Contrairement aux inquiétudes exprimées sur les réseaux sociaux, l’amendement I-3950 adopté ce matin ne concerne que les produits à fumer à base de plantes et n’a aucun impact sur le vapotage.

Ce qu’il faut retenir

  • L’amendement I-3950 adopté ce matin ne concerne que les produits à fumer à base de plantes ;
  • Son exposé sommaire était le fruit d’une erreur rédactionnelle ;
  • Tout laisse à croire qu’il avait été rédigé par une association antitabac.

Pourquoi les vapoteurs peuvent être rassurés

Après la suppression de l’article 23 hier soir, de nombreux vapoteurs s’inquiètent de l’adoption, ce matin, par l’Assemblée nationale, de l’amendement I-3950. Déposé par les députés Michel Lauzzana et Jean-François Rousset (Ensemble pour la République), celui-ci avait pour objectif de combler les lacunes de l’article 23 au sujet des produits à fumer à base de plantes.

Que disait exactement l’amendement I-3950 adopté par l’Assemblée nationale ?

Première partie

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 3514‑6, il est inséré un article L. 3514‑6‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 3514‑6‑1. – L’article L. 3513‑5 est applicable aux produits à fumer à base de plantes autres que le tabac. »

L’article L. 3513‑5 dit :

« Il est interdit de vendre ou d’offrir gratuitement, dans les débits de tabac et tous commerces ou lieux publics, à des mineurs de moins de dix-huit ans des produits du vapotage.

La personne qui délivre l’un de ces produits exige du client qu’il établisse la preuve de sa majorité. »

En bref : cette première partie de l’amendement vise à interdire de vendre ou d’offrir des produits à fumer à base de plantes autres que le tabac, au même titre qu’il est déjà interdit de le faire pour les produits du vapotage.

Seconde partie

L’article L. 3515‑1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « et L. 3513‑5 à L. 3513‑6 » sont remplacés par les mots : « , L. 3513‑5 à L. 3513‑6 et L. 3514‑6‑1 » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « et L. 3513‑5 » sont remplacés par les mots : « , L. 3513‑5 et L. 3514‑6‑1 » ;

L’article L. 3515‑1 dit :

« Les agents mentionnés à l’article L. 1312-1 du présent code, à l’article L. 8112-1 du Code du travail veillent au respect des articles L. 3512-8, L. 3512-12 et L. 3513-5 à L. 3513-6 du présent code et des règlements pris pour son application et procèdent à la recherche et à la constatation des infractions à ces dispositions.

Ils disposent à cet effet, chacun pour ce qui le concerne, des prérogatives qui leur sont reconnues par les articles L. 1312-1 du présent code, L. 8113-1 à L. 8113-5 et L. 8113-7 du Code du travail et par les textes pris pour leur application.

Ces agents peuvent, pour constater une infraction aux articles L. 3512-12 et L. 3513-5, exiger que le client établisse la preuve de sa majorité, par la production de tout document officiel muni d’une photographie. »

En bref : cette seconde partie vise simplement à offrir aux forces de l’ordre le moyen de constater les nouvelles infractions qui pourraient désormais se produire suite à la création de l’article L. 3514‑6‑1, qui interdit la vente ou l’offre de produits à fumer à base de plantes autre que le tabac.

Troisième partie

L’article L. 3515‑2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « et L. 3513‑5 à L. 3513‑6 » sont remplacés par les mots : « , L. 3513‑5 à L. 3513‑6 et L. 3514‑6‑1 » ;

b) Au dernier alinéa, les mots : « et L. 3513‑5 » sont remplacés par les mots : « , L. 3513‑5 et L. 3514‑6‑1 » ;

L’article L. 3515‑2 dit :

« Les agents de police municipale, les gardes champêtres, les agents de surveillance de Paris ainsi que les agents de la ville de Paris chargés d’un service de police mentionnés, respectivement, aux articles L. 511-1, L. 521-1, L. 523-1 et L. 531-1 du code de la sécurité intérieure peuvent constater par procès-verbaux les infractions aux articles L. 3512-8, L. 3512-12 et L. 3513-5 à L. 3513-6 du présent code et aux règlements pris pour leur application, lorsqu’elles sont commises sur le territoire communal, sur le territoire de la ville de Paris ou sur le territoire pour lequel ils sont assermentés et lorsqu’elles ne nécessitent pas de leur part d’actes d’enquête.

Ces agents peuvent, pour constater une infraction aux articles L. 3512-12 et L. 3513-5, exiger que le client établisse la preuve de sa majorité, par la production de tout document officiel muni d’une photographie. »

En bref : modification similaire à la précédente : permettre aux agents de police municipale, gardes champêtres, etc., de constater une potentielle infraction au nouvel article L. 3514‑6‑1, qui interdit la vente ou l’offre de produits à fumer à base de plantes autre que le tabac.

Dernière partie

Au premier alinéa de l’article L. 3515‑2‑1 A, les mots : « et L. 3513‑18 » sont remplacés par les mots : « , L. 3513‑18 et L. 3514‑6‑1 » ; ».

