La cigarette électronique provoquerait des troubles de l’érection chez les hommes selon une étude. Si le titre a de quoi faire sourire, voire rire, le voir se propager dans la presse sans nuance oblige, au bout d’un certain temps, à réagir.
La vape pendouille
C’est une « étude » menées par la NYU Grossman School of Medicine et la Johns Hopkins University School of Medicine, publiée dans l’American Journal of Preventive Medicine qui l’affirme : vapoter provoquerait des troubles de l’érection.
La cigarette électronique fait-elle donc choir le vit ? Et bien, peut-être, mais ce n’est certainement pas cette publication qui le démontre. Tout d’abord, il ne s’agit pas d’une étude complète, mais d’une étude statistique. Ici, pas de test à l’aveugle ou en double aveugle, pas de groupe témoin, rien de tout cela.
La méthodologie a consisté à éplucher 45 000 questionnaires, en extraire 13 000 qui souffrent de dysfonctionnement érectile, puis de se concentrer sur 11 000 qui ne souffrent pas de maladies cardio-vasculaires, et de regarder si ces gens vapent. Et il semblerait qu’il y ait plus de vapoteurs que de non-fumeurs qui souffrent de problèmes d’érection.
L’étude précise avoir tenu compte du passif tabagique des sujets.
Ça monte, ça monte…
Soit. Mais, et le reste ? Par exemple, les auteurs expliquent que les sportifs sont moins concernés que les non-sportifs. Peut-on alors supposer, vu que l’étude a été menée sur un échantillon de la population américaine, que se trouvent parmi eux un certain nombre d’obèses ? L’obésité étant un facteur de trouble de l’érection.
D’autres causes peuvent aussi provoquer des dysfonctionnements érectiles. La prise de certains médicaments, le stress, sont les causes les plus fréquentes, mais la liste est longue. Tellement longue que l’on s’étonnerait presque de voir de jeunes enfants dans la rue, et qu’on a aussitôt envie de courir voir le père pour lui dire « bravo, vieux, j’étais certain que tu y arriverais ! ». Ou, plus sérieusement, il y a suffisamment de troubles de l’érection pour qu’il se vende, chaque seconde dans le monde, pour 48 euros de Viagra.
Il existe aussi une autre raison : pas envie. Une rumeur prétend en effet que des hommes qui n’ont pas constamment envie de faire l’amour lorsqu’il se trouvent en présence d’un ou une partenaire éventuel(le) à leur goût, ça existe.
Tout est mal qui finit pire
Il suffit de lire le très long paragraphe qui conclut l’étude intitulé « limitations » pour s’en convaincre : tout cela n’est pas très sérieux. Mais curieusement, ce ne sont pas les auteurs qui sont à blâmer.
En effet, la lecture du texte révèle petit à petit leurs intentions. Et, contrairement à ce qu’affirment les journaux qui ont repris la nouvelle, le propos de cette étude statistique n’est pas de dire que la vape empêche les hommes d’avoir une érection, tremblez pauvres mortels. Non, les chercheurs expliquent simplement qu’ils ont constaté une anomalie statistique, qu’ils ne l’ont pas approfondie, mais que ça vaudrait peut-être le coup de se pencher un peu sur le sujet.
L’article se conclut, en effet, par un appel à réaliser d’autres études, et cliniques, cette fois-ci.
Bref, si la vape provoque ou pas des troubles de l’érection, ou s’il s’agit juste dune coïncidence statistique pas si improbable au vu du nombre de causes possibles, à cette heure, personne n’en sait rien. Et le soufflé retombe. Lui aussi.
Sources
L’étude statistique : Association of E-Cigarettes With Erectile Dysfunction: The Population Assessment of Tobacco and Health Study
Troubles sexuels et obésité (dans la Revue Médicale Suisse)
Troubles sexuels et stress (Science Direct)