Parti de rien en 2012, Matthieu Cadosch est aujourd’hui à la tête de deux réseaux (Point Smoke et Nicotech), soit une cinquantaine de boutiques. En outre, depuis 2014, il développe Edenvape, sa marque d’e-liquide, et ses nombreuses gammes. Aujourd’hui, il raconte les dessous de son parcours.
Bonjour Matthieu Cadosch, commençons par les présentations….
J’ai 42 ans, j’habite à Maisons-Alfort dans le Val-de-Marne, je travaille avec ma femme Marine, j’ai 5 enfants, eh oui une famille nombreuse ! Le groupe Point Smoke est une entreprise familiale. En effet, je travaille également avec ma mère Florence, ma sœur Émilie, mon frère Matthias et mon beau-frère Clément. Ils m’ont rejoint progressivement dans cette aventure.
Comment avez-vous découvert la cigarette électronique ?
J’ai découvert la cigarette électronique le jour où mon père a offert une cigarette électronique à ma mère, qui était fumeuse de longue date et qui avait essayé plusieurs méthodes pour arrêter le tabac avec des succès mitigés. En quelques jours, elle ne fumait plus du tout, j’ai donc été impressionné avec l’envie immédiate de me lancer dans cette aventure.
Quelle est votre formation ?
Je n’ai ni formation ni diplôme, hormis un bac ES (Sciences économiques et sociales), je suis un autodidacte en quelque sorte ! Je pense avoir su m’entourer des bonnes personnes pour m’épauler au quotidien, notamment ma famille. J’ai aussi fait de très belles rencontres avec mes franchisés, avec qui j’ai une fidélité et une confiance réciproques fortes. Nos relations basées sur la transparence et l’échange m’ont beaucoup aidé à évoluer et à progresser.
Vous avez créé Point Smoke en octobre 2012. Comment l’aventure a-t-elle démarré ?
En janvier 2012, j’ouvre un “bar à sourire” (institut de blanchiment dentaire) dans un petit local à Maisons-Alfort. L’aventure tourne court puisqu’en septembre de la même année, je suis au bord de la faillite, je me retrouve au RSA avec 500 € par mois pour vivre et ma grand-mère qui payait mon loyer (merci encore Nanou)… En septembre toujours, je découvre la cigarette électronique, je suis convaincu du produit, de ses bienfaits, de son gros potentiel et me lance immédiatement avec les 3 000 € qu’il restait sur mon compte pro. Je commande 1 000 € de matériel en Chine, 1 500 € d’e-liquide chez Gaïatrend et 500 € de mobilier chez Ikea.
Je transforme mon bar à sourire en magasin de vape (très moche avec le recul !), le CA double chaque jour, puis chaque semaine puis chaque mois. Certains passants dans la rue me prenaient pour un fou en me disant : “Jamais ça ne marchera !” J’avais l’impression de piloter une fusée ! Croissance forte, sensations fortes, je suis fier d’avoir saisi cette opportunité de business qui ne se produit que quelques fois par siècle. Après la galère, j’ai pu enfin souffler.
Qu’est-ce qui vous a motivé à créer Point Smoke ?
Tout d’abord, je suis un entrepreneur passionné, j’ai créé ma première entreprise à 20 ans, j’ai eu depuis plusieurs entreprises dans différents secteurs avec plus ou moins de succès. Lorsque j’ai découvert la vape, je me suis découvert une autre passion liée au concept, à l’univers, à l’immensité des saveurs, à la technologie. En plus, cette activité me permettrait de sortir les fumeurs du tabac. Tout était parfait ! Il faut aussi reconnaître que je n’avais plus trop de choix étant donné ma situation perso et pro, j’ai fait “tapis” sur la vape.
Comment avez-vous trouvé le nom de Point Smoke ? Pourquoi ce choix ?
Mon magasin de blanchiment dentaire s’appelait Point Smile, n’ayant plus d’argent et pour faire des économies, j’ai demandé à l’enseigniste de ne changer que deux lettres de l’enseigne (I et L). J’ai aussi choisi ce nom, car “Point” dans le sens “lieu d’intérêt” et “Smoke” pour la “fumée” que dégage une cigarette électronique.
Aujourd’hui, où en est le réseau ?
Aujourd’hui, il y a 38 magasins dans le réseau Point Smoke et 12 dans le réseau Nicotech, soit 50 shops au total. Nous avons des projets de croissance externe à l’étude.
Envisagiez-vous un réseau aussi étendu 10 ans plus tard ?
