Le remboursement, à partir de ce dimanche, des patchs par la sécurité sociale en France ne plaît pas à tout le monde. Par exemple, British American Tobacco ne trouve pas l’idée excellente. Rien d’étonnant à cela, sauf que BAT se lance dans un vibrant plaidoyer pour la vape.
Le monde à l’envers
Vous n’imaginez pas à quel point la vie de journaliste au Vaping Post est compliquée. Vous faites des recherches, vous discutez avec des gens, vous réfléchissez beaucoup, et, au final, vous croyez vous être fait un tableau global de la situation. Et à ce moment là, quelqu’un fait quelque chose d’inattendu, et tout est à refaire.
Par exemple quand le directeur des affaires publiques, juridiques et de la communication de British American Tobacco sermonne publiquement la Ministre de la santé française sur le remboursement des patchs, et défend la vape avec des trémolos de passion dans la voix, forcément, on s’interroge.
Éric Sensi-Minautier, Directeur des Affaires publiques, juridiques et de la Communication de BAT Europe de l’Ouest, puisque c’est de lui dont il s’agit, a réagi via un communiqué à la décision d’Agnès Buzyn de rembourser les substituts nicotiniques vendus en pharmacie, du moins, un certain nombre d’entre eux.
Communiqué de Éric Sensi-Minautier
“À 15 jours de la Journée Mondiale sans tabac, la communication l’emporte sur l’efficacité.
Selon l’OFDT, le nombre de médicaments d’aide à l’arrêt au tabac vendus depuis 2005 équivaut au traitement de 26 millions de fumeurs cumulés.
Près de 3 millions de forfaits de remboursements de substituts nicotiniques ont été versés entre 2007 et 2016, soit un cout estimé de 261 millions d’euros pour la Sécurité sociale, si on prend une moyenne de 100 euros remboursés.
Résultat : aucun effet sur la prévalence tabagique qui a augmenté sur la même période en passant de 27 % à 28,7 %.
Nous ne comprenons pas que le Ministère de la Santé ne soit pas plus innovant dans ses mesures de santé publique. En effet, il dispose pourtant d’une alternative crédible qui est le vapotage, sans coût pour les finances publiques.
C’est d’ailleurs ce qu’a fait le Royaume-Uni : sensibiliser les fumeurs et les accompagner vers le vapotage, ce qui a permis une baisse de la prévalence tabagique de 20 à 15,8 % ces six dernières années”.
Une réaction surprenante ?
Surprenant ? Pas tellement, en réalité. BAT est l’un des cigarettiers qui a le plus rapidement compris le potentiel de la vape dans les prochaines années, et lançait dès 2012 Nicoventures, une filiale destinée aux méthode de consommation de nicotine “alternatives”, entendez la vape. Vype, Voke, pour les produits maison, acquisition de Chic Group, société de vape Polonaise en 2015, le cigarettier est entré de plain pied dans la vape, avec des fortunes diverses.
De surcroît, comme le rappelle Jean-Yves Nau sur son blog, Éric Sensi-Minautier est connu pour ses déclarations très franches, qui en font un des communicants de l’industrie du tabac les plus apprécié des buralistes. Ces derniers misant de plus en plus sur l’e-cigarette, un coup de main de leur partenaire privilégié est le plus que bienvenu.
Bref, c’est bien joué : en déplorant publiquement une dépense publique aussi importante que vaine, et en semblant encourager la lutte efficace contre le tabac via la vape, Éric Sensi-Minautier plaide en réalité pour ses intérêts et dis à ses partenaires ce qu’ils veulent entendre.
Preuve, s’il en fallait, que si l’industrie du tabac ne manque pas de cynisme, elle ne manque pas non plus d’intelligence.