La vape est-elle un truc de mecs ? En voyant cette question un peu stupide et franchement sexiste posée sur un réseau social, nous nous sommes dit que, évidemment, non. C’était un peu court, alors nous avons décidé d’aller à la rencontre de femmes qui non seulement sont dans la vape, mais la font. Premier portrait, Fanny Laot, cogérante de L’Écovapoteur.
Bonjour, tout d’abord, pouvez-vous vous présenter ?
Comment êtes-vous devenue une vapoteuse ?
F.L. : À l’époque, j’étais fumeuse, je fumais 10 à 12 cigarettes par jour. Un jour, ma meilleure amie me fait découvrir la vape. Ça a piqué ma curiosité, ainsi que celle de mon mari, et nous avons décidé de tenter l’aventure ensemble. Nous avons commandé un kit sur Internet, dans une boutique dont je ne me rappelle pas le nom. C’était ce qu’on trouvait à l’époque, des eGo-T, du matériel rustique comparé à ce qu’on trouve maintenant, mais ça a fonctionné.
Et comment êtes-vous devenue une professionnelle de la vape ?
F.L. : Alors ça, c’est une drôle d’histoire. Un dimanche en 2012, nous nous sommes retrouvés à court de liquide. Et nous avons fait tout Brest à la recherche d’un endroit où nous pourrions en acheter. Quand je dis que nous avons parcouru tout Brest, c’est littéralement ! Ça peut sembler excessif aujourd’hui, mais nous étions tellement contents d’avoir arrêté la cigarette, et nous étions tous les deux bien déterminés à ne pas la reprendre, la facilité aurait été d’aller acheter un paquet, évidemment. Mais nous n’avons rien trouvé. À l’époque, il n’y avait aucun magasin qui en vendait dans le secteur. Plus tard, nous en avons reparlé avec Cédric, et nous nous sommes dit qu’il y avait certainement quelque chose à faire. Nous avons décidé de monter une boutique en ligne. Cédric travaillait beaucoup, mais moi j’avais un contrat de 25 heures dans un collège, j’avais donc du temps libre, et je m’en suis occupée. Et puis, à la fin de l’année scolaire, mon contrat n’a pas été renouvelé pour la suivante. J’étais très déçue parce que j’adorais ce que je faisais, je m’occupais du suivi de deux adolescents en difficulté, en fait. Du coup, je me retrouvais sans emploi, et comme le site commençait à décoller, je me suis dit “pourquoi pas une boutique ?”
Nous nous sommes lancés dans l’aventure. La boutique devait ouvrir en septembre, mais comme nous sommes toujours en retard (rires), nous avons dû ouvrir vers fin octobre, début novembre. J’y étais seule. Les premiers temps, il n’y avait pas beaucoup de clients. Et d’un coup, sans qu’on sache pourquoi, vers la fin de l’année, ça a décollé d’un coup. Mais littéralement ! Nous sommes passés d’une boutique vide à une boutique bondée, avec la queue jusque sur le trottoir. J’assurais toute la journée, et quand Cédric finissait, il venait m’aider. C’était la folie, au début, imaginez, je me suis retrouvée plusieurs fois à devoir fermer le magasin parce que je n’avais plus rien à vendre. Nous débutions, ce n’était pas notre métier, à la base. Nous n’avions aucune notion de la gestion du stock. C’était une époque folle et épuisante, mais c’était un vrai bonheur. Même si certains soirs, je finissais en larmes tellement j’étais épuisée, même si certains jours je paniquais presque à voir tout ce monde. Et les gens n’y connaissaient rien, il fallait bien expliquer à chacun, c’était le bonheur.
Quelle fonction occupez-vous aujourd’hui, et dans quelle entreprise ? Quel est votre parcours professionnel dans la vape ?