Très honnêtement, quand j’ai commencé seul dans mon magasin de 25 m² (que j’ai toujours d’ailleurs) je ne me fixais pas d’objectifs particuliers sur un nombre de magasins, au début, ce sont des clients qui m’ont demandé à se franchiser. Les choses se sont faites naturellement. J’ai avancé vite et je me suis entouré des bonnes personnes, de bons collaborateurs, de bons franchisés et, bien sûr, de ma famille qui travaille avec moi. Ils sont extrêmement investis et me conseillent. Je continue d’avancer, je ne regarde pas souvent dans le rétroviseur du passé.
En 2019, vous avez racheté le réseau Nicotech (12 boutiques dans le Sud de la France). Qu’est-ce qui a motivé cette décision ?
Il y a plusieurs raisons. Tout d’abord, j’avais besoin d’un nouveau challenge inscrit dans une stratégie de croissance externe. Puis le hasard a bien fait les choses, puisque quelques jours plus tard, j’ai reçu un appel du cabinet qui représentait Nicotech qui me disait : “Vous êtes intéressé par cette acquisition ?”. La vente s’est faite quatre mois plus tard. Je suis très satisfait de cette intégration qui a permis de renforcer davantage mon groupe, notamment dans cette zone de turbulence que nous avons connue avec la pandémie. Cela m’a permis d’apprendre davantage et de me créer de nouveaux horizons.
Vous auriez pu absorber ces boutiques dans le réseau Point Smoke, pourquoi avez-vous gardé le nom de Nicotech pour ces boutiques ?
Je me suis effectivement posé cette question. Nicotech jouit d’une très belle image et notoriété dans le Sud. Je ne voulais pas changer une recette qui fonctionnait très bien.
Qu’est-ce qui différencie le réseau et les boutiques Point Smoke et Nicotech des autres ?
Nous mettons tout en œuvre afin que la satisfaction de notre clientèle soit la plus forte possible, cela fait maintenant trois années consécutives que Point Smoke est lauréat “Meilleur enseigne” du palmarès établi par le magazine Capital selon un sondage effectué auprès de 20 000 personnes. Nous mesurons en permanence cette satisfaction auprès de nos clients via différents outils. Nos conseillers-vendeurs reçoivent une formation qualitative complète, notamment sur la partie technique, accueil client et vente. Cela permet d’offrir à nos clients un accompagnement fort et personnalisé. Tous nos magasins ont le même agencement avec une décoration chaleureuse et stylisée qui reflète notre niveau d’exigence. Je suis très fier de nos franchisés et de nos collaborateurs qui font un travail quotidien incroyable pour placer Point Smoke et Nicotech dans l’excellence.
Sur quels critères faites-vous votre sélection de produits ?
Le critère fondamental de sélection de nos produits est bien sûr la qualité, tant pour le matériel que pour l’e-liquide. Nous travaillons donc avec les acteurs les plus sérieux de la filière. Notre sélection est également basée sur la diversité et la complémentarité des produits que nous souhaitons proposer à nos clients, tout en y incluant les dernières nouveautés.
La crise écologique prend de plus en plus d’importance. Quelles sont les actions de Point Smoke et de Nicotech pour diminuer leur empreinte carbone ?
Nous menons effectivement des actions pour réduire notre empreinte carbone. Nous réduisons au minimum le nombre d’expéditions mensuelles de marchandises vers nos magasins pour éviter les transports, nous réutilisons au maximum les emballages pour nos expéditions, nous avons remplacé tout l’éclairage de notre entrepôt par de la basse consommation, dans chaque magasin, nous mettons à disposition des boîtes de collecte de fioles vides et d’accus usagés et, enfin, nous remplaçons trois véhicules à essence par des véhicules électriques.
Quelles sont les conditions à remplir pour faire partie de votre réseau de franchisés ?
Il n’y a pas vraiment de conditions strictes à remplir pour faire partie de notre réseau. Il faut bien sûr un état d’esprit compatible avec nos valeurs, il faut avoir l’envie d’entreprendre, avoir un intérêt pour la vape, comprendre ses bienfaits et son intérêt majeur dans les réductions de risques pour les fumeurs. Un minimum de connaissance initial suffit, étant donné les formations et suivis que nous proposons à nos affiliés, et ce tout au long du partenariat. Notre relation est bâtie sur l’échange et la communication.
Quels sont aujourd’hui les moyens techniques et humains de Point Smoke ?
