EUR chez Vapostore frais de port inclus
- Comparacig annonce 36,49 EUR chez Freedom-e-smoking frais de port inclus
- Twenga annonce 33,91 EUR chez BlueVap + 5,99 EUR de frais de port, soit un total de 39,90 EUR
- Amazon annonce 39,99 EUR chez Ecigluxe frais de port inclus
- Google Shopping annonce 35,25 EUR chez Ebay (boutique RSmoke.cig) + 8 EUR de frais de port, soir un total de 43,25 EUR
- Kelklope annonce 39,90 EUR chez Cigamania + 4,90 de frais de port, soit un total de 44,80 EUR
Même si les deux premiers sites sont spécialisés dans l’e-cigarette, il apparait que les mastodontes de la comparaison de prix (Twenga, Google Shopping, …) semblent également surfer sur le marché de l’ecig en affichant des performances certaines.
Mais pourquoi les comparateurs ne trouvent pas les mêmes prix ?
Il est probable que les résultats vont dépendre des partenariats commerciaux passés avec les vendeurs qui doivent soit reverser au comparateur un pourcentage sur les ventes, soit payer un forfait pour être présent dans les résultats. Partant de ce postulat tous les vendeurs en activité sur le web ne seront par conséquent pas tous présents.
Se pose ensuite la question de la fréquence de mises à jour, sachant que l’opération de comparaison demande de mettre en relation des systèmes informatiques relativement complexes (actualisation automatique des prix, gestion des stocks, …), il est fort à parier que les gros comparateurs seront sur le long terme plus performants.
Force est de constater que pour le moment, les comparateurs spécialisés dans la cigarette électronique affichent néanmoins les tarifs les plus bas. Au consommateur d’évaluer alors la qualité des résultats par l’étude du profil du vendeur présenté comme étant le moins cher.
Après avoir étudié ces quelques éléments, j’ai demandé à notre cher Guillaume Bailly son avis personnel sur la question, lui qui achète sans arrêt du nouveau matériel de vape. Assumant sa casquette de chroniqueur insolent, Guillaume a accueilli le sujet à bras ouvert. Voici sa vision des choses.
Le comparateur de prix : un bébé mort-né
La e-cigarette est sortie du coin du geek pour devenir un produit de consommation courante. Avec sa cohorte d’avantages… et d’inconvénients. Comme par exemple les comparateurs de prix qui sont l’un des deux. Mais lequel ?
Vous connaissez tous le phénomène. Tenez, moi, l’autre jour, je cherchais une paire de godasses pas chères pour aller promener mon chien dans les vastes champs plaisants mais boueux jouxtant mon jardin, parce qu’avant, je le faisais avec mes Doc Martens, mais j’aime bien avoir des chaussures bien cirées, et, par les temps qui courent, ça craint, cirer ses pompes. On ne sait jamais, conseiller du président de la république, ça paie pas trop mal pour un CDD, et je ne veux pas griller mes chances.
Aussitôt après avoir tapé quelques mots clef adéquats à ma recherche de grolles confortables et pas chères, l’ami Google affichait une page de résultats dont la bonne moitié était constituée de comparateurs de prix. J’achetais donc des godasses pas chères, pour un usage limité, aussi bien dans ses possibilités que dans le temps.
Mais, Guillaume, où veux-tu en venir ?
Au fait, au fait ! J’y viens. Adoncques, mot qui signifie « donc » au XIIéme siècle et temps immémoriaux périphériques, lorsque Ghyslain me demanda ce que je pensais des comparateurs de prix sur Internet, je lui répondis dans un premier temps que oui, ça ne m’étonnait pas que ça existe. L’article aurait pu s’arrêter là, et je sentais Ghyslain vaguement déçu.
État passager, fort heureusement : lorsque un peu plus tard, je lui renvoyais un mail pour lui dire que « après réflexion, c’est nul » le rédacteur en chef du premier (et meilleur) site sur la e-cigarette s’en trouva ragaillardi. Il est vrai qu’on attend un peu de moi que je sois le méchant de service.
Donc, les comparateurs de prix spécialisés dans la e-cigarette, c’est nul.
Un développement ? Que justifie ce jugement assez sévère ? Et puis quoi, encore, un litre de Booba’s Bounty et un Provari, pour faire un compte rond ? Allez : faut-il que je vous aime, chères lectrices. Oui, et chers lecteurs, aussi, mais de façon plus platonique.
Tu en as pour ton argent
Parce qu’acheter des cigarettes électroniques ou des vaporisateurs personnels ou que sais-je encore, en fonction du prix, et uniquement en fonction du prix, je dis stop !