L’article L. 3515‑2‑1 A dit :

« Les agents mentionnés à l’article L. 511-3 du code de la consommation sont habilités à rechercher et à constater les infractions aux articles L. 3513-4, L. 3513-5-1, L. 3513-7, L. 3513-8, L. 3513-9, L. 3513-15, L. 3513-16, L. 3513-17 et L. 3513-18 du présent code ainsi qu’aux mesures réglementaires prises pour l’application de ces articles.

À cet effet, ils disposent des pouvoirs prévus au dernier alinéa du I de l’article L. 511-22 du code de la consommation. »

En bref : là encore, il s’agit simplement d’offrir aux agents la possibilité de rechercher et constater les infractions au nouvel article L. 3514‑6‑1, qui interdit la vente ou l’offre de produits à fumer à base de plantes autre que le tabac.

Cet amendement ne concerne donc aucunement les produits du vapotage.

Des erreurs de rédaction

Une question subsiste cependant. Pourquoi, dans l’exposé sommaire de cet amendement (voir ci-dessous), était-il fait mention des produits du vapotage ?

Cet amendement a pour objet de préciser l’articulation entre, d’une part, les modalités de recouvrement de l’accise sur les produits à fumer et à vapoter et, d’autre part, la réglementation sectorielle. Cette articulation repose, comme pour tous les produits soumis à accise, sur la mise en place d’un régime économique qui assure le fonctionnement du régime suspensif de l’accise entre, d’une part, la production ou l’importation et, d’autre part, la fourniture au détaillant.

En l’espèce ce régime repose sur un agrément des détaillants dont le maintien est subordonné au respect des règles sectorielles applicables. Il s’agit, à l’instar de l’interdiction de la vente à distance ou de la vente aux abords des lieux sensibles (écoles notamment), de prévoir l’interdiction de la vente aux mineurs pour les produits du vapotage.

Tout simplement, car il s’agit d’une erreur rédactionnelle. Cet exposé sommaire est aussi présent, mot pour mot, dans l’amendement I-3551, également proposé par les députés Michel Lauzzana et Jean-François Rousset.

Cet amendement prévoyait d’appliquer aux produits à fumer à base de plantes, les mêmes dispositions que pour les produits du vapotage qui auraient été mises en place avec l’article 23. C’est-à-dire, l’obligation d’avoir un agrément pour en vendre, l’interdiction de la vente aux mineurs, et l’interdiction de la vente en ligne.

Mais cet amendement est tombé avec l’article 23. Et leur exposé sommaire était quoi qu’il arrive mal formulé, puisque, dans les deux cas, ces amendements n’avaient aucun rapport avec les produits du vapotage et ne visaient que les produits à fumer à base de plantes.

Pour être corrects, ces exposés auraient pu être, par exemple : « Il s’agit, à l’instar de l’interdiction de la vente à distance ou de la vente aux abords des lieux sensibles (écoles notamment) [qui s’appliquent au vapotage], de prévoir AUSSI l’interdiction de la vente aux mineurs pour les produits À FUMER À BASE DE PLANTES. »

L’ombre des associations antitabac

L’amendement adopté ce matin, le I-3950, avait une mission similaire au I-3551, mais créait un nouvel article de loi au code de la santé publique. De cette manière, si l’article 23 tombait, cet amendement pouvait fonctionner quand même puisqu’il créait un nouvel article indépendant de ceux créés par l’article 23. Il s’agissait ni plus, ni moins, que d’un amendement de secours.

L’objectif de l’amendement I-3551 était d’améliorer l’article 23, en supposant qu’il serait adopté. Tandis que l’amendement I-3950 créait une disposition autonome, au cas où l’article 23 aurait été modifié ou supprimé.

Comme l’a dit le député Lauzzana lors de la défense de cet amendement ce matin, « moi, je dis d’où je parle. Je parle et je travaille avec “action contre le tabac”, et moi j’aimerais bien que certains n’avancent pas masqués parce que j’entends des discours qui sont directement importés par l’industrie du tabac. »

S’il n’existe, en France, à notre connaissance, aucune association qui s’appelle « action contre le tabac », le discours du député était clair : cet amendement venait d’une association antitabac. Un fait qui expliquerait que, dans l’exposé des motivations de son amendement, Michel Lauzzana ait répété le discours de certaines de ces associations. Il a par exemple indiqué savoir que « l’industrie du tabac est très inventive et sort des produits nouveaux très régulièrement pour essayer, à travers la nicotine, de pénétrer le marché, et surtout en direction des jeunes. » Et d’ajouter que « même les vapes actuellement posent un vrai problème » et que « nous devrions avoir un packaging neutre pour les vapes ».

Un discours très clairement calqué sur celui de certaines associations antitabac qui luttent de manière incompréhensible contre la cigarette électronique, alors que 85 % du marché français est organisé par une industrie indépendante, et qui semblent avoir bien du mal à rédiger des amendements.

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