Au cours des dernières années, nous avons déménagé à trois reprises pour suivre notre développement en termes de capacité. Aujourd’hui, nous avons un entrepôt de 1 200 m² qui emploie 20 personnes au siège. Nous avons un pôle logistique, une équipe au service achat, une équipe au service communication et marketing, une équipe à la préparation des commandes Internet B to C et un animateur réseau. Nous disposons également de deux lignes de conditionnement pour la fabrication de nos e-liquides de notre marque Edenvape.
Depuis deux ans, nous subissons la pandémie de Covid-19, quel impact a-t-elle eu sur Point Smoke en termes de chiffre d’affaires et de développement du réseau ? Les habitudes d’achat des vapoteurs ont-elles évolué ?
Notre activité a très largement bénéficié de cette chance d’avoir été reconnue comme “commerce essentiel”, même si les premières semaines de la pandémie ont demandé d’être très réactif sur la mise en place d’un protocole sanitaire de protection des équipes et des clients. Les clients sont restés fidèles à notre enseigne et se sont également adaptés à la situation. Certains magasins de centre-ville ont vu leur chiffre d’affaires progresser durant cette période, en revanche la situation a été plus compliquée pour les magasins situés en centre commercial de plus de 20 000 m² fermés en tout environ 6 mois. Globalement, nous avons stabilisé notre CA durant 2020 et 2021, certains projets ont été mis en pause, car la visibilité n’était plus au rendez-vous. Depuis plusieurs mois maintenant, nous avons repris notre rythme normal. Les habitudes d’achat des vapoteurs se sont reportées sur le Web durant les périodes de confinement, ils ont repris le chemin des magasins physiques assez rapidement dès qu’ils en ont eu la possibilité. D’une manière générale, on constate un fort attachement et une fidélité à leur magasin.
En 2014, vous avez également créé la marque d’e-liquides Edenvape aux arômes 100 % naturels. Pourquoi vous lancer dans l’aventure de l’e-liquide en plus de Point Smoke ?
Tout d’abord, en 2014 il y avait assez peu de fabricants d’e-liquide et je voulais construire une identité propre à mon réseau, car Edenvape reste aujourd’hui une exclusivité de Point Smoke et Nicotech. Je souhaitais aussi être autonome et indépendant, pouvoir créer les saveurs qui correspondaient aux attentes de nos clients et leur faire découvrir des univers imaginés par mes équipes. Le pari est réussi, aujourd’hui nos produits sont de loin les plus vendus dans nos magasins, notamment grâce à nos franchisés et à nos conseillers-vendeurs qui mettent en avant nos e-liquides auprès de leur clientèle. Depuis un an environ, la marque est de plus en plus active, avec des nouveautés régulières. Effectivement, durant la période Covid et les confinements, nous nous sommes aperçus que nos clients étaient plus stressés, par rapport à la conjoncture et aux restrictions. Nous avons donc imaginé des gammes d’e-liquides sur les thèmes du voyage, de l’évasion et de l’exotisme. Ces lancements ont été orchestrés avec de l’animation commerciale forte en magasin et cela a très bien fonctionné !
Nous en avons profité pour revoir notre processus de lancement de nouvelles gammes qui nous permet d’avoir un rythme bien plus soutenu qu’auparavant.
Vous qui êtes actif dans le secteur depuis 10 ans, quel regard portez-vous sur le marché de la vape en France ?
Le marché a beaucoup évolué. Au début, c’était un peu le “Far West” et l’“Eldorado” en même temps, certains ont compris dès le début que travailler sérieusement c’était travailler pour longtemps, d’autres voulaient faire de l’argent rapide, ils ne sont plus là aujourd’hui. Les acteurs du paysage actuel se sont professionnalisés, cela devrait d’ailleurs finir prochainement par une reconnaissance officielle de nos métiers (formations, branche, etc.).
Le marché de la vape est selon moi assez stable pour les magasins spécialisés et suffisamment concurrentiel pour rester dynamique et en perpétuelles recherches d’améliorations, d’innovations pour se différencier davantage. Le matériel est de plus en plus fiable et efficace et il existe un nombre de saveurs d’e-liquide incalculable proposé par des fabricants français extrêmement sérieux et qui débordent d’imagination. Je suis optimiste concernant notre marché qui reste en progression, il reste en France plus d’une dizaine de millions de fumeurs à convertir en vapoteurs !
Comment percevez-vous la situation française sur la cigarette électronique ?