Voyez-vous, il y a deux genre de vendeurs d’e-cig : le bon vendeur et le mauvais vendeur. Le bon vendeur, il voit un client, il vend, alors que le mauvais vendeur, vous connaissez la suite.
En gros, il y a le vendeur qui va vous vendre votre e-cig. Pas UNE e-cig, VOTRE e-cig. C’est un vendeur, dans une boutique physique, qui va passer du temps avec vous pour vous poser les bonnes questions et vous faire essayer des choses. C’est un vendeur, dans une boutique virtuelle, qui répondra au téléphone, aux mails, qui prendra le temps de rédiger des fiches explicatives, et qui vous vendra du matériel relativement cher « Certifié Trucmuche ».
Le bon vendeur, il veut gagner de l’argent avec vous sur le long terme, en vous vendant pendant des années des e-liquides et des consommables.
Le mauvais vendeur part du principe que la e-cigarette est à la mode, que vous allez en acheter une, et peu importe ce que vous achèterez, pourvu que vous l’achetiez chez lui. Peu importe que la batterie qu’il vous vend soit une « noname » sans aucune garantie quand à sa fiabilité et sa sécurité, peu importe que le liquide qu’il vous vend soit le plus immonde du marché. Vous allez acheter, il veut votre argent, et pour se différencier, il a le prix.
Alors, bien sûr, son kit EGO à 20 balles apparaîtra comme plus avantageux qu’un kit EGO à 60 balles, et vous, débutant dans le monde de la vape, vous ne savez pas encore que EGO est un terme devenu générique, et que s’il n’y a pas écrit Joyetech, ou Vision, ou Kangertech ou une marque connue et qui vérifie sa marchandise, ça a toute son importance.
Alors, oui, en utilisant un comparateur de prix, vous achetez un prix. Et vous en avez pour votre argent.
Mais de quoi tu vis ?
D’une manière plus générale, l’on peut se demander l’intérêt de ces comparateurs de prix dédiés.
De quoi vivent ils ? De publicité ? Cela m’étonnerait qu’ils suscitent un trafic tel qu’un annonceur accepte de payer un prix suffisant. Des liens ? Oui, mais… On a vu que les annonceurs sérieux, qui proposent du matériel de bonne qualité, et qui misent sur la fidélisation, et donc, la satisfaction du client, ne jouent pas la guerre des prix. Ils préfèrent se rabattre sur des sites sérieux…
Et surtout, comment se battent ils face à des comparateurs de prix généralistes, plus connus du grand public, qui référencent des sites comme Amazon, Cdiscount ou même Grosbill… qui vendent de la e-cig ? Le néophyte va plutôt accorder sa confiance à Twenga qui va l’envoyer chez Amazon, par exemple, plutôt qu’au comparateur machin, qui l’enverra chez bidule. Comparateur machin qui apparaîtra d’ailleurs loin derrière les géants généralistes du marché.
Ces sites ne peuvent pas non plus satisfaire les vapoteurs expérimentés qui, soit achètent du matériel High end dont les modeurs ont fixé le prix de vente public, ou bien ont les bonnes adresses pour se procurer les clones les moins chers, parfois directement en Chine.
Et, pour finir, ils ont tendance à agacer certaines marques, qui en ont marre de voir leur matériel bradé au détriment de leurs revendeurs historiques qui jouent le jeu des prix publics recommandés. Ainsi, Joyetech a décidé de reprendre les choses en main et de devenir plus exigeant sur la vente de ses eRoll (parce que certains de ces shops vendent tout de même, à leur décharge, du bon matériel).
Tout dernier point, par gourmandise, c’est la jungle. Si certains comparateurs de prix généralistes sont bien connus aujourd’hui, c’est parce qu’à l’époque où ils ont été créés, personne n’était certain que ça marcherait, et ils étaient peu nombreux à tenter l’aventure. Aujourd’hui, tout le monde sait le faire et regarde les Grands Anciens… Là ou il y a de place, à la rigueur, pour un comparateur de prix, ils sont une dizaine à se partager un marché rikiki, et se vampiriser les uns, les autres.
Je viens de voir un de mes articles cité dans le Monde et dans le Nouvel Observateur pour avoir prédit, il y a quelques mois, dans Funéraire Info, la fin des QR codes dans les cimetières. Je me demande qui me citera, dans quelques mois, alors qu’aujourd’hui, je l’affirme sur les comparateurs de prix dédiés à la e-cig : le bébé est mort-né.