C’est un arrêt qui fait grand bruit : la Chambre criminelle de la Cour de cassation a délibéré en faveur d’un magasin qui vendait des fleurs de CBD. Attention néanmoins aux chausse-trappes. Analyse du texte. 

Rappel des faits

Un bref rappel des faits : en janvier 2019, la police mène une opération contre un magasin pour « infraction à la législation du travail ». Lors de la perquisition, les officiers découvrent sur les lieux des produits à base de CBD, qui sont saisis pour analyse. Le juge d’instruction lance alors une procédure pour deux inculpations, « travail dissimulé » et « infraction à la législation sur les stupéfiants ».

En juin 2019, le gérant du magasin est condamné pour « travail dissimulé » et relaxé pour l’infraction sur les stupéfiants. Les deux parties, Procureur de la République et accusé, font appel, chacun pour un motif différent, mais les deux procédures étant confondues, il n’y a pas de séparation. 

Le 22 juin 2020, la cour d’appel confirme la condamnation pour « travail dissimulé » et condamne également le gérant pour « complicité d’infraction à la législation des stupéfiants ». C’est sur cet arrêt que porte le pourvoi en cassation.

Décision de cassation

La décision de la cour de cassation porte sur l’infraction sur les stupéfiants. Pour cela, la cour s’est appuyée sur la législation européenne et un défaut de procédure.

La cour de Cassation a en effet constaté que la législation européenne « s’oppose à une réglementation nationale interdisant la commercialisation du cannabidiol (CBD) légalement produit dans un autre État-membre, lorsqu’il est extrait de la plante de cannabis sativa dans son intégralité et non de ses seules fibres et graines ».

Et la Cour de cassation poursuit en soulignant que la Cour d’appel n’a pas vérifié, alors qu’il lui était demandé de le faire, la provenance des produits.

C’est sur ce défaut de procédure que l’arrêt a été cassé : non parce que le CBD est légal, mais parce que la Cour d’appel ne s’est pas donné la peine de démontrer que le CBD faisant précisément l’objet de la procédure était illégal. Ce qui peu ressembler à une argutie juridique est en réalité un point très important. 

Un second procès en appel aura lieu, qui devra tenir compte des conclusions de la Cour de cassation. 

Quelles conséquences ?

Le second procès en appel aura deux choix : soit relaxer l’accusé sur les faits portant sur les stupéfiants, soit chercher à prouver que les produits utilisés ne proviennent pas d’un pays membre de l’Union Européenne.

En effet, et ce n’est pas assez souvent souligné, la vente de CBD en France est limitée dans le droit européen aux pays membres de l’Union. Dans la situation où les produits seraient importés par le revendeur d’un pays qui ne fasse pas partie des 26 (27 au moment où la décision a été rendue), alors, le gérant peut être déclaré coupable de ces chefs d’accusation.

C’est ce qu’il faut surtout retenir de cet arrêt : la vente de Sativa en France est libre, si et uniquement si les produits contiennent moins de 0,2 % de THC et proviennent d’un pays membre de l’Union Européenne. Autrement dit, la Suisse et les USA, deux gros producteurs et exportateurs, sont exclus de cette zone.

L’arrêt nous apprend également que la vente de fleurs n’est pas illégale. Ce qui rend le projet de loi du gouvernement français actuel déjà obsolète.

Sources

Arrêt n°810 du 23 juin 2021 (20-84.212) – Cour de cassation – Chambre criminelle

Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne

Article 593 du code de procédure pénale

 

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