La Tunisie est-elle en train de devenir un enfer pour les vapoteurs ? Si la situation n’est pas aussi extrême que dans certains pays, force est de constater que les nouvelles ne sont pas bonnes. En cause, un monopole qui fait tout pour… Tuer la vape. Mais les vapoteurs tunisiens résistent.
La Tunisie, entre le paradis et l’enfer
Aussi riche d’histoire que de patrimoine, la Tunisie est pour beaucoup d’européens surtout une destination rêvée de vacances. La réduire à cela est bien mal connaître ce pays de plaines et de montagnes, de vallées fertiles et de désert, berceau de la civilisation carthaginoise, ancien protectorat français, devenu république après un passage par la monarchie constitutionnelle, membre de multiples commissions d’importance.
Et si pour certains la Tunisie est le paradis sur Terre, en tout cas, ce n’est pas pour les vapoteurs. Depuis 2014, la vente de produits de la vape est soumise au régime de la Régie Nationale des Tabacs et Allumettes (RNTA). Et autant le dire, ça ne se passe pas très bien.
D’emblée, du fait de ce monopole, de nombreuses boutiques à travers le pays, alors que le marché était en plein essor, ont dû mettre la clé sous la porte. Il en reste moins de 70 aujourd’hui, pour satisfaire les 20 000 vapoteurs du pays (estimation), et qui ne peuvent proposer que des produits figurant dans le catalogue de la RNTA.
Catalogue d’ailleurs assez peu fourni, puisque la RNTA étant régie par un mode de gestion particulièrement lourd, l’ajout du moindre produit peut prendre des mois, voire des années. Ce qui est problématique, lorsqu’on voit l’évolution de la technologie dans le secteur.
La porte ouverte au trafic
Évidemment, cette situation a laissé la porte ouverte au trafic. Organisé par ceux qui maîtrisent le mieux le marché… Les boutiques elles-même. Absurde ? A peu près autant, sans doute, que de confier le monopole du meilleur outil de sevrage tabagique à une organisation qui tire de substantiels revenus de la vente de tabac.
En l’occurrence, trafic est un bien grand mot. En réalité, les boutiques proposent les dernières nouveautés en matières de produits de la vape, souvent sur commande passée par des clients cherchant quelque chose de spécifique. Mais ces produits n’étant pas disponible dans le catalogue de la RNTA, ces boutiques sont obligé de les commander en dehors du réseau officiel, donc de ne pas les déclarer, ce qui implique une contrebande.
C’est contre ces pratiques que se sont récemment dressées les douanes, qui ont monté plusieurs opérations coup de poing dans des boutiques en quête de matériel illégal. Des opérations parfois spectaculaires, menées sous l’œil des médias préalablement convoqués, pour servir d’exemple.
Néanmoins, un adoucissement semble se créer au niveau de la RNTA elle-même. Une association, l’Association de la Cigarette Électronique pour Arrêter de Fumer (ACEAF) a monté des actions, dont certaines ont eu un écho assez vif sur les réseaux sociaux, accusant la RNTA d’être responsable de la mauvaise santé du marché de la vape tunisien.
Se sentant menacée, la RNTA a intelligemment préféré engager un dialogue avec l’ACEAF plutôt que de se mettre l’association à dos.
Un nouvel espoir ?
Les vapoteurs en dehors de l’ACEAF, eux, sont nettement plus virulents. Une pétition a circulé pour demander le retrait du monopole. Et surtout, les récriminations se font précises.
En effet, selon les vapoteurs tunisiens, la RNTA, si sourcilleuse et sévère avec les produits de la vape, soit beaucoup plus coulante à l’égard du tabac. Le tabac se vend aussi bien dans les épiceries que chez les marchands ambulants, alors que les cigarettes devraient être distribuées exclusivement dans des bureaux de tabac.
Un deux poids deux mesure qui exaspère les vapoteurs, poussés au désespoir de ne pouvoir se fournir en produits de qualité, et surtout de pouvoir convertir les fumeurs, très nombreux en Tunisie.
Le gouvernement tunisien devra se résoudre, à terme, à arbitrer. Les négociations entre la RNTA et l’ACEAF tournent autour d’une libéralisation du marché, en échange d’une taxation sur le produit. Cette dernière, néanmoins, rendrait la vape plus chère et inaccessible pour de nombreux fumeurs. Les vapoteurs exigent, de leur côté, le retrait pur et simple du monopole sur la vape et ne veulent pas entendre parler de taxe. Avec un argument-massue à la clef : dans un pays où le chômage est un vrai problème, brider une activité qui crée des emplois net est tout simplement fou.
L’avenir de la vape en Tunisie sera de toute façon à l’image du pays : soit riche et fertile comme la plaine de la Medjerda, soit désertique comme le Sahara.