F.L. : Je suis gérante associée, toujours à L’Écovapoteur. La société a un peu changé, en fait (rires). Nous avons à présent six boutiques, celle de Brest, et cinq autres dans le Nord Finistère, à Landerneau, Lannilis, Plabennec, Saint-Renan et Morlaix. Cédric et moi gérons à plein temps de la société tous les deux, chacun s’occupant de ses tâches selon ses affinités. Je suis plus portée sur l’administratif, qui va du secrétariat à la compta, et je m’occupe du personnel. Ça va de la paie à l’aspect humain.
L’imagerie de la vape, sur les réseaux sociaux et dans la publicité, recourt souvent à l’image du hipster barbu et tatoué ou de la bimbo dévêtue. Pourtant, quand on se poste à l’entrée d’une boutique, on se rend compte que le vapoteur est une vapoteuse la moitié du temps. D’où vient ce phénomène, d’après vous ?
F.L. : Là-dessus, je n’ai pas d’explication, mais un avis. Aujourd’hui, ça tend à disparaître, mais pendant les premières années, j’entendais en boucle que la vape était une mode, que ça allait disparaître, que c’était juste passager. Il y avait vraiment ce côté éphémère, dans l’esprit des gens, un peu comme les hipsters. Et il est possible que la vape se soit attribué ces codes, en même temps que les gens qui partageaient ces codes se sont mis à la vape. Tout le monde semble avoir compris, aujourd’hui, que le vapotage va durer. Espérons que l’image évolue. Mais, nous sommes d’accord, ce n’est pas du tout représentatif de nos clients, qui sont dans leur immense majorité des personnes très éloignées de tout ça, qui veulent simplement arrêter de fumer.
On parle souvent de l’apport de la vision féminine. Pensez-vous qu’il existe une vision féminine de la vape et, si oui, quelle serait-elle selon vous ?
F.L. : Oui, je pense qu’il y a une vision féminine de la vape. En revanche, je ne saurais pas précisément la définir. Je prends l’exemple de Cédric et moi, à L’Écovapoteur : lui, il fait ce qu’il a à faire, moi aussi, mais j’ai plus tendance à aller au fond des choses. La société est un bouillonnement d’idées, qu’elles viennent de lui, de l’équipe ou de moi. Lui apporte le côté fonceur, moi l’aspect pragmatique des choses. Certaines sociétés, particulièrement des magasins, nous disent régulièrement qu’ils aimeraient recruter des femmes pour équilibrer des équipes majoritairement masculines, mais qu’ils n’en trouvent pas.
D’après vous, les métiers de la vape sont moins attirants ? Ou y a-t-il d’autres raisons ?
D’après votre expérience et les informations dont vous disposez, l’égalité salariale entre hommes et femmes est-elle un fait, ou est-ce qu’il existe des disparités comme dans le reste du marché du travail ?
F.L. : Globalement, oui. J’ai entendu un exemple choquant : dans une boutique de vape, un jeune vendeur qui vient d’arriver qui gagne 300 euros de plus qu’une vendeuse qui a quatre ans d’ancienneté. J’espère que c’est une exception. Je connais finalement peu de femmes dans la vape, même chez nos fournisseurs, il y en a peu. Des informations que j’ai, sur l’égalité de traitement, ça semble aller. Ça me semble tellement invraisemblable qu’il y ait une différence de salaire et de traitement entre les hommes et les femmes… Et que l’on soit encore obligé de débattre et de se battre pour ça aujourd’hui. Inutile de préciser que chez nous, nous ne faisons aucune différence.
Quels sujets vous tiennent particulièrement à cœur ?
F.L. : Le bien-être des salariés. L’Écovapoteur, ce n’est pas seulement Cédric et moi. Nous n’en serions pas aujourd’hui où nous en sommes si nous n’avions pas une équipe formidable, sans oublier toutes celles et tous ceux qui ont fait partie de l’aventure. En plus, quand on voit le temps que nous passons tous au travail, la moindre des choses est de s’assurer que tout le monde se sent bien. Qu’on soit heureux de venir travailler.
La vape de Fanny Laot
Vapoteuse depuis : 2012.
Setup actuel : Zlide et Adept d’Innokin.
Liquide préféré : Star West de StarVap.
Taux de nicotine : 12 mg/ml.
Consommation : 2 ml.