Je trouve que nous pouvons nous estimer chanceux d’avoir une des transpositions de la directive européenne la plus souple possible, notamment grâce au travail de la Fivape qui a œuvré dans ce sens. Le fait que les magasins de vape aient été reconnus comme “commerce essentiel” durant les confinements me semble être un signal positif envoyé par notre gouvernement de l’époque. En revanche, je juge timide l’implication des autorités à promouvoir la vape comme moyen efficace de lutte contre le tabagisme. En effet, aujourd’hui une proportion importante de la population pense que la vape est aussi, voire plus dangereuse que le tabac, une communication de nos services de santé permettrait de corriger cette désinformation, d’apporter un flux de clients plus important en magasin tout en participant à une politique de santé publique efficace contre le tabagisme.
Quels sont, selon vous, les prochains challenges de la vape en France ?
Selon moi, il faut que la filière continue son travail de professionnalisation et de crédibilité auprès des autorités sanitaires et du grand public. Il faut que les acteurs de notre marché soient les représentants légitimes, contrairement aux buralistes, d’un outil sain et efficace dans la lutte contre le tabagisme. Il faut réussir à inverser cette tendance dans laquelle l’opinion publique pense que la vape est aussi dangereuse pour la santé que le tabac.
Vous proposez quelques puffs aux clients. C’est un produit qui fait débat aujourd’hui, notamment au niveau de son impact écologique. Quel est votre avis sur le sujet ?
Je pense que ce débat est beaucoup alimenté par les journalistes. Effectivement, il y a eu un fort effet de mode auprès des jeunes, notamment des mineurs, on ne peut pas le nier. En revanche, pour notre part, nous nous sommes toujours interdits de vendre de la vape aux moins de 18 ans, d’ailleurs chez Point Smoke et Nicotech nous ne mettons pas ces produits en avant. Il ne faut pas oublier que le tabagisme touche aussi les jeunes (majeurs) et qu’il vaut mieux qu’ils se tournent vers des dispositifs jetables plutôt que de continuer dans le tabac. Les puffs, il faut le reconnaître également, sont loin d’être des produits qui s’inscrivent dans une logique d’écologie responsable, c’est pour cela que nous avons mis à disposition dans nos magasins des boîtes de recyclage pour limiter cet impact. Il faut voir les puffs comme un produit tremplin aux autres dispositifs classiques que nous proposons dans les magasins spécialisés.
Enfin, parlez-nous de vos projets et de vos objectifs…
Même si la période est encore un peu instable à cause des effets de traîne du Covid et de la guerre en Ukraine, nous nous inscrivons dans une phase de développement. Nous étudions actuellement des opportunités de croissance externe et nous sommes d’ailleurs à la recherche d’opportunités, c’est-à-dire des magasins ou des réseaux qui seraient vendeurs. À bon entendeur ! Nous fêterons nos 10 ans en fin d’année ! Ce sera bien sûr l’occasion de fêter cet événement avec nos franchisés et collaborateurs. Je me rends compte que je n’ai pas vu le temps passer !
Point Smoke en chiffres
Chiffre d’affaires du réseau en 2021 : 13 millions d’euros HT.
Croissance du chiffre d’affaires en 2021 : + 3 %
Investissement de départ : 3 000 € HT.
Nombre de salariés travaillant pour l’enseigne : 96.
Nombre de boutiques : 38.
Nombre de franchisés : 20.
Nombre de références : + de 4 000.
Nicotech en chiffres
Chiffre d’affaires en 2021 : 6,5 millions d’euros HT.
Croissance du chiffre d’affaires en 2021 : + 2 %.
Investissement de départ : NC.
Nombre de salariés : 36.
Nombre de boutiques : 12.
Nombre de franchisés : 0.
Nombre de références : + de 4 000.
Edenvape en chiffres
Chiffre d’affaires en 2021 : 2 millions d’euros HT.
Croissance du chiffre d’affaires en 2021 : + 13 %.
Investissement de départ : 10 000 €.
Nombre de salariés : 5.
Nombre de références : 440.
Point Smoke en dates
Date de création : octobre 2012.
Premier franchisé : janvier 2013.
Nombre de boutiques : 38.
Nombre de franchisés : 20.
Lancement du site en ligne : novembre 2012.
Nicotech en dates
Date de création : septembre 2011.
Nombre de boutiques : 12.
Nombre de franchisés : pas de franchisés.
Lancement du site en ligne : 2012.
Edenvape en dates
Date de création : avril 2014.
Première gamme d’e-liquide : Edenvape, en avril 2014.
1rs e-liquides : 2014.
1rs shortfills : 2019.
1re gamme aux sels de nicotine : 2019.