Philip Morris France a mis en ligne, sur son site, une réponse à l’article du journal Le Monde sur le lobbyisme des industriels du tabac dans la vape. Une réponse bien sentie, mais révélatrice d’un danger et qui renforce encore l’intérêt d’une vape indépendante parlant d’une même voix.

Quand PMI fâché, lui toujours faire ça

C’est un long communiqué manifestement très en colère, mais solidement argumenté, qu’a partagé Philip Morris France sur son site web. Celui-ci fait suite aux accusations parues dans le journal Le Monde, dont nous vous avions déjà entretenu ici :

Et PMI enfile l’armure du chevalier blanc, fustigeant les antivape qui rejettent l’innovation, et rappelant qu’au final, ce sont encore et toujours les fumeurs qui en paient les frais, parce que pouvant difficilement accéder aux produits alternatifs ou étant désinformés.

Le fabricant de Marlboro rappelle également que la fiscalité ne résout rien. Avec une politique de taxes, la France a une prévalence tabagique de 24 %, tandis que le Royaume-Uni, qui a fait le choix de la vape, voit sa prévalence à 12 % (et régulièrement en baisse).

Enfin, le cigarettier s’interroge sur les motivations profondes des associations qui luttent contre les alternatives. La multinationale qui fabrique, au total, 150 marques de cigarettes, termine en rappelant son engagement en faveur de la réduction des risques et du basculement de son activité (essentiellement souhaité plus que concret, pour le moment) vers les alternatives saines et lance un appel pour savoir ce que les fumeurs, principaux intéressés, en pensent.

La question est : PMI a-t-il tort ? Non. C’est une jolie réponse, bien envoyée, posée et raisonnable, dans la forme. C’est le fond qui est problématique.

Donne-moi ta main et prends ma gifle

Qui manque-t-il dans le texte de PMI ? Les cigarettiers répondent présents, puisqu’ils sont chez eux, les associations antivape y sont aussi, les gouvernements, la science, l’OMS, tout le monde est là. Sauf la vape indépendante.

Certes, il y a la phrase : « Depuis dix ans PMI ne demande qu’à coconstruire le changement pour les fumeurs, main dans la main avec l’ensemble des parties prenantes ». Les parties prenantes, c’est bien la vape indépendante, entre autres, non ?

Non, justement. Une partie du secteur de la vape indépendante tient à ne pas saisir la main tendue, même s’il s’y trouve un gros chèque. Pour plusieurs raisons.

Une question d’ordre éthique, d’abord. Les professionnels de la vape ne tiennent pas à travailler avec des entreprises qui, certes, expriment le souhait de changer, mais continuent, dans le même temps, à vendre des cigarettes qui vont tuer un consommateur sur deux.

Et même si ces entreprises cessaient de fabriquer des cigarettes, certains pensent qu’il ne serait pas moral de laisser prospérer des sociétés qui ont bâti leur fortune sur des centaines de millions de morts. Le débat est toujours ouvert.

Une question politique, ensuite : dans de nombreuses institutions, la porte est fermée à l’industrie du tabac. Pouvoir certifier de son indépendance vis-à-vis d’elle permet aux défenseurs de la vape de pouvoir parler avec des interlocuteurs qui, sinon, ne les écouteraient pas.

Une question de confiance, enfin : comment des entreprises de vape peuvent-elles travailler avec des gens qui ont tout fait pour empêcher le secteur de se développer avant de le rallier face à l’échec de cette stratégie ? Et surtout, comment peuvent-elles croire, elles, les poussins, que le grand méchant loup, habitué au monopole, acceptera de coexister dans la cour de la ferme et de partager les denrées ?

Il y a nous, puis nous, et enfin nous

Enfin, il y a toujours cette culture de l’amalgame. À de nombreuses reprises, Philip Morris met au même plan tabac chauffé et vape. Comme dans ce passage :

« La science mondiale et de nombreuses agences de santé publique s’accordent aujourd’hui pour reconnaître que les alternatives comme le tabac à chauffer et la cigarette électronique permettent aux fumeurs adultes qui ne s’inscrivent pas dans une démarche de sevrage de la nicotine de sortir de la cigarette. Plus de 85 études indépendantes ont été menées sur notre dispositif de tabac à chauffer par des équipes de premier plan. La FDA et l’Institut Pasteur ont récemment conclu à une diminution significative des émissions de substances chimiques nocives et potentiellement nocives ».

C’est vrai, mais… Il y a 85 études sur le tabac chauffé (selon les chiffres de PMI dans son communiqué), contre plusieurs milliers sur la vape. Il y a une diminution significative (par rapport à la combustion) d’émissions toxiques sur le tabac chauffé, mais il y a absence de ces substances dans la vape. 

Certes, le tabac chauffé réduit les risques, mais, en ce domaine, la vape obtient de meilleurs résultats sur tous les plans, rendant l’existence même du tabac chauffé obsolète.

Reçu fort et clair

Mais surtout, ce que nous enseigne cette séquence, c’est que le débat sur la vape semble se dérouler entre Philip Morris et les antivape. Et cela n’est pas acceptable, dans le sens où, si on laisse faire, soit les arguments de la vape indépendante ne seront pas entendus, soit ils ne seront pas écoutés. C’est le choix entre « pas la peine de perdre du temps avec vous, PMI l’a déjà dit » ou bien « c’est l’industrie du tabac qui parle par votre bouche ».

Et pourtant, non et non : ce que dit la vape indépendante n’est pas ce que dit PMI (ni BAT ni aucun autre marchand de cigarettes), et ce que défend la vape indépendante ne sert pas les intérêts de Big Tobacco. Au contraire.

L’amalgame soigneusement entretenu par les cigarettiers se joue aussi dans l’entrisme. Entrisme d’une fédération qui se veut défendre la vape, mais qui porte la voix des intérêts du tabac, entrisme jusque dans certains médias de la vape, où les budgets publicitaires s’accompagnent de bienveillance.

Si la vape indépendante laisse la partie se jouer selon les règles des cigarettiers, alors ces derniers ne pourront que gagner. Une victoire de la vape, accompagnée de leurs « conseils éclairés » auprès des décideurs, débouchera sur un marché où ils auront le monopole, et une défaite assurera la longévité de leur activité tabac.

Pour empêcher cela, la vape a besoin de deux choses : un porte-voix et un cordon de sécurité. C’est le rôle des associations de la vape indépendante de porter la parole des vapoteurs, mais le cordon sanitaire, c’est à chacun de nous de le dresser.

Le post original de PMI se trouve ici : www.pmi.com/markets/france/fr/centre-de-presse/details-news/choisir-entre-dogmatisme-aveugle-et-nouvelles-perspectives

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