La vape, comme tout mouvement de fond, a ses héros. Les connus, militants qui ne comptent ni leur temps, ni leur énergie, et les moins connus. Il existe un véritable héros de l’ombre, un pur, un dur, le seul vrai héros de tous les temps. Il existe pour la vape, il existe ailleurs, et personne ne s’en rend compte. Hommage solennel.

Mais si, vous savez bien…

C’est L’ATO. L’ultime, précédé par sa légende. Depuis des mois, les forums et réseaux bruissent de SON arrivée. C’est l’ultime changeur de donne, celui qui réunira les chasseurs de saveurs et les chasseurs de nuages, l’ato qui va enfin vous permettre de redécouvrir vos liquides, avec une finition à pleurer et une disponibilité rikiki les premiers temps.

Bref, un atomiseur comme il en est annoncé un chaque semaine, emballé dans une bonne dose de battage. Oui, parce qu’en français, on dit battage, pas hype, sachez le, que diantre. Si vous voulez parler anglais, alors, assumez, sacrebleu ! Votre premier bœuf à la menthe devrait vous calmer, et sinon, ce sera le traitement de choc : le haggis.

De longs mois se sont écoulés : premières rumeurs, premières photos floues prises sans flash, de loin, dans un tunnel, première minuscule production, premiers chanceux à pouvoir dépenser une fortune pour avoir un numéro de série à deux chiffres, première transpiration en fixant le suivi au moment de l’arrivée à la douane, et, enfin, premier coup de sonnette du facteur.

Il est là. L’objet de votre convoitise, enfin, sur la table devant vous, et c’est là que surgit face au vent le vrai héros de tous les temps. Le seul qui a vraiment du courage, celui qui triomphe de tout, à la seule force de sa volonté. J’ai bien entendu nommé, mais vous l’aurez reconnu : le mec qui fait de l’unboxing.

Que disais-je ? Ah, oui…

D’ici, j’entends la foule en délire suspendue jusqu’à présent à mes lèvres, ou plutôt, à mon clavier, se demander « Mais, euh, attends, de quoi il nous cause, lui ? ». Et bien, mes amies et mes amis, je vous parle d’un authentique héros de la vape.

Parce que, lui, il est au dessus de la mêlée. Parce que lui n’écoute pas son instinct. Il déconcerte. Il ne se comporte pas comme un être humain normal. L’être humain normal s’escrime sur le paquet jusqu’à s’emberlificoter les doigts, essaie ensuite de le déchirer avec les dents jusqu’à ce qu’il se rappelle de sa dernière facture de dentiste, avant d’aller chercher un couteau, un ciseau, un cutter, une tronçonneuse, n’importe quel objet tranchant qui lui tombe sous la main.

Mais pas le spécialiste de l’unboxing. Non, vous dis-je, il est au-dessus de tout cela. Ces agitations désordonnées contreviennent à sa nature.

Le spécialiste de l’unboxing prend son paquet, et, sans tenter de l’ouvrir, fait le tour de son logis afin d’y trouver la meilleure lumière. Une fois satisfait, il le pose au milieu de la table, puis s’en va chercher son matériel, caméra ou appareil photo. Scrupuleusement, il prend des clichés du paquet sous tous les angles, puis saisit son outil. Un bistouri ou un scalpel, souvent, et non, ce n’est pas la même chose. C’est pourtant simple : le chirurgien utilisera un bistouri pour vous opérer, et s’il n’est pas en forme, le légiste utilisera un scalpel pour vous autopsier. Zut, quoi.

Autopsy of Jane Carton

Ensuite, donc, il procédera à une incision, ouvrira le dessus de la boîte, puis prendra des clichés de son contenu encore emballé. Oui, oui, le vieux papier journal qui sert à protéger des chocs, hop ! En photo.

Puis il sortira patiemment le contenu du colis, mitraillant chaque item sous tous les angles. Il refera pareil avec l’emballage de l’atomiseur, avant de l’extraire de son emballage.

Pour vous situer, à ce stade, le vapoteur lambda a déjà monté son atomiseur, vapé la moitié d’une bouteille de son liquide préféré dedans, s’est rendu compte qu’il ne l’aimait pas, et se demande combien il va pouvoir le revendre tout en postant sur Facebook un selfie de lui en train de tirer une barre avec pour commentaire « Vapemail ».

Mais le spécialiste de l’unboxing n’a pas fini, non. Il va détailler patiemment chaque élément de paquet, avec à chaque fois une photo et un commentaire. « Là, nous avons un joint bleu » (photo) « là, nous avons un deuxième joint bleu » (photo) « là, nous avons un joint orange » (photo)…

Le Graal, enfin

Enfin, il arrive à l’atomiseur proprement dit. Il le saisit, le montre à l’objectif, et, enfin… Il vous remercie de votre attention. Parce que tout ce qui se passe après, comment ça se monte, comment ça marche, la qualité de vape et tout ça, lui, il s’en fiche complètement. Ces billevesées, c’est pour les vulgaires revueurs, oui, revueurs, non, tous les mots ne semblent pas plus jolis en français, mais c’est parce que l’esthétique vous est étrangère.

Donc, le spécialiste de l’unboxing est un héros. Un vrai. Parce qu’il a l’objet de toutes les convoitises là, entre ses mains, et, au lieu de se ruer dessus goulûment, il en photographie l’emballage sous tous les angles. C’est complètement respectable et totalement vain.

Parce que, soyons francs : à part peut être les clients d’un club sado-masochiste le jour de congé de Maîtresse Sévère, qui a envie de se farcir une heure de vidéo d’un type en train d’ouvrir une boîte ? Le pire, c’est qu’ils ne sévissent pas que dans la vape, ils sont partout, partout !

Il y en a un, une fois, qui l’a fait aux pompes funèbres. Variante intéressante, le contenu de la boite se mettait à bouffer tout le monde. Qui aurait cru, un jour, pourvoir dire à Georges Romero que « La nuit des morts vivants » serait l’ancêtre des vidéos d’unboxing ?

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